Manger ou se soigner, le choix des jeunes

Des étudiants contraints de sauter des repas, des jeunes en zone rurale qui annulent des entretiens d’embauche faute de transport et d’autres qui renoncent aux soins faute d’argent… Le «Pacte santé 2017» de la Croix-Rouge, publié mercredi, pointe une paupérisation accrue des jeunes adultes français, qui prend différentes formes selon qu’ils résident en ville ou à la campagne.

«Priorisation»

Pire, dans l’ordre de leurs priorités, les soins sont souvent les premiers à passer à la trappe. Pour le président de la Croix-Rouge, Jean-Jacques Eledjam, faire une croix sur ces dépenses relève d’une «priorisation malheureuse» de la part de personnes «paupérisées», qui doivent arbitrer entre se nourrir ou se soigner.

Les chiffres compilés par la Croix-Rouge dans ce rapport parlent d’eux-mêmes : en France, un jeune sur cinq est dans une situation d’intégration sociale précaire et, à Paris, 13 000 étudiants se privent de quatre à six repas par semaine, 55 % des jeunes ont renoncé aux soins dont 48 % pour des raisons financières. Dans ses 700 épiceries solidaires, où les produits s’achètent à tarif réduit, la Croix-Rouge constate également que la part des moins de 25 ans est passée de 11,9 % en 2015 à plus de 13 % en 2016. Pour son président, ce 1 % d’augmentation est un signal d’alarme, qui doit interpeller la nouvelle ministre des Solidarités et de la Santé, Agnès Buzyn, «sur la nécessité d’augmenter les financements pour la promotion de la santé».

Réformes

Pour ce faire, la Croix-Rouge dégaine des propositions qu’elle veut «diverses et complémentaires», et chuchote à Agnès Buzyn des chantiers à ouvrir d’urgence. La majorité des propositions concerne l’amélioration des dispositifs de sensibilisation à la santé. L’ONG suggère de créer des «maisons pour adolescents» et des espaces de santé dédiés aux jeunes sur l’ensemble du territoire, ou encore d’intégrer de nouvelles missions spécialisées dans le programme du service civique. Le deuxième volet porte sur les réformes. Pointant une augmentation du taux de chômage chez les moins de 25 ans, qui selon l’Observatoire des inégalités est passé de 20 % à 23,9 %, la Croix-Rouge alerte la ministre sur le «décrochage» des jeunes actifs, notamment les plus vulnérables pour lesquels le dispositif de «Garantie jeune» n’est pas suffisant, car son montant ne couvre pas l’ensemble des frais d’une personne seule. D’où sa demande d’élargir les minima sociaux à partir de 16 ans.

Enfin, elle prône la mise en place de «sanctions effectives» pour les médecins qui refusent de prodiguer des soins aux jeunes en situation de vulnérabilité.

Libération 31/05/2017