Synthèse de la presse américaine du 2 Juin 2017

Ambassade de France à Washington

Vendredi 2 juin 2017

Réalisation : Tristan-Aurel Mouline

Validation : Emmanuelle Lachaussée

  1. Accord de Paris

La sortie des Etats-Unis de l’Accord de Paris, annoncée par Donald Trump le 1er juin, provoque un raz-de-marée médiatique (WP, NYT, WSJ) qui illustre une rupture entre conservateurs et libéraux, remarque le chroniqueur du New York Times Paul Krugman.

Les titres de presse de tendance progressiste dénoncent unanimement cette décision. Il s’agit d’un choix « égoïste », d’un « poison pour le monde » (David Brooks, NYT) « irresponsable et stupide » (Bill McKibben, NYT), d’une faute majeure (Bloomberg, éditorial), d’un « acte de destruction gratuit (Paul Krugman, NYT) et « d’un doigt d’honneur diplomatique au reste du monde (Grunwald, Politico). Donald Trump « trahit la planète », ajoute l’équipe éditoriale du Washington Post car il la « met en danger », affirme USA Today, dans un éditorial également. La presse fustige en outre la présentation approximative, « contestable » et reposant sur des arguments « fallacieux » (WP) qu’a faite Donald Trump de l’Accord de Paris, énonçant des contre-vérités dans le seul but de « discréditer » ce pacte sur le climat (NYT). Les médias relaient abondamment les réactions de dirigeants étrangers – dont celle du président Macron, son appel à « make the planet great again » et son offre d’accueil remarquée aux défenseurs de l’environnement (NYT, The Daily Beast, TIME, Vox, Politico) –, des entreprises et de certains Etats fédérés et villes des Etats-Unis qui s’élèvent contre une telle décision.

La presse s’alarme des répercussions de cette décision sur l’environnement. « Donald Trump a condamné les Etats-Unis, le reste du monde et les générations futures à vivre dans un danger climatique », estime le chercheur de l’Université de Princeton Michael Oppenheimer, cité en « une » par le Washington Post. Le New York Times, qui consacre l’intégralité de sa page éditoriale à « la sortie indigne des Etats-Unis de l’Accord de paris », ajoute que Donald Trump envoie « un message clair : il se soucie bien peu de la science et des générations futures ». Dans ce contexte, les objectifs de réduction de gaz à effet de serre fixés par l’Accord sont désormais difficiles à atteindre, considère le Washington Post.

Pour autant, la presse lance des appels à « la résistance » – c’est le cas de Bill McKibben dans une tribune du New York Times et de Todd Stern dans le Washington Post –, estimant que le combat contre le changement climatique peut encore et doit être mené. En témoigne, selon le quotidien, la demande immédiate, aux Etats-Unis, d’un groupe de trente maires, trois gouverneurs, plus de quatre-vingt présidents d’université et plus d’une centaine d’entreprises de négocier directement avec les Nations unies un pacte qui permettrait de contrecarrer les orientations choisies par le président américain. Au-delà  des conséquences sur l’environnement, des dirigeants d’entreprises – dont Elen Musk (Tesla) et Bob Iger (Disney) qui quittent le conseil consultatif du président américain – prennent position pour dénoncer l’impact préjudiciable à l’économie américaine et à l’emploi de la sortie de l’Accord.

Décryptant le sens de cette décision à la lumière des enjeux de politique étrangère, la presse de tendance progressiste s’inquiète de « la victoire » que la sortie des Etats-Unis de l’Accord confère aux « isolationnistes » (NYT), laquelle « porte préjudice à réputation des Etats-Unis » selon l’équipe éditoriale du Los Angeles Times : « Donald Trump est en train de transformer les Etats-Unis en force du mal », écrit le quotidien. C’est même « un désastre », titre Foreign Policy selon lequel ce choix « porte atteinte à la place de Washington sur la scène internationale » et équivaut à « une abdication du leadership américain » que Donald Trump affaiblit (USA Today), mettant « hors-jeu » les Etats-Unis, commente le chroniqueur du Washington Post Eugene Robinson. En particulier, le New York Times estime que Donald Trump a fait « le plus grand cadeau stratégique qui soit à la Chine ». Le Washington Post nuance cette analyse, estimant que la Chine et l’Inde ont « la volonté de jouer un rôle de premier plan sur la scène climatique mais n’en ont pas les moyens financiers ».

En revanche, les titres et observateurs conservateurs défendent ardemment la décision de Donald Trump. C’est le cas du Wall Street Journal, qui se félicite, en « une », que le président américain ait demandé une renégociation de l’Accord afin qu’il soit plus équitable pour les entreprises américaines, minimisant en outre les bienfaits environnementaux de l’Accord. L’équipe éditoriale du quotidien livre une analyse plus sévère encore à l’égard des partisans de l’Accord de Paris. « La sortie des Etats-Unis permettra d’exposer le caractère frauduleux d’un village Potemkine », écrit le quotidien selon lequel « le plus sûr moyen de rejeter l’avenir est de déstabiliser l’économie avec des régulations alors même que le progrès technologique et l’ingéniosité humaine sont sous-tendus par la croissance économique ». Dans le Daily Beast, Matt Lewis partage cette critique, dénonçant l’absence de normes uniformisées d’un « un mauvais accord » coûteux pour les Etats-Unis. Dans une tribune publiée USA Today, le sénateur républicain Roger Wicker précise que, selon une étude du NERA Economic Council, l’accord aurait pu coûter trois mille milliards de dollars aux Etats-Unis. En outre, « l’Accord de Paris était de nature à freiner le leadership énergétique des Etats-Unis », ajoute le commentateur James Inhofe, dans le même quotidien. « Les Etats-Unis n’aurait même jamais dû faire partie de ce pacte », estime la National Review qui salue la décision de Donald Trump de privilégier les intérêts des Américains plutôt que « la dévotion à Davos ».

Cette décision représente une victoire pour les plus conservateurs des conseillers de Donald Trump – son gendre, Jared Kushner, et sa fille, Ivanka Trump, n’ont d’ailleurs pas assisté à l’annonce de la décision, relève Politico. « Seuls les climato-sceptiques les plus virulents sont satisfaits », affirme l’équipe éditoriale du New York Times. « Pourquoi Donald Trump a-t-il donc décidé de sortir de l’Accord », s’interroge Max Boot dans une tribune du Los Angeles Times. « Pour apaiser sa base électorale », explique-t-il. « J’ai été élu pour représenter les citoyens de Pittsburgh et non ceux de Paris », a-t-il affirmé – une déclaration particulièrement reprise dans les médias (WP, NYT, Vox).

  1. Autres articles à signaler

Etats-Unis – Israël

La presse (WP, NYT, WSJ) revient sur la décision de Donald Trump ne pas déplacer l’ambassade des Etats-Unis en Israël de Tel Aviv à Jérusalem. Selon le président du Middle East Forum, Daniel Pipes, qui s’exprime dans une tribune publiée par le Wall Street Journal, cette décision résulte de tensions persistantes entre les Etats-Unis et Israël. En ne respectant pas sa promesse de campagne, Donald Trump « porte atteinte à la crédibilité de Washington », estime l’équipe éditoriale du quotidien.

Etats-Unis – Russie

En « une », le New York Times évoque la déclaration de Vladimir Poutine selon lequel des médias privés russes « patriotes » pourraient être à l’origine des cyberattaques commises lors de la campagne présidentielle américaine.

Selon le chroniqueur du Washington Post David Ignatius, la Russie se réjouit du « chaos » que provoque Donald Trump. « Ce qui surprend le Kremlin, c’est la rapidité avec laquelle le président américain détricote le leadership américain », indique-t-il.