Les acteurs de l’énergie se penchent sur la blockchain

Beaucoup de grands groupes testent la technologie via des projets pilotes.

Après avoir séduit les secteurs de la finance ou de la logistique, la blockchain commence à intéresser les énergéticiens. Cette technologie, qui permet de stocker et de transmettre des informations sans passer par une base de données centralisée, a trouvé ses premières applications dans la gestion de monnaie virtuelle, comme le bitcoin, mais elle pourrait aussi être utilisée dans l’énergie. « Cette manière de gérer des informations semble particulièrement bien adaptée à une tendance de fond qui bouleverse ce secteur : la décentralisation », expliquent Romain Bonenfant et Sébastien Zimmer, du cabinet Emerton, qui viennent de publier une étude sur le sujet. « Les grands groupes sont encore un peu sceptiques, mais ils montrent une vraie curiosité à l’égard de cette technologie : il y a beaucoup de réflexions en cours, et des partenariats avec des start-up », poursuivent les experts. De fait, des projets pilotes d’utilisation de la blockchain apparaissent un peu partout.

Le plus médiatisé est celui de Brooklyn, où les start-up LO3 Energy et Consensus Systems ont développé dès 2015 une plate-forme permettant à des habitants du quartier d’acheter de l’électricité solaire à leurs voisins. L’expérience a fait des petits. En Australie, une autre start-up, Power Ledger, a testé une plate-forme similaire entre 15 maisons et s’apprête à lancer une expérience sur 500 foyers à Auckland, en Nouvelle-Zélande. En France, Bouygues Immobilier a développé un projet avec Microsoft, Energisme et Stratum, dans le quartier Confluence à Lyon.

Des processus simplifiés

La blockchain peut également être utilisée dans le cadre du rechargement de véhicules électriques. «  Elle permet d’effectuer une recharge sur n’importe quelle borne, publique ou privée, et d’être facturé grâce à une sorte de « contrat mobile » attaché à l’utilisateur », explique Romain Bonenfant. RWE a testé le concept l’an dernier et doit lancer une première borne privée cette année, avec pour objectif de créer un réseau privé pour compléter les 5.000 bornes publiques gérées par sa filiale Innogy.

Enfin, cette technologie pourrait servir à gérer des certificats (crédits carbone, garanties d’origine) ou à échanger des informations. Là encore, des pilotes sont à l’oeuvre, à Rueil-Malmaison, par exemple, où la start-up Evolution Energie gère des certificats garantissant l’origine verte de l’électricité. En mai, de grands groupes européens (Engie, Total, RWE ou Vattenfall) se sont associés à la société Ponton pour tester une nouvelle plate-forme de trading basée sur la blockchain.

« Cette technologie permet de se passer d’acteurs centralisés pour coordonner les échanges, ce qui simplifie les processus », soulignent Sébastien Zimmer et Romain Bonenfant. « Mais elle suppose une certaine confiance dans le système, pose des questions en termes de gouvernance et de souveraineté. » C’est l’objectif des expériences en cours.
Les Echos 14/06/2017