Aujourd’hui en Allemagne

 

Synthèse de la presse quotidienne

27 novembre 2015

 

  1. L’offre de participation allemande aux opérations de lutte contre Daech en Syrie et en Irak fait les gros titres de la presse : « des Tornados, un avion ravitailleur et une frégate pour combattre l’Etat islamique » (Frankfurter Allgemeine Zeitung) ; « la Bundeswehr va devoir apporter son aide dans le combat contre l’EI » (Süddeutsche Zeitung) ; « l’Allemagne envoie des avions Tornado en Syrie » (Die Welt et Tagesspiegel) ; « des Tornados contre l’EI » (Handelsblatt). Le tabloïd Bild croit savoir que des armes utilisées lors des attaques du 13 novembre à Paris auraient été achetées à un trafiquant d’armes allemand (« terrorisme à Paris – les armes venaient d’Allemagne »).
  2. Allemagne

« Terrorisme à Paris : les armes qui ont servi à tuer venaient d’Allemagne » (Bild)

Sur la base d’informations du parquet de Stuttgart et de source policière allemande, le tabloïd Bild fait état de quatre kalachnikovs commandées sur internet auprès d’un vendeur allemand pour être revendues à Paris le 7 novembre. « Pour les enquêteurs français, les armes en question ont été utilisées lors des attaques du 13 novembre », indique le tabloïd qui précise que le vendeur allemand a été incarcéré après que la police allemande eut retrouvé chez lui 16 autres armes à feu. Il est actuellement sous le coup d’une double accusation : commerce illégal d’armes et présomption de soutien à une organisation terroriste étrangère.

Par ailleurs, le tabloïd fait état d’une perquisition policière hier dans une mosquée de Berlin en raison d’un risque d’attentat à Dortmund. Les policiers, qui soupçonnaient que la mosquée en question serve de cache d’armes, ont procédé à l’arrestation de deux hommes, un Tunisien et un Syrien supposés proches de Daech.

  1. Allemagne/International

« La Bundeswehr va devoir apporter son aide dans le combat contre l’EI » (Süddeutsche Zeitung)

« Des Tornados, un ravitailleur en vol et une frégate pour combattre l’Etat islamique », indique, comme l’ensemble de la presse, la FAZ en s’appuyant sur les déclarations conjointes de la ministre allemande de la défense, Ursula von der Leyen (CDU), et du ministre des affaires étrangères, Frank-Walter Steinmeier (SPD), hier. Le tabloïd Bild précise que l’Allemagne devrait mettre à disposition 6 avions de reconnaissance de type Tornado, ce qui représente 200 hommes, un Airbus A310 pour le ravitaillement en vol et une frégate qui apportera son soutien au porte-avions Charles de Gaulle en Méditerranée. Cette contribution allemande doit être approuvée dès mardi matin par le gouvernement fédéral et dans le courant de l’après-midi par les groupes parlementaires, ajoute Bild avant de relever que M. Steinmeier a fait valoir que, même sans mandat des Nations unies, la mission repose sur des bases juridiques solides. Pour la presse, l’approbation de cette aide par une large majorité des députés ne fait aucun doute, « la CDU/CSU et le SPD ayant d’ores et déjà signalé qu’ils voteraient pour » (Handelsblatt).

Les journaux réagissent diversement aux annonces du gouvernement fédéral. Pour la presse conservatrice (Bild, Die Welt), l’aide allemande est clairement insuffisante. Le tabloïd Bild se gausse de l’envoi d’avions de combat allemands qui, au lieu de combattre vont servir « à prendre des photos ». « Repérer des positions de Daech et les prendre en photo au moment où nos alliés se chargent du sale boulot, voilà qui envoie un message fatal, celui que l’Allemagne n’ose pas se battre contre le terrorisme », tempête BildDie Welt qualifie de « politique purement symbolique » la décision allemande. « La volonté et les idées font défaut pour un combat véritablement efficace au moyen de troupes au sol coordonnées par des forces spéciales françaises et allemandes », déplore le journal pour lequel l’Allemagne se contente de « s’associer au grand show aéronautique dans le ciel syrien ». Pragmatique, la FAZ juge que la décision prise par le gouvernement fédéral était devenue « inévitable ». Pour le journal, un défaut demeure toutefois : l’absence d’unité de vues entre les partenaires qui participent à la lutte contre Daech sur les objectifs du combat mené. Sous le titre « l’Allemagne a compris », la Süddeutsche Zeitung approuve la contribution allemande qui apporte, selon elle, un démenti à tous ceux pour qui Berlin se tenait jusqu’ici soigneusement à l’écart d’une guerre dangereuse. Fataliste, la Berliner Zeitung voit dans la décision de Berlin le début d’un engrenage et avance que la Syrie risque de devenir pour Angela Merkel ce que fut l’Afghanistan pour son prédécesseur Gerhard Schröder.

Dans un long entretien au quotidien économique Handelsblatt, la ministre allemande de la défense se réjouit de l’aide substantielle que l’Allemagne a décidé d’apporter à la France. En réponse au scepticisme largement partagé par les Allemands vis-à-vis de tout engagement militaire, U. von der Leyen déclare : « si nous voulons combattre le terrorisme et les causes de l’exode, il nous faut être présent sur place, pas seulement militairement, mais militairement aussi ». « Il est possible de vaincre Daech », estime-t-elle. A la question de savoir si elle est disposée à employer, comme le président de la République, le terme de « guerre », U. von der Leyen déclare : « je peux comprendre que sous le choc d’attentats d’un telle horreur, le président Hollande ait choisi ce mot. C’est un fait que le combat contre Daech va nous occuper pendant des années, mais il n’en demeure pas moins important de rester mesuré et de ne pas se laisser entraîner dans une rhétorique guerrière ». Interrogée sur l’engagement accru de l’Allemagne au Mali, elle qualifie le Mali d’« élément central au cœur d’une région encore plus fragile  et qui ne doit pas sombrer dans le chaos ». Elle fait aussi valoir qu’en s’engageant dans des missions exigeantes, l’Allemagne, comme ses partenaires, prend la mesure des responsabilités qui lui incombent en raison de son poids et de sa puissance économique en Europe.

  1. Europe

Interview de Jeroen Dijsselbloem dans le Handelsblatt

Le chef de l’Eurogroupe estime que la crise migratoire et le terrorisme ne devraient pas entraîner de nouveaux excès en matière d’endettement des pays européens : « non seulement les déficits des Etats de la zone euro diminuent, mais aussi, pour la première fois cette année, l’endettement public moyen de la zone euro est en recul ». Tout en convenant du fait que le pacte de stabilité autorise à prendre en compte des circonstances exceptionnelles pour dépasser les objectifs de déficit, Jeroen Dijsselbloem se déclare « strictement opposé » à ce que les dépenses militaires ou les coûts liés à l’accueil des réfugiés « soient durablement exclues du calcul des déficits ». S’agissant de la France, le chef de l’Eurogroupe estime que « les 600 millions d’euros de dépenses supplémentaires de sécurité » prévues suite aux attaques terroristes « ne vont pas entraîner une dérive du budget français ». Il se déclare « très satisfait » de l’assurance que lui a donnée le ministre des finances Michel Sapin la semaine passée de tenir l’engagement de ramener le déficit public sous la barre des 3% en 2017. Jeroen Dijsselbloem est plus pessimiste pour le cas de l’Italie « qui, très endettée, veut exploiter toutes les clauses de flexibilité » du pacte de stabilité, et juge que la commission européenne doit se montrer plus restrictive à son égard sous peine de perdre en crédibilité.

Au sujet de la crise migratoire, le ministre des Finances néerlandais déplore un manque de solidarité européenne et l’absence de volonté politique de trouver des solutions communes : « les charges de la crise des réfugiés sont extrêmement mal réparties ». Craignant pour la pérennité du système social des pays d’accueil, il préconise que le petit groupe des Etats touchés par la crise – Allemagne, Pays-Bas, Suède, Autriche et Belgique – se replient au sein d’un « mini-Schengen », « ce qui serait une solution suboptimale ». Il se déclare « pas très optimiste » sur la survie de l’espace Schengen.

« La Pologne se détourne de l’UE » (Berliner Zeitung)

La presse constate sur un ton alarmiste que le nouveau gouvernement polonais « donne raison aux sceptiques » qui craignaient un virage nationaliste à droite : « le parti de Kaczynski prend possession de l’Etat sans aucun scrupule », écrit la Süddeutsche Zeitung, tandis que le Handelsblatt souligne que le nouveau chef de la diplomatie polonaise s’est lancé dans une diatribe anti-allemande à la veille même de sa visite d’entrée en fonction auprès de son homologue allemande. « Dans la crise des réfugiés, Angela Merkel ne pourra pas compter sur la Pologne, contrairement aux années passées où l’axe germano-polonais était un élément solide de l’Europe », estime le Handelsblatt. Die Welt craint une réactivation des vieux préjugés entre Berlin et Varsovie.

Le « rôle clé » de la Turquie (Süddeutsche Zeitung)

A l’instar d’autres médias ces derniers jours, la Süddeutsche Zeitung revient sur la position de force de la Turquie avant le sommet avec l’Union européenne consacré à la crise migratoire. « La Turquie sait exactement ce qu’elle vaut dans la crise des réfugiés », écrit le quotidien de Munich pour qui Ankara veut mettre à profit l’attention inattendue de l’UE à son égard pour aborder d’autres sujets, notamment l’avancée des négociations du processus d’adhésion à l’UE.

  1. International/France

Rencontre entre le président de la République et Vladimir Poutine à Moscou/« Poutine promet de soutenir la France » (Bild)

La presse rend compte de manière essentiellement factuelle du déplacement du président de la République à Moscou. Les quotidiens relèvent que les présidents français et russe ont affirmé la nécessité de mettre en place une large alliance contre le terrorisme et que Vladimir Poutine a appuyé son soutien à la France dans le combat contre Daech. Vladimir Poutine a indiqué, relèvent les journaux, que Moscou était « prêt à la coopération », une coopération qualifiée d’« absolument nécessaire ». Pour Die Welt, la visite de François Hollande à Moscou avait deux objectifs principaux : « gagner la Russie dans la lutte contre Daech et dans la mise en place d’une solution politique commune en Syrie » et « coordonner les frappes aériennes en Syrie ». La Frankfurter Allgemeine Zeitung juge que le président russe a préparé la visite du président de manière à lancer « une offensive de charme », notamment par le biais des médias russes qui ont mis en avant l’importance des relations franco-russes.

Le tabloïd Bild souligne pour sa part la tenue de la cérémonie d’hommages aux victimes des attaques du 13 novembre ce matin aux Invalides, présidée par le chef de l’Etat, en conclusion de son « marathon diplomatique » de la semaine./.