Synthèse de la presse quotidienne
3 février 2016
Ce document est à usage strictement interne et a été réalisé par l’Ambassade de France en Allemagne
- Les propositions pour un nouvel accord avec le Royaume-Uni dans l’Union européenne présentées hier par Donald Tusk font les gros titres de la Frankfurter Allgemeine Zeitung (« M. Cameron estime avoir une bonne base de négociations avec Bruxelles ») et de Die Welt (« Bruxelles fait d’importantes concessions aux Britanniques »). La Süddeutsche Zeitung titre sur le résultat des primaires américaines dans l’Iowa (« première défaite de M. Trump »). Le durcissement du discours de la grande coalition sur la crise migratoire à quelques semaines d’élections régionales en Allemagne est en Une du Handelsblatt (« opération dissuasion ») et de la tageszeitung (« l’extrême-droite est le nouveau centre »).
- Allemagne
« 50 milliards d’euros – d’où allons-nous sortir l’argent pour la crise des réfugiés ? » (Bild)
Sous ce titre, le tabloïd reprend les chiffres avancés par l’institut économique IW selon lequel le coût de la crise des réfugiés devrait s’élever à 50 milliards d’euros d’ici à 2017. « D’où l’argent devra-t-il provenir dès lors que toute augmentation d’impôts demeure taboue ? », interroge Bild qui entrevoit toutefois des marges de manœuvre dans le budget fédéral et des possibilités d’économies sur certains postes. Le journal juge également que l’UE devrait participer à cet effort. Dans un commentaire, Die Welt fait valoir que cette estimation représente un gros défi pour le ministre des finances Wolfgang Schäuble (CDU), dont la popularité est largement liée au fait d’avoir atteint son objectif de budget à l’équilibre. Die Welt souligne également qu’en continuant d’apporter une aide financière conséquente (680 millions d’euros l’an dernier selon Oxfam) aux pays voisins de la Syrie (Turquie, Liban, Jordanie), l’Allemagne pourrait se décharger d’une partie du fardeau, mais les Länder et les communes qui sont en première ligne pour faire face à l’afflux des réfugiés seraient également bien inspirés, selon Die Welt, de revoir certaines de leurs dépenses à la baisse.
Crise migratoire : « l’Allemagne a largement contribué à la division de l’Europe », entretien de Markus Söder avec la Frankfurter Allgemeine Zeitung
Dans un entretien au quotidien de Francfort, le ministre bavarois des finances et rival de l’actuel ministre-président Horst Seehofer, dresse un constat d’échec de l’Europe face au défi migratoire. « Ni la protection des frontières extérieures de l’UE, ni une répartition solidaire des réfugiés entre les pays membres ne fonctionne. L’Europe est profondément divisée et, par son cavalier seul qui a consisté à ouvrir les frontières, l’Allemagne y a largement contribué », déclare-t-il avant d’appeler une nouvelle fois pour l’Allemagne à la fixation d’un plafond national en matière d’accueil des réfugiés. Il ajoute que la conséquence logique du refus des Européens de répartir équitablement les réfugiés devrait être la fixation d’un plafond européen. Il estime par ailleurs que la montée de l’AfD pourrait être contenue si un changement était engagé sur la politique migratoire.
- Europe
« Bruxelles fait d’importantes concessions aux Britanniques » (Die Welt, Handelsblatt)
L’ensemble de la presse s’accorde à constater que l’Union européenne a, comme le souligne la Süddeutsche Zeitung, « présenté 16 pages de concessions » à la Grande-Bretagne, « par peur d’un ‘Brexit’ », précise aussi la Berliner Zeitung. La plupart jugent que David Cameron a largement imposé ses positions, tout en relativisant sa « victoire » face à ses interlocuteurs européens. Les avis divergent sur le bien-fondé des réformes envisagées ainsi que sur leur impact réel sur l’opinion publique britannique.
Pour une partie de la presse, les exigences du Premier ministre britannique arrivent à point nommé pour ses homologues européens : « David Cameron n’est que l’élément déclencheur de réformes générales de l’UE. D’autres Etats européens se sont aussi plaints du tourisme social, le tribunal social fédéral allemand a appelé à faire évoluer la législation, et tout récemment les ministres française et allemande du Travail se sont prononcées en faveur de restrictions », indique la Berliner Zeitung. « L’Allemagne peut dire merci à David Cameron de plaider en faveur d’une réforme des aides sociales pour les migrants de l’UE », note également Bild tandis que le Handelsblatt constate que le Premier ministre britannique « n’a pas eu besoin d’être un grand négociateur, il enfonce des portes ouvertes dans d’autres capitales ». « C’est une offre raisonnable, elle reflète la réalité de l’état actuel de l’UE : migration intérieure – oui mais pas trop et sans abus ; zone euro – d’accord, mais pas au dépens de tiers ; droit à la parole des parlements nationaux – bien sûr, de toutes façons ça n’est déjà quasiment pas utilisé actuellement ; toujours plus d’Europe – un objectif symbolique mais irréaliste pour l’instant », résume la Süddeutsche Zeitung. D’autres quotidiens, en revanche, accueillent de manière négative les concessions proposées par Donald Tusk : « on passe de l’Europe à plusieurs vitesses (zone euro, Schengen) à une Europe des panneaux stop », déplore le Tagesspiegel, « c’est un énorme pas en arrière de l’intégration européenne, l’UE a vendu son âme », s’alarme le quotidien alternatif de gauche tageszeitung. « L’UE endommage l’un de ses piliers, la libre circulation des personnes, et prend un risque juridique, car à la fin la CJUE pourrait bien interdire cette discrimination généralisée des ressortissants communautaires en matière de droits sociaux », considère également le Handelsblatt.
La presse craint par ailleurs que la « victoire apparente » (Die Welt) de David Cameron ne suffise pas à convaincre les Britanniques de rester au sein de l’UE. « Il a perdu depuis longtemps le leadership sur ce débat chez lui. Il pourrait remporter une victoire à Bruxelles et perdre quand même le référendum », craint la Berliner Zeitung. La Frankfurter Allgemeine Zeitung va plus loin dans son analyse, considérant que l’UE s’est bornée à cocher point par point les exigences de David Cameron sans mener une réflexion de fond sur le rôle de la Grande-Bretagne dans l’Union européenne et l’avenir de celle-ci en cas de ‘Brexit’. « Les Européens font ce qu’ils font généralement quand ils devraient mener un débat stratégique : se concentrer sur des points de détails. La proposition de Bruxelles est tellement calibrée pour obtenir un accord que ce qui va compter au final, c’est l’état d’esprit des Britanniques », conclut la FAZ.
- International
Déplacement de Frank-Walter Steinmeier en Iran et en Arabie Saoudite
Le déplacement du ministre fédéral des Affaires étrangères en Iran et en Arabie saoudite pour participer au festival d’Al Janadriyah est mentionné par plusieurs journaux, qui rapportent, à l’instar de Die Welt, que Frank-Walter Steinmeier veut contribuer au rétablissement du dialogue entre Téhéran et Riyad, notamment pour faciliter une solution politique à la crise syrienne. La FAZ rappelle que F.-W. Steinmeier avait déjà fait une tournée équivalente avec un même objectif à l’automne dernier mais que le rapprochement des deux capitales relève « de la quadrature du cercle », même si « l’Allemagne a une bonne réputation dans les deux pays » et si F.-W. Steinmeier « est respecté dans les deux capitales ». Le quotidien de Francfort juge qu’il pourra tout au plus convaincre ses homologues que « le dialogue est préférable à la guerre froide ».
Entretien du président ukrainien dans Bild
Le président ukrainien Petro Porochenko réitère dans une interview au tabloïd Bild les messages présentés lundi dernier à Berlin lors de sa conférence de presse commune avec la Chancelière Angela Merkel. Déplorant la dégradation de la situation à l’Est de l’Ukraine, il estime que « la Russie n’a pas mis en œuvre un seul point de l’accord de Minsk » et que « le danger d’une guerre ouverte [en Ukraine] est plus important que l’année dernière ». En réponse à une question, le président ukrainien déclare être « ouvert » à des propositions de livraisons d’armes à Kiev « car il en va de la sécurité européenne », mais juge « que nous devons surtout nous soutenir encore davantage mutuellement pour être prêts à tout » et « qu’au premier plan, doit demeurer une solution diplomatique », insistant sur « le rôle très important joué par la chancelière et le président Hollande dans la désescalade » de la crise. Interrogé sur les efforts visant à faire de Moscou un « partenaire » dans la résolution de la crise syrienne – qui pourraient passer par une levée de sanctions, P. Porochenko affirme que « toute personne qui regarde ce qu’il se passe en Ukraine, ne peut en aucun cas être favorable à une levée des sanctions » et appelle l’Europe à ne pas être « la victime du chantage de Poutine ». Alors qu’on lui rappelle que V. Poutine a déclaré à Bild le mois dernier « ne pas accorder d’importance aux frontières », P. Porochenko affirme que « Poutine n’accepte aucune ligne rouge et peut annexer d’autres pays sous le prétexte de la discrimination supposée de minorités russes » et met en garde l’Allemagne « où vivent également des minorités russes » et qui a fait récemment l’expérience de « la propagande choquante russe » dans le contexte de l’ « affaire Lisa ».
- France
« Paris envisage de baisser les allocations chômage » (Frankfurter Allgemeine Zeitung)
Le correspondant économique en France de la FAZ consacre un article à la proposition des ministres français du travail et des finances de revenir à la dégressivité des allocations chômage, alors que les partenaires sociaux doivent prochainement se rencontrer. « Le président de la République ne s’est pas encore exprimé sur le dossier », écrit le quotidien qui insiste sur l’exceptionnelle générosité de l’assurance chômage en France et pour lequel « le dossier constitue un test pour la capacité [du président] à s’attaquer à une prestation sociale majeure au cours de son mandat »./.