Aujourd’hui en Allemagne

Synthèse de la presse quotidienne

29 décembre 2016

Ce document est à usage strictement interne et a été réalisé par l’Ambassade de France en Allemagne

  1. L’enquête sur l’attentat de Berlin fait les gros titres de la Frankfurter Allgemeine Zeitung qui rapporte l’« arrestation d’un contact présumé d’Amri à Berlin » et de la Süddeutsche Zeitung qui révèle que « c’est un système de freinage automatique qui a arrêté le camion de la mort à Berlin ». Die Welt consacre sa Une aux propositions sur l’intégration que discutera la CSU lors de son séminaire parlementaire de début d’année (« la CSU veut intégrer par des interdictions »). Der Tagesspiegel revient sur le nouveau retard dans la livraison du nouvel aéroport de Berlin (« BER – pourquoi ce sera 2018 »). Le quotidien des affaires Handelsblatt rapporte que « les communes menacent l’énergéticien RWE », les actionnaires communaux du groupe exigeant des dividendes.
  1. Allemagne

Suites de l’attentat de Berlin

Alors que tous les journaux rendent compte de l’arrestation hier à Berlin d’un Tunisien auquel Anis Amri aurait envoyé un SMS peu avant l’attaque terroriste du 19 décembre, une enquête de la Süddeutsche Zeitung révèle que c’est un dispositif automatique de freinage après collision qui a arrêté la course du camion meurtrier, évitant un bilan beaucoup plus lourd. Anis Amri était par ailleurs surveillé depuis plusieurs mois par les services de police allemands, révèle le journal, qui indique que les polices de Rhénanie-du-Nord-Westphalie et de Dortmund le considéraient comme un sympathisant de Daech radicalisé. Les autorités avaient connaissance de recherches internet d’Amri sur les explosifs et du fait qu’il se serait dit candidat à un attentat-suicide sur des forums islamistes en février dernier. Il n’en reste pas moins que lors de la dernière évaluation de son cas le 2 novembre dernier, un passage à l’acte avait été jugé « plutôt improbable » par les services, croit savoir la SZ.

Au fur et à mesure des révélations de l’enquête et alors qu’un sondage Bild Insa de ce matin confirme l’inquiétude croissante des Allemands face au risque de nouvel attentat (64,6% contre 60% avant l’attaque de Berlin), la presse demande des comptes. La Frankfurter Allgemeine Zeitung exige la mise en place d’une commission d’enquête indépendante pour « analyser sans détour les vulnérabilités de l’architecture de sécurité allemande ». Le quotidien conservateur s’en prend également aux défaillances de la coopération européenne « qui apparaît aujourd’hui sous une lumière éclaboussée de sang ». Loin du soi-disant espace commun de liberté, de sécurité et de justice, l’Europe est « un eldorado pour les personnes à haute énergie criminelle comme Amri », avec des autorités qui ne peuvent ou ne veulent pas coopérer, des fichiers inexploités quand ils sont seulement renseignés et des services secrets tributaires de leurs partenaires d’outre-Atlantique. L’hebdomadaire de centre-gauche Die Zeit se montre inhabituellement ferme ce matin appelant à créer « un Ellis Island européen en dehors de l’UE » et à durcir la politique migratoire qui doit « montrer la porte aux terroristes et délinquants avant qu’ils n’arrivent en Europe ». La Süddeutsche Zeitung constate que l’Allemagne « n’a plus été aussi politisée depuis bien longtemps » et appelle pour sa part au sang-froid, invitant la politique et les médias à ne pas céder à « l’hystérie » qui rend les migrants responsables d’une insécurité accrue en Allemagne – perception alimentée par des faits divers mais que ne confirme aucune étude sérieuse, insiste le journal.

En dépit des critiques, les sondages suggèrent que la chancelière résiste bien politiquement et que le SPD pâtirait davantage de l’attentat de Berlin. Après les baisses du SPD dans les enquêtes du week-end, un sondage Forsa pour le magazine Stern décrit un décrochage des sociaux-démocrates par rapport à la CDU/CSU, qui avec 38% d’intention de votes devancerait de 18 points son partenaire de grande coalition. Selon le sondage Bild Insa, 19,7% des Allemands font d’abord confiance à la CDU pour protéger l’Allemagne de nouvelles attaques terroristes, contre 7,9% au SPD (et 10,7% à l’AfD). Même si de plus en plus d’Allemands seraient favorables au plafond d’accueil de demandeurs d’asile demandé par la CSU mais refusé par la CDU (67% contre 62,7% avant l’attentat pour le sondage Bild), Der Stern met en avant que 68% des Allemands ne font pas de lien entre l’attaque terroriste et la politique migratoire de Mme Merkel (28% établissant un tel lien).

« La CSU veut intégrer par des interdictions » (Die Welt)

Die Welt indique que les parlementaires CSU seront à l’offensive sur les questions d’intégration lors de leur séminaire la semaine prochaine. D’après un document interne, le parti bavarois défendra la « culture de référence » allemande, l’interdiction de la burqa et du niqab partout où cela est juridiquement possible, l’interdiction du port du voile par les magistrats, l’abolition de la double nationalité pour les enfants d’étrangers nés en Allemagne, l’interdiction du mariage avec des mineurs et de la polygamie.

Le journal s’inquiète dans un autre article du maintien à un niveau élevé des actes hostiles visant des centres de demandeurs d’asile, puisque 921 attaques ont été recensées par l’office fédéral de police criminelle depuis le début de l’année, soit seulement une centaine de moins qu’en 2015 et cinq fois plus qu’en 2014.

  1. Europe

« Crainte d’une nouvelle crise de la zone euro » (Handelsblatt)

Le quotidien économique s’inquiète de l’accumulation de signaux annonciateurs, selon lui, d’une nouvelle crise de l’Eurozone. Aux inquiétudes habituelles liées aux programmes d’aide à la Grèce et à la mansuétude de la Commission sur les déficits italien, espagnol et portugais, s’ajoutent des préoccupations sur l’implication de l’Etat italien dans le sauvetage de la banque Monte dei Paschi di Siena, ainsi que sur l’emballement des transferts transeuropéens (Target-2) perçu comme un effet secondaire du programme de rachats d’actifs de la BCE. Dans ce contexte, le journal fait état d’une proposition de réforme de l’UEM sans révision des traités préparé par la commission des affaires européennes de la CDU. Le texte prévoirait principalement de renforcer les compétences du MES en matière de surveillance des politiques financières et économiques des Etats, en particulier ceux sollicitant son aide et qui pourraient être soumis à des règles d’insolvabilité. La création d’un système de garantie des dépôts serait par ailleurs conditionnée à un assainissement des bilans bancaires.

Fusion des bourses de Francfort et de Londres

Le Handelsblatt indique que la bourse de Londres serait en passe de vendre à Euronext ses activités en France (chambre de compensation Clearnet) pour vaincre les réticences de la Commission européenne et « les craintes françaises » sur sa fusion avec la bourse de Francfort. Les milieux boursiers ne seraient toutefois pas certains que cela suffira, précise le quotidien des affaires.

  1. International

« Eviter une nouvelle guerre ! » / Tribune d’Abdullah Gül

Dans une tribune publiée par le Handelsblatt, Abdullah Gül plaide pour que les efforts de paix au Moyen-Orient « aillent de pair avec un projet global de reconstruction afin d’éviter un nouvel enlisement des pays de la région dans la guerre ». Pour l’ancien président turc, ces efforts de paix doivent suivre plusieurs priorités : éviter l’éclatement de l’Irak, de la Libye, de la Syrie et du Yémen en proie à des guerres civiles et menacés par les irrédentismes ; relancer le processus de paix en faveur duquel il salue l’engagement de la France et de la Russie et soutient l’initiative de paix arabe ; régler les différends entre l’Arabie saoudite et l’Iran.

 France

« Dur, mais avec modération » (Handelsblatt)

Dans un éditorial, le correspondant en France du Handelsblatt Thomas Hanke estime que l’Allemagne peut apprendre beaucoup de l’expérience française dans la lutte contre le terrorisme, qu’il s’agisse des « démarches pertinentes » ou des « réactions politiques inutiles ». Le journal recommande ainsi d’utiliser les moyens modernes de surveillance des personnes représentant une menace sans chercher à toutes les enfermer. Il demande de renoncer aux récupérations politiciennes des attentats et d’associer les musulmans à la lutte contre Daech sans les stigmatiser comme le font les « idiots utiles » du FN ou de l’AfD. Les médias doivent faire preuve de discernement pour ne pas contribuer à la propagande de terreur de Daech. Il faut surtout renforcer la coopération entre les services secrets et préserver l’Etat de droit. S’il est nécessaire de garder le sens de la mesure, écrit le journal, « le temps de la grève du zèle » dans la lutte contre le terrorisme appartient toutefois au passé./.