Aujourd’hui en Allemagne. 30 Mai 2017

French Economy Minister Emmanuel Macron attends a press conference on September 11, 2015 after the 4th CoSpace meeting. AFP PHOTO / FLORIAN DAVID

Synthèse de la presse quotidienne

Ce document est à usage strictement interne et a été réalisé par l’Ambassade de France en Allemagne

30 mai 2017

  1. La rencontre entre le président de la République et son homologue russe à Versailles fait la Une de la Frankfurter Allgemeine Zeitung: « Macron : l’échange avec Poutine fut extrêmement franc et direct ». Les autres journaux consacrent leurs gros titres aux réactions à l’appel d’Angela Merkel à ce que « l’Europe prenne son destin en main » : « l’UE soutient Merkel contre Trump » (Süddeutsche Zeitung), « une phrase et ses conséquences » (Die Welt), « Schulz reproche à Trump de pratiquer un chantage » (Der Tagesspiegel), « les milieux économiques soutiennent Merkel » (Handelsblatt).
  2. Allemagne / Etats-Unis

« Merkel : je demeure profondément convaincue de l’importance du lien transatlantique » (Frankfurter Allgemeine Zeitung)

Les propos de la chancelière sur le lien transatlantique (« l’époque où nous pouvions compter sur autrui est révolue, nous, les Européens, devons vraiment prendre en main notre propre destinée ») sont à nouveau abondamment commentés par l’ensemble de la presse. La FAZ relève aujourd’hui que lors d’un point de presse régulier, le porte-parole du gouvernement fédéral a jugé bon d’ajouter que la chancelière « demeure profondément convaincue de l’importance du lien transatlantique » et que « c’est précisément parce que les relations transatlantiques revêtent une dimension toute particulière qu’il est important d’évoquer les différences ». Tout comme la Süddeutsche Zeitung, le journal de Francfort note que le président de la commission européenne, Jean-Claude Juncker, a lui aussi appelé les Européens à davantage d’unité et d’autonomie et que Martin Schulz, candidat tête de liste du SPD, abonde dans le sens de la chancelière en jugeant, dans une tribune que publie aujourd’hui le Tagesspiegel, que l’Europe doit réagir avec « réalisme », et surtout avec « assurance », à l’attitude de Donald Trump. De l’avis du candidat du SPD, par son slogan ‘America first’, le président américain « mise non pas sur la diplomatie internationale mais sur le chantage politique » car ce slogan est synonyme d’isolationnisme et érige comme principe la loi du plus fort.

De l’avis de la Berliner Zeitung, la chancelière vient de « mettre en scène » à sa manière le moment historique de janvier 2003 lorsqu’à l’approche d’un scrutin dans son Land de Basse-Saxe, le chancelier Gerhard Schröder avait déclaré qu’il n’y aurait pas de soutien allemand à une guerre en Irak. Pour le quotidien, les propos de la chancelière étaient « certainement calculés » et « prémédités » et la présidente de la CDU cherche à adopter l’attitude du « rocher dans la tempête » en se positionnant comme la gardienne des valeurs européennes. De l’avis de la tageszeitung également, la chancelière, connue pour sa capacité à s’approprier les sujets du SPD, vient de faire main basse sur un sujet de taille : l’Europe, dont Martin Schulz est supposé être le vrai spécialiste. « En jouant la carte de l’Europe, elle copie aussi ce qui a si bien marché chez le voisin français ». Non, ses propos ne lui ont pas échappé, ils étaient calculés, insiste le journal. Parlant peu, « Merkel connaît la portée de ses propos et c’est la raison pour laquelle elle les choisit soigneusement », considère également la Süddeutsche Zeitung pour qui la chancelière a certainement retenu la leçon de la campagne de 2002 et s’est rappelée que jouer la carte anti-américaine, comme le fit à l’époque son prédécesseur Gerhard Schröder, permet de « marquer des points ». Il n’empêche qu’en mettant en doute la fiabilité des Etats-Unis, la chancelière fait preuve d’un scepticisme inégalé envers un allié, juge le quotidien. « Elle émet un jugement à la fois douloureux et lourd de conséquences pour les Allemands et les Européens ».

« La chancelière remet en question les relations transatlantiques et reçoit pour cela un large soutien, y compris de la part des milieux économiques allemands », relève de son côté le Handelsblatt qui, citant le Washington Post, se demande si Mme Merkel vient d’ouvrir un nouveau chapitre dans les relations entre l’Europe et les Etats-Unis. « Les mots de la chancelière évoquent l’idée de césure, d’érosion des convictions profondes et aussi l’idée de solitude », observe la FAZ qui, dans un propos plus large, fait valoir qu’une véritable émancipation européenne suppose que l’UE aborde différemment sa politique de sécurité, en approfondissant sa coopération en matière de politique étrangère et de sécurité commune et en faisant définitivement son deuil de la « culture de la retenue » sur le plan militaire. « Ce serait un pas d’une énorme portée », écrit non sans appréhension le journal. Estimant que « la prudence est de mise » dès lors que l’on aborde des sujets « existentiels » tels que l’OTAN et le lien transatlantique, Die Welt écrit sous forme de mise en garde que « quiconque se risque en dehors du cadre de l’OTAN doit savoir qu’il met en action des forces tectoniques et des facteurs historiques qu’il ne saurait maîtriser ». Quid d’une relation stable avec la Russie et quid d’une union européenne de sécurité et de défense digne de ce nom ?, questionne notamment le journal.

  1. France / Russie

« Macron : l’échange avec Poutine fut extrêmement franc et direct » (FAZ)

La presse est favorablement impressionnée par la manière dont le président de la République a reçu Vladimir Poutine, alliant un cadre prestigieux et un accueil empreint de déférence à un discours ferme et sans concession sur le fond. « Macron a déroulé le tapis rouge » (Handelsblatt) à son homologue russe tout en « parlant clair à Versailles » (Berliner Zeitung), titrent les journaux, dont les photos, flatteuses pour le chef de l’Etat, montrent un V. Poutine moins à l’aise que de coutume face à son interlocuteur ouvert et déterminé. Cette séquence, jugée réussie par les médias, est à ce stade, « davantage un acte symbolique qui profite aux deux présidents » en marquant leur volonté commune d’un dégel des relations bilatérales, observe la Süddeutsche Zeitung. La correspondante de la Frankfurter Allgemeine Zeitung à Paris, Michaela Wiegel, loue le rôle joué par le conseiller diplomatique du président de la République dans cette initiative. La poignée de main entre les deux chefs d’Etat, photo de manchette à la une de la FAZ, est commentée sur un ton amusé et bienveillant, plusieurs journaux faisant leurs l’interprétation donnée par le président français d’un « moment de vérité » entre dirigeants, et Bild notant « l’hésitation » de son homologue russe au moment crucial.

La FAZ se félicite de ce qu’E. Macron ait eu à cœur d’apaiser les tensions franco-russes tout en s’imposant d’emblée à son interlocuteur comme un dirigeant « déterminé à ne pas se laisser impressionner ». Cette volonté s’illustre, pour les quotidiens, dans l’affirmation publique par le président de la République de la « ligne rouge » française sur l’emploi d’armes chimiques en Syrie et la menace de représailles en cas de récidive : « Macron menace Poutine à Versailles ! », titre le tabloïd Bild tout en notant que « Macron a toutefois trouvé des mots conciliants pour proposer à Moscou un renforcement de la coopération dans la lutte contre le terrorisme ».

Pour la presse, l’accueil de Vladimir Poutine à Versailles a constitué le point d’orgue d’une longue séquence diplomatique réussie pour le nouveau président de la République. « La France est de retour sur la scène internationale, le président Macron l’a montré clairement hier », se félicite ainsi le quotidien de Karlsruhe Badische Neueste Nachrichten : « il a parlé plus franchement avec son hôte de Moscou que presque tous les autres avant lui : droits de l’homme, attaques chimiques en Syrie, ingérence dans la campagne électorale, il n’a rien laissé de côté. Si Poutine avait espéré plus d’égards diplomatiques, il aura été déçu. Macron a très clairement marqué qu’il voulait certes coopérer avec la Russie, mais pas au prix d’un copinage sur le dos de l’Europe ». D’autant, souligne la Süddeutsche Zeitung, qu’à Paris, on parle volontiers du nouvel élan pris par le couple franco-allemand au sein de l’Europe. Citant des sources diplomatiques françaises, le journal de Munich va jusqu’à évoquer une répartition des rôles entre Berlin et Paris, avec une chancelière aguerrie jouant le rôle du « mauvais gendarme » sévère envers Donald Trump ou Vladimir Poutine tandis que le président français, affable envers eux, amadouerait en « bon gendarme » les dirigeants russe et américain./.