Aujourd’hui en Allemagne

Ce document est à usage strictement interne et a été réalisé par l’Ambassade de France en Allemagne

Synthèse de la presse quotidienne

8 décembre 2015

 

  1. Les résultats du 1er tour des élections régionales sont aujourd’hui le thème dominant dans la presse qui publie de nombreux comptes rendus et analyses.

« Inquiétude en France après le succès électoral du Front national », titre la Frankfurter Allgemeine Zeitung ; « l’Europe inquiète pour la France », peut-on lire également à la une de la Süddeutsche Zeitung. Le Handelsblatt, qui fait droit aux craintes exprimées par les milieux économiques allemands, notamment dans les régions frontalières, titre « le Front contre les marchés ». Die Welt se fait l’écho en première page des mises en garde du président du parlement européen contre une « désintégration de l’Union européenne ». Dans un entretien au journal, Martin Schulz déplore le manque d’unité en Europe face aux défis majeurs que constituent la crise migratoire et le risque terroriste. Le Tagesspiegel signale à sa une l’ouverture par la Cour constitutionnelle fédérale d’une procédure visant à interdire le parti d’extrême droite allemand NPD.

  1. Allemagne

Politique migratoire : « bientôt un million de réfugiés enregistrés » (Frankfurter Allgemeine Zeitung)

La presse fait état des derniers chiffres publiés, soit  965 000 réfugiés arrivés cette année en Allemagne, dont 206 000 pour le seul mois de novembre. La FAZ précise que les Syriens constituent le plus fort contingent (plus de la moitié du total), suivis par les Afghans et les Irakiens. Selon le ministère fédéral de l’intérieur, presque 58 000 demandes d’asile ont été déposées auprès de l’Office fédéral en charge des migrations pour le seul mois de novembre, ce qui correspond à une augmentation de plus de 160% par rapport à novembre 2014. Plus de 35 000 dossiers ont été traités au cours du mois dernier et plus de 240 000 sur l’ensemble de l’année, soit deux fois plus qu’en 2014.

« Bientôt une interdiction du NPD » (Süddeutsche Zeitung

Les journaux signalent qu’en réponse à la demande en ce sens déposée par le Bundesrat il y a deux ans, la Cour constitutionnelle fédérale a décidé d’entamer en mars 2016 une procédure visant à interdire le parti d’extrême droite néo-nazi NPD. La presse indique que la Cour a justifié sa décision par le fait que suffisamment d’informations ont pu être réunies pour démontrer le caractère anticonstitutionnel du parti. La presse rappelle qu’une tentative d’interdiction avait échoué il y a douze ans.

  1. Europe

« L’UE est en danger », entretien de Martin Schulz avec Die Welt

Dans un entretien à la tonalité alarmiste, le président du parlement européen estime que si nous voulons que l’UE existe encore dans dix ans, « il va falloir se battre pour ». L’UE n’est pas sans alternative », indique-t-il, mais « l’alternative c’est une Europe nationaliste, une Europe des frontières et des murs, ce qui serait désastreux ». Déplorant le fait que de nombreux Etats se replient sur des schémas nationaux, il déplore l’attitude « fatale » de certains qui consiste à dire : « lors de la crise de l’euro, les Allemands n’ont cessé de cherché à nous faire comprendre qu’ils étaient meilleurs que nous, alors maintenant à eux de résoudre la crise des réfugiés ». Critique aussi envers l’Allemagne, il reproche au ministre fédéral de l’intérieur de n’avoir pas suffisamment pris en compte ces dernières années les appels des Länder et des communes à traiter plus rapidement les demandes d’asile. Interrogé sur le débat en Allemagne sur l’opportunité de fixer une limite maximale à l’accueil de réfugiés, il juge cette discussion inutile et insiste sur la nécessité de garantir une meilleure sécurité des frontières extérieures de l’UE, qui est une mission commune. Tous les Etats, y compris l’Allemagne, sont appelés à en faire davantage et les migrants afghans et pakistanais, pour lesquels la perspective de se voir accorder le droit de séjour est quasi nulle, doivent impérativement être reconduits, poursuit-il

  1. International

COP21 : « deux degrés de plus – ou plutôt seulement 1,5 » (Berliner Zeitung

« Les objectifs sont ambitieux, mais la question du financement n’est pas encore éclaircie », fait valoir la Berliner Zeitung qui relaie l’appel lancé par le Ministre aux délégations à accélérer le rythme pour parvenir à un accord d’ici la fin de la semaine. Le secrétaire d’Etat allemand au ministère de l’environnement, Jochen Flasbarth, a pour mission de trouver un accord sur la délicate question du financement des pays qui cherchent à se prémunir contre le risque climatique, un domaine qui compte à Paris parmi les plus difficiles, relève à cet égard le quotidien. La FAZ et la Süddeutsche Zeitung consacrent chacune un portrait à J. Flasbarth pour souligner la bonne réputation dont il jouit en tant que négociateur auprès de ses interlocuteurs. La Süddeutsche Zeitung en veut pour preuve le fait qu’au sein de l’équipe des 14 facilitateurs constituée par le Ministre, il est le seul à n’avoir que le rang de secrétaire d’Etat. Dans un entretien à Die Welt, Jürgen Trittin, ministre fédéral de l’Environnement sous le gouvernement Schröder, déclare ne pas croire à un engagement suffisant pour parvenir à l’objectif de maintenir en-deçà de 2 degrés le réchauffement climatique et estime que nous parviendrons probablement à 2,7 degrés. Il se montre néanmoins optimiste car l’expérience prouve, selon lui, que là où des technologies respectueuses de l’environnement se mettent en place, les choses se développent ensuite plus rapidement que ce que l’on aurait pu penser.

  1. France

Résultats du premier tour des régionales : « l’Allemagne, le grand épouvantail du FN » (Handelsblatt)

Très abondante, la couverture factuelle de la victoire du Front national au premier tour des élections régionales décrypte la manière dont « le virus de l’extrême droite a infecté la France » (Bild) et décrit les « barrières républicaines » (Die Welt) que veulent élever les partis traditionnels contre le FN, la Süddeutsche Zeitung déplorant que ces partis soient plus occupés aux « petits jeux habituels » des tractations partisanes plutôt qu’à une riposte commune contre le vote extrémiste. Les éditorialistes attribuent le succès électoral du FN à deux éléments : « l’échec des partis établis » (FAZ, Michaela Wiegel) sur les chantiers du chômage, de l’intégration, de la désindustrialisation mais aussi de la réforme des régions, d’une part, et la tendance générale des populations européennes au repli nationaliste face à la crise migratoire et à la crise de l’euro, d’autre part. Comme la plupart des commentateurs, la FAZ estime « trop facile de mettre la victoire du FN uniquement sur le compte des attaques terroristes ». Stefan Kornelius, dans la Süddeutsche Zeitung, voit une part de responsabilité allemande au fait que » le système occidental connaisse un dérapage dangereux » : « la domination allemande au centre de l’Europe a conduit à des réactions de rejet des voisins européens : en Grèce, au Danemark et maintenant en France ».

La presse rapporte les quelques réactions de responsables allemands, dont le vice-chancelier et président du SPD Sigmar Gabriel, qui déclare dans Bild que « le vote français doit pour tous les démocrates européens être un signal de réveil les appelant à s’opposer ensemble et avec détermination au nationalisme, à la xénophobie et à la radicalisation ». Selon la FAZ, le ministre-président de Bavière et président de la CSU, Horst Seehofer, a jugé le résultat du scrutin « désolant » et ajouté que la conséquence devait être de « trouver rapidement des solutions aux deux priorités majeures de la population, la protection contre les attentats terroristes et la limitation de l’immigration ». Aucune voix de la CDU n’est citée à ce stade dans la presse, Die Welt précisant que « le gouvernement fédéral a refusé tout commentaire, mais [que] l’économie allemande est consternée ».

C’est sous cet angle franco-allemand que le Handelsblatt traite la victoire du FN, soulignant à la Une que « l’ascension rapide de l’extrême droite en France choque l’industrie allemande » et publiant une interview en ce sens d’Anton Börner, président de la fédération allemande des entreprises exportatrices (BGA). Celui-ci qualifie le FN de « danger pour l’économie de marché européenne » et déclare craindre que la France ne puisse jouer aux côtés de l’Allemagne le rôle de moteur de retour à la croissance en Europe. Pour le Handelsblatt, on ignore presque tout du programme économique du FN, « croisement de slogans marxistes et d’idées propagées jadis par les nazis ». L’Allemagne est devenue « le grand épouvantail du FN », insiste également le correspondant à Paris du Handelsblatt Thomas Hanke qui craint que les régions frontalières subissent les conséquences négatives d’une possible victoire du FN en Alsace-Champagne-Ardenne-Lorraine. Décrivant l’intensité des échanges économiques et sociaux entre l’Alsace d’un côté, la Sarre et le Bade-Wurtemberg de l’autre, le Handelsblatt s’alarme : « impossible d’imaginer ce qui se passera si le FN met sa rhétorique en pratique et boucle la frontière ». Le journal rappelle la « propagande » frontiste contre le « diktat allemand » que subirait la France et son président, une propagande « si fondamentaliste qu’il est à craindre que les paroles soient suivies d’actes »./.