Ce document est à usage strictement interne et a été réalisé par l’Ambassade de France en Alleman
Synthèse de la presse quotidienne
18 novembre 2015
- Les Unes de la presse allemande se partagent ce matin entre l’annulation du match Allemagne – Pays-Bas hier à Hanovre en raison d’une menace terroriste (« menace terroriste à Hanovre » pour le Tagesspiegel ; « le football dans le collimateur des terroristes » pour la Berliner Zeitung ; « la peur des bombes » pour le tabloïd Bild) et l’invocation par la France de l’article 42.7 : « l’UE promet à la France toute l’aide requise – Paris invoque la clause d’assistance » (Frankfurter Allgemeine Zeitung) ; «Paris veut contraindre l’Europe à l’aider » (Süddeutsche Zeitung) ; « le président de guerre » (Handelsblatt). « la piste des meurtriers de Paris conduit aussi en Allemagne » titre Die Welt qui revient sur les arrestations hier à Alsdorf.
- Allemagne
Attentats terroristes de Paris : « la piste des meurtriers de Paris conduit aussi en Allemagne » (Die Welt)
Sous ce titre à sa une, le quotidien de Berlin fait état de sept arrestations hier dans la ville d’Alsdorf, près d’Aix-La-Chapelle et rapporte les propos du ministre fédéral de l’intérieur selon lequel Salah Abdeslam, principal suspect recherché et qui aurait séjourné en Allemagne en septembre, ne figurait pas parmi les interpellés qui ont ensuite été relâchés. « Alsdorf se situe à tout juste deux heures de voiture de Bruxelles où vivent plusieurs membres de la famille du ressortissant français Salah Abdeslam né en Belgique », explique le journal qui évoque aussi l’existence d’une mouvance salafiste dans la région d’Aix-La-Chapelle où des extrémistes belges se rendent fréquemment à la mosquée.
Annulation du match Allemagne-Pays-Bas : « les services français de renseignement avaient averti la police allemande » (Bild)
Le tabloïd Bild consacre plusieurs pages à l’annulation hier à Hanovre du match de football Allemagne-Pays-Bas en raison d’une menace d’attentat. Il indique que les services français de renseignement auraient fait état d’un « agent dormant » irakien susceptible de planifier un attentat lors de ce match amical. Si la FAZ qualifie dans un commentaire d’« absolument justifiée » la décision prise par les autorités allemandes d’annuler le match, tout en mettant en garde contre le fait que Daech et ses sympathisants puissent désormais dicter l’agenda des manifestations publiques, la Berliner Zeitung parle en revanche d’une « soirée désastreuse pour l’Allemagne ». « Ce match, qui était supposé incarner la résistance face à la stratégie de la peur voulue par les terroristes, est devenu le symbole de l’échec et on ne pouvait accorder aux terroristes meilleur triomphe », écrit le quotidien qui oppose à la frilosité allemande le courage des forces de police britanniques qui ont permis le bon déroulement de la rencontre entre l’équipe de France et celle d’Angleterre.
- Europe / France
« L’UE promet à la France toute l’aide requise – Paris invoque la clause d’assistance » (FAZ)
L’invocation par la France de l’article 42-7 du traité de Lisbonne, alors que les médias allemands spéculaient depuis le week-end sur un recours à l’Alliance atlantique, a surpris la presse, tous les journaux soulignant que cette clause n’avait jamais été utilisée avant : « la France demande l’assistance militaire de l’UE » (Berliner Zeitung), « d’un seul coup, l’UE est une alliance de défense, un moment historique », s’étonne la Süddeutsche Zeitung. Une demande qui, soulignent les journaux, a certes été acceptée à l’unanimité des Vingt-Huit mais qui est loin d’avoir soulevé l’enthousiasme de partenaires pris au dépourvu, notamment l’Allemagne, observe la presse. « L’Allemagne ne s’attendait pas plus à ce recours que les autres », explique la SZ. Pourtant, note le Handelsblatt à l’instar de la Süddeutsche Zeitung, « Paris n’est pas difficile » et requiert à ce stade une aide surtout logistique.
Dans ce contexte, « l’Allemagne a promis son aide à la France » juge Die Welt, qui cite la ministre de la défense, Ursula von der Leyen (CDU), selon laquelle l’Allemagne « fera tout ce qui est en son pouvoir pour apporter son aide et son soutien à la France ». Les journaux estiment néanmoins que le gouvernement allemand peut être « soulagé » (FAZ) que la France ne lui ait pas adressé hier de demande précise. « Aux yeux de Berlin, la situation demeure inchangée en Syrie et aucune mesure supplémentaire ne se justifie », avance en effet le quotidien de Francfort pour qui le gouvernement fédéral ne juge pas nécessaire une participation de l’Allemagne aux frappes actuellement opérées en Syrie contre Daech. La ministre allemande a fait valoir à son interlocuteur français que les troupes allemandes combattent déjà Daech en Irak en y armant et formant les Peshmergas et sont disposées à jouer un rôle plus important au Mali, poursuit la FAZ. Pour le tabloïd Bild, le gouvernement fédéral envisage jusqu’à l’envoi de 500 soldats dans le nord du Mali, davantage de livraisons d’armes aux Kurdes irakiens et son soutien en matière de déminage en Irak. Le Handelsblatt indique, de source « proche du gouvernement fédéral », que le ministre français se serait montré « très heureux » de l’intention de Berlin de décharger les forces françaises au Mali et satisfait de l’engagement allemand dans le nord de l’Irak. Ce n’est pas la perception de la correspondante à Paris de la FAZ, qui se fait l’écho d’une irritation croissante des dirigeants français contre le manque de solidarité allemande et européenne en matière militaire. « A Paris, les réactions de Berlin irritent de plus en plus et l’impression domine que le gouvernement fédéral considère la guerre contre le terrorisme comme une affaire française », écrit Michaela Wiegel.
« En France, on aura noté très attentivement toutes les nuances et non-dits des réactions allemandes aux attentats », note également l’éditorialiste de la FAZ dans une critique en règle des atermoiements des dirigeants politiques allemands. « Les Allemands, qui revendiquent le leadership européen quand il s’agit de finances, bottent en touche dès qu’il s’agit d’engagement militaire. Les ministres avancent les trois arguments de repli habituels de la politique étrangère allemande : ‘on ne nous a rien demandé, pas de spéculations à ce stade, une solution militaire n’est pas possible’. (…) Berlin doit prendre cette demande à cœur : la France est notre principal partenaire et lourdement touché. Ce qui ne veut pas dire qu’il faut dire oui et amen à toutes les demandes de Paris, bien sûr. Mais il ne faut surtout pas que l’Europe, après avoir été divisée sur la crise des réfugiés, le soit aussi en matière de lutte antiterroriste », écrit la FAZ. « La décision de Hollande est à même de diviser et paralyser l’Europe » craint pour sa part la Süddeutsche Zeitung, « certes la France a mérité toute la solidarité et l’assistance possible, mais quand il ne s’agira plus seulement de la décharger en Afrique, mais de participer à la guerre en Syrie, on sera en droit de poser des questions : qui commande, la France seule ou les autres aussi ? Quel est l’objectif, venger Paris ou vaincre Daech, pour autant qu’on puisse parler de victoire contre un monstre terroriste informe ? »
Le mot « guerre » lui-même continue de faire débat dans la presse. Dans un entretien avec le tabloïd Bild, le président du parlement européen, Martin Schulz (SPD), estime que « nous ne sommes pas en guerre, mais en lutte contre le terrorisme » et décrit l’aide invoquée comme concernant « surtout l’échange d’informations, la coopération des services de sécurité et éventuellement des concessions financières de l’UE ». Sur la même page, l’éditorial de Bild contredit cette analyse : « Mais si, c’est la guerre ! C’est une guerre de notre temps, une guerre que nous a imposé l’islamisme depuis le 11 septembre 2001 ». Fustigeant les réserves convenues de ceux qui jugent qu’on ne peut vaincre militairement le terrorisme, le quotidien populaire estime « du devoir de nos dirigeants politique de lutter sur les théâtres éloignés contre le terrorisme avant qu’il ne vienne à nous ».
Avant-papier de la Süddeutsche Zeitung sur le conseil JAI
Le quotidien de Munich note que lors du conseil JAI à la fin de cette semaine, la France va formuler des demandes claires en matière de coopération de sécurité. Celles-ci devraient porter sur le stockage des données personnelles des passagers aériens, un durcissement de la législation concernant la détention et l’usage des armes à feu, ainsi que le gel au niveau européen des comptes bancaires ayant pu servir au financement du terrorisme, précise le journal. Berlin s’attend en particulier à ce que le ministre français de l’intérieur plaide en faveur d’un stockage élargi des données personnelles des passagers aériens au sein de l’espace Schengen, son homologue allemand, Thomas de Maizière (CDU), ayant confirmé que ce dossier figurera à l’ordre du jour de la rencontre de vendredi, fait valoir le journal pour qui ceci ne saurait manquer de relancer le débat en Allemagne sur des sujets qui divisent fortement la grande coalition : la conservation des données personnelles et le renforcement des mesures de contrôle.
« Au revoir, politique de rigueur » (Handelsblatt)
La Frankfurter Allgemeine Zeitung (« La protection des citoyens a priorité sur les objectifs de déficit ») et le Handelsblatt consacrent deux articles factuels à l’aspect budgétaire du discours du président de la République, et se font l’écho de la « compréhension » exprimée par le commissaire aux affaires économiques et monétaires, Pierre Moscovici. Certes, reconnaît la FAZ, on ne peut reprocher au chef de l’Etat de donner la priorité à la lutte contre le terrorisme, mais « le problème est que les assouplissements prévus par le pacte en cas de catastrophe ont déjà été invoqués par plusieurs pays de la zone euro sans véritable urgence, à commencer par le mauvais exemple donné par l’Allemagne et la France à l’époque ». Comme à l’accoutumée, c’est la mansuétude d’une commission européenne « qui a complètement failli » qui est visée par la FAZ.
- International
Russie/Daech : « la vengeance de Poutine » (FAZ)
Plusieurs journaux relèvent que Vladimir Poutine a déclaré que le crash de l’A321 au-dessus du Sinaï qui a fait 224 morts le 31 octobre dernier, était un attentat commis par Daech et qu’il a annoncé l’intensification des frappes militaires contre le groupe djihadiste. La Frankfurter Allgemeine Zeitung s’étonne que les autorités russes « aient mis autant de temps » à reconnaître la responsabilité de Daech dans l’accident et juge que la « nouvelle dynamique » internationale de lutte contre le terrorisme pourrait permettre un rapprochement entre la Russie et l’Occident. A l’instar du tabloïd Bild, la presse souligne également que Vladimir Poutine a appelé ses troupes à considérer les soldats français comme des « alliés » pour combattre Daech./.