Emploi, les discriminations bien réelles subies par les immigrés

 

Un rapport de l’Institut national d’études démographiques (Ined) publié le 12 juillet, confirme que les immigrés et enfants d’immigrés subissent des discriminations à l’embauche.

Intitulée « Le chômage des immigrés : quelle est la part des discriminations ? », l’étude de l’Institut national d’études démographiques (Ined) avait pour but de vérifier s’il existe bien un lien entre le chômage des immigrés et fils ou filles d’immigrés et leur ressenti personnel de discrimination à l’embauche. Selon la chercheuse Dominique Meurs, qui a conduit ce travail, le sentiment de discrimination est bien confirmé par les données objectives.

À lire : Les discriminations à l’embauche persistent

Chômage plus élevé de 4 à 5 points

« Depuis de nombreuses années, toutes les études montrent que le chômage des descendants d’immigrés est supérieur à celui de la population majoritaire et qu’on ne peut pas l’expliquer complètement par des effets d’âge ou d’éducation. Cette nouvelle étude le confirme », explique Dominique Meurs.

Même en prenant en compte de nombreuses variables affectant l’accès à l’emploi comme le niveau en français, la situation géographique ou la possession du permis de conduire, le taux de chômage des immigrés et des enfants d’immigrés reste de 4 à 5 points de pourcentage supérieur à celui des personnes nées en France métropolitaine de parents français. Un écart jusque-là imputé aux discriminations par simple supposition.

Lire aussi : Les chômeurs ne sont pas ceux que vous croyez

Un fort sentiment d’injustice

« D’ordinaire, nous évaluons les discriminations soit en supposant que le surchômage des immigrés est dû à cela, soit en faisant des testings – c’est-à-dire en envoyant de faux CV aux entreprises et en constatant que les noms à consonance maghrébine étaient davantage écartés – soit en recueillant les ressentis des concernés », énumère Dominique Meurs.

Ces études semblaient déjà indiquer l’existence de discriminations. L’enquête Trajectoires et Origines de l’Ined et l’Insee recensait en 2008 les déclarations de discriminations à l’embauche liées à l’état de santé, au handicap, à la couleur de peau, l’origine ou la nationalité, la façon de s’habiller ou encore le sexe. Les enquêtés renseignaient notamment si « au cours des cinq dernières années, il est arrivé qu’on vous refuse injustement un emploi ». Résultat : les immigrés et fils et filles d’immigrés non européens déclaraient plus que les autres avoir vécu des situations de refus injustifiés d’emploi ; une proportion supérieure de 8 à 13 points de pourcentage par rapport aux hommes nés en France métropolitaine de parents français.

relire : Une photographie inédite des immigrés et de leurs descendants

Un lien avéré entre l’origine et le chômage

L’intérêt de cette nouvelle étude est d’établir « un lien entre les déclarations des gens qui s’estiment victimes de discriminations et leur situation objective ». « Ce que l’on trouve c’est que les populations qui se plaignent le plus sont effectivement celles qui sont objectivement sans emploi pour des causes inexpliquées », explique la chercheuse.

Elle estime qu’il est désormais possible d’établir que « quand les gens déclarent qu’ils ont eu un refus injuste d’emploi à raison de leur origine ou leur religion, ils ont sans doute une bonne observation de ce qu’il se passe. Ce n’est pas de l’ordre du subjectif ou du fantasme. »

La Croix 12/07/2017