Vers une géopolitique de l’entreprise

Paris, 2015  : lors de la COP21, la décarbonisation est décidée par le concert des nations. Derrière ce réel et improbable succès diplomatique, combien de temps prendra l’adaptation des économies à un nouvel ordre énergétique qui était devenu inévitable ?  » On a fait de 2030 le rendez-vous de tous les dangers de la planète. D’ici là, les entrepreneurs portent une responsabilité qui va au-delà de leurs intérêts de base « , affirme Patrick d’Humières, spécialiste du management de la responsabilité sociale des entreprises (RSE) et du développement durable.

Le terrain de jeu de l’entrepreneur est remonté du niveau du marché à celui de la planète, et sa responsabilité économique au niveau politique. Faut-il participer à la construction des murs entre les pays, se retirer de toute zone de conflit, bannir les molécules dont on doute de l’impact sur la santé, garder la maîtrise des stockages de données ? Autant d’interrogations auxquelles les entrepreneurs sont mal préparés. Elles ne sont  » pas forcément nouvelles mais elles sont pressantes, et sont autant de dilemmes qui appellent au moins une réflexion sérieuse dans nos tours de verre, au mieux des décisions débattues avec les fameuses parties prenantes « , explique Patrick d’Humières. Dans son ouvrage La Nature politique de l’entrepreneur : il n’y a pas d’entreprise qui gagne dans un monde qui perd, il appelle les dirigeants économiques à endosser leur rôle politique, voire géopolitique.

Aujourd’hui,  » on est entré dans le temps de la solidarité planétaire indissociable de l’entreprise et de la société « , écrit le consultant. Un constat qui consacre, d’après lui, l’avènement d’une géopolitique de l’entreprise.  » Rares sont les dirigeants qui en ont conscience, qui le reconnaissent et en tirent les conséquences, biberonnés qu’ils sont aux courbes des Bourses. « 

Régulation mondiale

Premières gagnantes d’une mondialisation qui s’est fortement financiarisée ces dernières décennies, considérées parfois plus puissantes que les Etats, les grandes entreprises internationales doivent penser la régulation mondiale et offrir une autre perspective,  » ou bien elles prennent le risque de laisser le national-économisme de – Donald – Trump faire le lit des avatars des nationalismes politiques qui prospèrent à rebours de l’universalisme des réseaux et des valeurs, vanté par les multinationales depuis deux décennies « .

Le Monde 29/08/2017