Aujourd’hui en Allemagne. 6 Juin 2017

Synthèse de la presse quotidienne

Ce document est à usage strictement interne et a été réalisé par l’Ambassade de France à Berlin

6 juin 2017

  1. La réaction aux attaques terroristes de Londres fait les gros titres de la Frankfurter Allgemeine Zeitung(« May déclare la guerre aux islamistes ») et du Tagesspiegel qui appelle à plus de prévention, plus d’intégration et plus de pression sur les parrains du terrorisme (« la mission »). La visite sans succès de Gabriel à Ankara pour obtenir la reprise des visites des parlementaires allemands au déploiement de la Bundeswehr à Incirlik est à la Une de la Süddeutsche Zeitung qui note qu’en conséquence, « Gabriel veut retirer les soldats allemands », tout comme Die Welt : « les soldats allemands doivent se retirer de la base turque d’Incirlik ». Le quotidien des affaires Handelsblatt publie une interview de Hans-Walter Peter, président de la fédération des banques privées allemandes, qui craint une concurrence régulatrice des Etats-Unis et du Royaume-Uni et prône des fusions paneuropéennes dans le secteur.
  2. Allemagne

« Les soldats allemands vont devoir se retirer de la base turque d’Incirlik » (Die Welt)

L’ensemble de la presse rapporte que le ministre allemand des affaires étrangères Sigmar Gabriel (SPD) n’est pas parvenu, lors de son déplacement hier à Ankara, à obtenir de la part de son homologue turc l’assurance que les parlementaires allemands pourront avoir accès à la base turque, en conséquence de quoi l’Allemagne va se trouver contrainte d’en retirer son contingent. Le retrait n’a pas encore été formellement décidé, précise la FAZ qui s’appuie sur les propos de S. Gabriel en ce sens. Le ministre doit informer le gouvernement fédéral des conclusions de son déplacement en conseil des ministres cette semaine et le Bundestag pourrait être amené à se prononcer sur le retrait des 260 soldats du contingent allemand lors de la prochaine session parlementaire qui s’ouvre le 19 juin.

Les quotidiens accueillent cette annonce avec fatalisme. « Compte tenu de la situation, il n’y avait pas d’autre choix possible et pour deux raisons cette décision est la bonne », estime la Berliner Zeitung : tout d’abord parce qu’il était temps, après des mois d’insultes proférées par le gouvernement turc, de passer des paroles aux actes, et deuxièmement, parce que sur le fond, le retrait allemand de Turquie ne modifie en rien la participation de Berlin à la lutte contre Daech. « Il n’aurait pas été défendable de poursuivre la mission sans droit de visite pour les parlementaires allemands, de sorte que l’issue de la dispute n’a rien de surprenant. Surprenant est juste le temps qu’il a fallu pour en arriver là », abonde la Süddeutsche Zeitung qui parle d’une « décision facile mais bien tardive ». Faisant valoir que les Tornado allemands dédiés à des vols de reconnaissance sont stationnés à Incirlik depuis les attentats du 13 novembre 2015, en réponse à la clause de solidarité de l’Union européenne invoquée par la France, Die Welt estime qu’au lieu de « battre en retraite face à Erdogan », il serait plus opportun d’attendre l’issue des élections législatives en France pour convenir ensuite avec Emmanuel Macron d’une démarche concertée vis-à-vis de la Turquie, d’autant qu’un déplacement du contingent allemand vers la Jordanie, pays non membre de l’OTAN, n’est pas sans risque car il expose potentiellement ce pays à des représailles de la part de Daech, s’inquiète le journal.

Selon une enquête Emnid que publiait hier l’hebdomadaire Bild am Sonntag, 64% des Allemands se montrent favorables au retrait d’Incirlik, 25% le désapprouvant.

  1. Europe

Royaume-Uni : « le terrorisme pèse sur la campagne électorale » (Handelsblatt)

Au-delà des considérations générales sur la prévention des attaques terroristes et le communautarisme comme source de radicalisation des auteurs d’attentats, ce sont les répercussions du terrorisme sur la campagne électorale britannique qui sont analysées par les quotidiens. « A la veille du scrutin législatif, Theresa May a beau déclarer qu’elle est seule à pouvoir assurer la sécurité du pays, son bilan à la tête du ministère de l’Intérieur lui revient comme un boomerang », constate Die Welt ; « la troisième attaque en dix semaines met Theresa May sous pression », juge également le Handelsblatt. Les journaux sont partagés sur le discours volontariste de la Première ministre en réaction à l’attaque de Londres : « on ne peut spontanément qu’approuver Theresa May de dire que cela ne peut plus durer et qu’il faut lutter plus durement contre la radicalisation (…) mais elle a été six ans responsable de la lutte antiterroriste : a-t-il fallu les derniers assassinats pour que May arrive à la conclusion que ‘ça suffit !’ ? », remarque la Frankfurter Allgemeine Zeitung. La Berliner Zeitung achoppe également sur cette phrase, « aussi vide de sens que l’incantation de May ‘Brexit signifie Brexit’ » : « veut-elle signifier que les massacres islamistes perpétrés jusque-là étaient ‘encore supportables’ ? », critique le journal. Déjà fragilisée par le déroulement de la campagne électorale, Theresa May l’est encore davantage à présent que son bilan comme ministre de l’Intérieur est sous le feu des critiques de son adversaire du Labour, conclut le Handelsblatt à l’instar de plusieurs autres quotidiens.

  1. International

« Trump abdique » (Frankfurter Allgemeine Zeitung)

L’annonce par Donald Trump du retrait des Etats-Unis de l’accord de Paris était samedi le thème principal dans la presse écrite qui, à longueur de pages, rapportait les réactions des dirigeants internationaux et analysait les répercussions de cette décision. La déclaration du président de la République est largement évoquée, la presse s’accordant à saluer un message pertinent sur le fond et réussi sur la forme (le fait qu’il ait été partiellement en anglais, « la langue de la mondialisation à l’âge du numérique, est une initiative réussie », relève notamment Die Welt.)

La consternation est générale chez les éditorialistes, toutes tendances confondues, devant ce qu’ils considèrent comme une démission des Etats-Unis en tant que leader du monde occidental. Comme le souligne le tabloïd Bild, l’inquiétude ne porte pas tant sur les conséquences pour la lutte contre le réchauffement climatique : « même s’il le voulait, Trump ne pourrait mettre totalement mettre fin à la lutte contre les dérèglements climatiques aux Etats-Unis, son pouvoir ne s’étend pas si loin. Ce qui doit nous faire peur, notamment à nous Allemands et Européens, c’est la fin d’un ordre mondial relativement stable et libre où les Etats-Unis jouaient un rôle de modèle et de leader au lieu de pratiquer le nombrilisme et l’oubli des responsabilités ».

Les commentaires soulignent qu’avec cette décision, Washington achève de s’isoler du reste du monde, certains notant toutefois, à l’instar du Tagesspiegel, que cet isolement ne sonne pas pour autant le glas des relations germano-américaines, lesquelles restent inchangées « quelques étages sous Trump et Merkel, au niveau des administrations, dans les think-tanks ou encore au sein de l’Otan ». La presse observe enfin que la décision américaine va contribuer à resserrer une nouvelle fois les rangs des Européens : « l’Allemagne, la France et l’Italie sont opposées à toute renégociation de l’accord de Paris, les Européens veulent mettre en œuvre les engagements de Paris », titrait samedi la FAZ. « Angela Merkel va s’efforcer au G20 de préserver la cohésion des partisans de l’accord sur le climat », souligne le Tagesspiegel, tandis que Bild am Sonntag considère que « Trump fait briller Merkel », laquelle a trouvé en la personne du président des Etats-Unis « l’incarnation de la crise permanente contre laquelle sa longue expérience peut s’imposer », écrit le tabloïd.

« Plusieurs Etats arabes rompent leurs relations avec le Qatar » (Frankfurter Allgemeine Zeitung)

La décision prise par l’Arabie saoudite et plusieurs pays arabes de rompre leurs relations diplomatiques avec le Qatar au motif des liens de cet émirat avec des groupes terroristes, suscite l’inquiétude des commentateurs qui relèvent tous que cette décision intervient peu de temps après la visite du président américain dans la région. « Trump a tellement euphorisé les partisans sunnites de la ligne dure qu’ils en sont arrivés à faire le ménage dans leurs propres rangs par la mise au ban du Qatar», écrit le Handelsblatt pour qui « cela signifie encore plus de bruits de bottes au Moyen Orient, la responsabilité en incombant au feu follet dénommé Trump ». « Avec le soutien de Trump, l’Arabie saoudite marque clairement qui donne le ton dans les relations entre les pays du Golfe », constate de son côté la FAZ./.