Les inégalités, point commun de tous les pays

La grande stagnation économique qui s’est abattue sur le monde après la crise financière de 2008 a-t-elle accru ou réduit les inégalités ? Et d’ailleurs, de quelles inégalités parle-t-on, de celle qui sépare le paysan malien de son homologue français ou de celle qui éloigne ce dernier du cadre supérieur parisien. Depuis la parution de la somme de Thomas Piketty sur l’évolution des inégalités au XXsiècle, tous les grands organismes ont tenté d’y voir plus clair sur le sujet et son évolution dans le temps.

Lire aussi :   Inégalités : Thomas Piketty répond aux critiques du FMI sur ses travaux

Après l’OCDE et le FMI, la Banque mondiale publie ce lundi 3 octobre son étude sur « la pauvreté et la prospérité partagée ». Son intérêt est de séparer deux périodes distinctes, celle de la mondialisation triomphante, entre 1993 et 2008, et celle de la stagnation laborieuse, entre 2008 et 2013.

Premier constat, l’extrême pauvreté continue de se réduire. En 2013, environ 800 millions de personnes vivaient sur la planète avec moins de 1,90 dollar par jour, soit 100 millions de personnes de moins que l’année précédente. A ce rythme, le monde pourrait être débarrassé de ce fléau d’ici à 2030, objectif fixé par les Nations unies. Mais pour cela, la Banque mondiale prévient qu’il faudra faire un effort du côté des inégalités.

Divergence des revenus

Depuis vingt ans, la mondialisation a économiquement rapproché les pays mais éloigné les hommes. La croissance de la Chine, de l’Inde ou de l’Indonésie s’est construite au prix d’une divergence forte des revenus à l’intérieur de ces pays, mais également au sein des pays industrialisés.

Lire aussi :   Le nouvel âge des inégalités

Selon la Banque mondiale, une inflexion s’est produite après 2008. Nombre de pays connaîtraient une réduction des écarts de revenu à l’intérieur de leurs frontières. Ainsi, sur un échantillon de 83 pays, dans 60 d’entre eux les 40 % les plus pauvres ont connu une croissance supérieure de leurs revenus supérieure à la moyenne nationale. C’est le cas en Chine, au Brésil, mais aussi, de façon plus surprenante dans des pays développés comme le Royaume-Uni, l’Allemagne ou la Suisse. Sur cette période, huit pays industrialisés ont vu leurs inégalités se réduire contre six qui ont connu une aggravation (notamment l’Espagne, l’Italie ou la Grèce).

La Banque mondiale se garde bien d’en conclure que la stagnation économique et la réduction des échanges internationaux, en appauvrissant tout le monde, auraient des effets positifs sur la réduction des inégalités et de la pauvreté. Elle entend même démontrer le contraire en insistant sur l’importance, notamment pour les pays émergents, de poursuivre la mondialisation et de mener en parallèle une politique sociale ambitieuse (éducation et santé, indemnisation des plus pauvres), confirmant à son tour, sans le dire, la fin d’un certain dogme libéral.
Le Monde 04/10/2016