Berlin renonce à son objectif d’un million de voitures électriques en 2020

L’Allemagne visait 1 million de véhicules électriques en circulation d’ici à 2020. Les experts jugeaient cet objectif, fixé en 2009, irréalisable, malgré la croissance du parc.

Le gouvernement allemand avait vu trop grand : l’Allemagne ne comptera pas 1 million de voitures électriques en circulation sur ses routes en 2020. « Tel que les choses apparaissent pour le moment, nous n’atteindrons pas cet objectif », a déclaré lundi soir Angela Merkel. Après s’y être longtemps cramponné, Berlin renonce ainsi officiellement à cet objectif fixé en 2009. Les experts automobiles jugeaient depuis longtemps cette ambition gouvernementale démesurée face à la réalité du marché. « Il est logique que le gouvernement admette ce que nous avons reconnu depuis des années, attendre plus longtemps aurait été ridicule », a réagi Stefan Bratzel, expert de l’institut Center of Automotive Management (CAM).

Car, en dépit d’une augmentation de 33,4 % sur un an au 1er janvier 2017, l’Allemagne reste loin du compte, avec 34.000 véhicules électriques en circulation, selon les chiffres de l’agence fédérale pour l’automobile (KBA). Stefan Bratzel estime quant à lui que leur nombre s’établit plutôt entre 50.000 et 100.000, en prenant en compte aussi les modèles hybrides.

Plusieurs freins

Si les ventes n’ont jusqu’ici pas réellement décollé dans l’électrique, « ce n’est pas un problème de demande classique, mais d’offre », décrypte le spécialiste, qui met en avant le nombre encore insuffisant de modèles sur le marché. Egalement en cause : les infrastructures de recharge trop peu nombreuses. Sur les 70.000 points de charge publics estimés nécessaires à l’échelle du pays d’ici à 2020, la fédération des entreprises de l’énergie (BDEW) comptait seulement 7.400 bornes de recharge disponibles fin 2016.

Nous avons franchi un cap mental.

Enfin, les prix des véhicules, encore bien plus élevés que ceux des voitures à essence, freinent les ventes. Et la prime à l’achat, d’un montant maximum de 4.000 euros, lancée par Berlin en juillet 2016 reste insuffisante, estime Stefan Bratzel. Qui souligne qu’en Norvège, où les subventions sont plus élevées, la e-Golf de Volkswagen est moins chère que sa jumelle à essence.

Mais rien n’est perdu pour l’électrique : Berlin avait fixé son ambitieux objectif avant que naisse l’engouement mondial pour ce segment. Les constructeurs y travaillent aujourd’hui de façon intensive. « Nous avons franchi un cap mental », commente Stefan Bratzel. Volkswagen, Mercedes, BMW, Audi, Porsche, Opel… L’ensemble des marques nationales a annoncé ces derniers mois l’arrivée prochaine de nouveaux modèles électriques avec des batteries de nouvelle génération. Et plusieurs grandes villes allemandes, dont Stuttgart, sont en train de restreindre la circulation aux véhicules les plus polluants. « Je m’attends à une croissance exponentielle des ventes à partir de 2020, quand les constructeurs allemands proposeront une large offre. »

Pauline Houédé (correspondante à Berlin)

Les Echos 16/05/2017