Aujourd’hui en Allemagne

Usine chimique du groupe Bayer à Leverkusen. La fédération de l'industrie allemande (BDI) est plus optimiste qu'il y a trois mois sur les perspectives de croissance de l'Allemagne cette année en raison de la faiblesse des cours du pétrole, de la vigueur de la consommation et de la baisse de l'euro. /Photo d'archives/REUTERS/Ina Fassbender

Synthèse de la presse quotidienne

3 novembre 2015

 

  1. Le différend au sein de la grande coalition sur le projet de zones de transit terrestres pour les demandeurs d’asile fait les gros titres de la presse : « M. Gabriel attaque Mme Merkel et M. Seehofer » (Süddeutsche Zeitung) ; « M. Seehofer satisfait du ‘positionnement clair’ de la CDU et de la CSU » (Frankfurter Allgemeine Zeitung). Le Tagesspiegel note que « la violence contre les réfugiés horrifie les politiques ». Die Welt consacre sa Une au résultat des élections turques : « Erdogan veut s’assurer encore davantage de pouvoir ».
  2. Allemagne

Crise migratoire : « Seehofer satisfait du positionnement clair de la CDU et de la CSU » (FAZ) – « Gabriel attaque Merkel et Seehofer » (Süddeutsche Zeitung)

Alors que la FAZ fait état de la satisfaction exprimée par le président de la CSU après l’accord intervenu dimanche avec la CDU sur un papier conjoint comprenant des propositions pour freiner l’afflux des migrants, la presse indique que Sigmar Gabriel (SPD) a renouvelé ses attaques contre la mise en place de zones de transit, un sujet selon lui « à valeur symbolique », « insensé dans la pratique, inutile, probablement contraire au droit » et qui ne résoudrait en rien les problèmes. La Süddeutsche Zeitung cite le président du SPD selon lequel son parti ne donnera pas son accord à un tel projet uniquement destiné à ce que Horst Seehofer « puisse ramener un trophée à Munich ».

Déplorant l’absence d’entente entre les trois partenaires de la coalition, la presse conservatrice estime, à l’instar de Bild ou de la FAZ, que c’est à présent au tour de Gabriel de lâcher du lest en se montrant ferme avec l’aile gauche du SPD, tandis que pour la presse de gauche « la responsabilité du fiasco de dimanche incombe avant tout aux conservateurs » (Süddeutsche Zeitung). Pour le journal de Munich, il est regrettable que des tensions de nature politiciennes plus que des divergences sur le fond aient condamné toute chance de parvenir à un accord. « Pour Merkel et Seehofer, ce qui importait avant tout, plus que des résultats, c’était de parvenir à colmater les brèches dans leurs propres rangs, le papier sur lequel ils se sont entendus se lit comme un document destiné à apaiser Seehofer et les nombreux sceptiques dans le camp de la CDU », écrit le quotidien. Sous le titre « l’électeur dont on se moque », le Handelsblatt déplore une grande coalition qui a perdu toute volonté de faire avancer le pays au moment où celui-ci fait face à une situation inédite

Par ailleurs, la presse fait part de l’inquiétude de plusieurs responsables politiques en réaction aux multiples attaques ayant visé des réfugiés au cours du week-end à Magdebourg et à Wismar, où des groupes non identifiés s’en seraient pris directement à des réfugiés syriens.   « Ces derniers temps, la violence a visé non plus seulement les centres d’accueil et d’hébergement, mais les réfugiés eux-mêmes », s’inquiète le Tagesspiegel indiquant que le ministre fédéral de la justice, Heiko Maas (SPD), et le président des services allemands de renseignement ont tous deux qualifié ces violences d’attaques contre la démocratie et appelé à s’élever contre de tels actes.

  1. Europe

Zone euro / création d’un « comité budgétaire européen consultatif indépendant »

Dans sa chronique hebdomadaire consacrée à la politique européenne, le Tagesspiegel se penche sur la création, « passée relativement inaperçue », du nouveau « comité budgétaire européen consultatif indépendant » destiné à contrôler la discipline budgétaire des Etats de la zone euro et à exprimer des recommandations à la Commission européenne. Le Tagesspiegel écrit que suite à la « mansuétude de la Commission vis-à-vis des dérapages budgétaires de la France et de l’Italie », de nombreuses protestations s’étaient élevées en Allemagne pour dénoncer le « laxisme » de Bruxelles en matière d’application du pacte de stabilité. Le journal rappelle dans ce contexte les déclarations du commissaire Günther Oettinger contre la France et la vive réaction du président du PS Jean-Christophe Cambadélis. L’annonce de la création de ce comité d’experts indépendant a donc été saluée par le gouvernement allemand, lequel se félicite de ce que la Commission européenne veuille « rendre plus transparente et améliorer la supervision économique et financière » des Etats de la zone euro, rapporte le Tagesspiegel. Les députés européens sont en revanche plus circonspects, critiquant le fait qu’ils n’ont pas à ce stade leur mot à dire sur la nomination des experts de ce comité ni sur ses missions, note encore le journal.

Union bancaire / garantie des dépôts bancaires

La Süddeutsche Zeitung, la FAZ et le Handelsblatt reviennent sur les déclarations – faites il y a un mois lors de sa visite à Passau – par le président de la Commission européenne, selon lesquelles les caisses d’épargne et banques coopératives allemandes ne seraient pas concernées par le futur système européen de garantie des dépôts bancaires (cf. synthèse du 2/11). Sur le principe, les caisses d’épargne et banques coopératives devraient bien faire partie comme tous les établissements bancaires, du système européen de garantie des dépôts, a précisé une porte-parole de la commission au Handelsblatt. Le quotidien indique, de source proche de la Commission que Jean-Claude Juncker « a juste voulu rassurer ses interlocuteurs sur le fait que cela ne changerait rien en pratique et que le système européen tiendra compte des particularités nationales ». Quelles qu’aient été les motivations du président de la Commission en s’avançant de la sorte sur ce thème, « il a fait chou blanc » (FAZ) auprès du gouvernement allemand, dont l’opposition de principe à toute mutualisation des garanties bancaires a été réaffirmée par un porte-parole du ministère fédéral des finances, constate la presse.

  1. International

Turquie : « après les élections, l’AKP veut faire adopter une nouvelle constitution » (FAZ)

La presse met en avant, de manière factuelle, l’appel du premier ministre Ahmet Davutoğlu à réviser la constitution turque et consacre d’abondants commentaires aux conséquences plus générales, pour la Turquie et pour l’Europe, de la large victoire de l’AKP aux élections législatives. Pour la FAZ, « le triomphe électoral d’Erdoğan lui offre la chance de concrétiser sa vision de la Turquie comme puissance régionale forte » et de poursuivre les négociations d’adhésion avec l’Union européenne, « non pas parce qu’il est intéressé par une adhésion de la Turquie, [mais parce que] la Turquie profite des allégements du régime des visas et des aides financières pour les réfugiés ». Le quotidien de Francfort se montre très critique à l’égard du président turc, estimant que « le héros du printemps arabe de 2011 (…) voit son étoile se ternir » en raison de ses dérives autoritaires, ce qui « ne laisse présager rien de bon pour la paix intérieure de la Turquie ». Le quotidien alternatif de gauche tageszeitung va plus loin en pointant du doigt le « chaos » créé par l’AKP en Turquie et appelle l’Union européenne à adopter une position plus ferme vis-à-vis d’Erdoğan, car « celui qui ferme les yeux sur les atteintes aux droits de l’homme en Turquie ne pourra pas, par ailleurs, protester de manière crédible contre de mêmes atteintes en Hongrie ». De même, le Tagesspiegel juge que, même si l’Europe doit rechercher en priorité l’aide de la Turquie pour résoudre la crise des réfugiés, elle doit toutefois à terme protéger la démocratie turque. Dans une tribune publiée dans le tabloïd Bild, le journaliste turc Ertugrul Özkök estime pour sa part que la victoire d’Erdoğan ne va pas faciliter les discussions avec la chancelière sur la question des réfugiés car « la Turquie va durant les quatre prochaines années être dirigée par un gouvernement orienté vers l’islamisme avec un mandat fort ».

  1. France

« Jungle » de Calais : « la France devant le tribunal » (Süddeutsche Zeitung)

Dans une correspondance de Christian Wernicke, la Süddeutsche Zeitung fait état du recours déposé par Médecins du monde, le Secours catholique et d’autres ONG « en vue de mettre fin aux atteintes graves aux libertés fondamentales » des 6 000 migrants vivant dans le camp situé près de Calais. Evoquant un nombre de migrants qui a doublé depuis cet été, le journal fait état des conditions de vie que les associations d’aide qualifient d’inhumaines et juge que « le gouvernement a longtemps cherché à ignorer la situation » et que ce n’est que récemment qu’il a été contraint de réagir, notamment après la multiplication des violences intervenues sur le site et la mort d’une quinzaine de migrants cherchant à gagner la Grande-Bretagne via le tunnel sous la Manche. Le quotidien de Munich juge que la situation à Calais « met en pleine lumière la politique d’asile de la France » qui est restée jusqu’à présent largement à l’abri de l’actuelle vague migratoire. Le journal indique que sur les 1 000 personnes que la France s’était engagée à accueillir en septembre en solidarité avec l’Allemagne, seules 526 sont venues en France, 51 seraient reparties en Allemagne./.