Aujourd’hui en Allemagne

Synthèse de la presse quotidienne

Ce document est à usage strictement interne et a été réalisé par l’Ambassade de France en Allemagne

22 février 2016

 

  1. Les violences contre les réfugiés en Saxe (incendie d’un centre de réfugiés à Bautzen en présence de badauds gênant le travail des pompiers ; prise à partie par des manifestants d’extrême-droite de demandeurs d’asile jeudi sous protection policière à Clausnitz) font les gros titres de la presse allemande ce matin : « un centre de demandeurs d’asile brûle, des spectateurs s’en réjouissent » (Süddeutsche Zeitung), « la honte de la Saxe » (tageszeitung), « qui pour arrêter la meute de la haine ? » (Bild). Le Tagesspiegel cite le ministre-président de Saxe, Stanislaw Tillich, et le ministre fédéral de la justice Heiko Maas (« répugnant et abominable »). Die Welt reprend pour sa part les déclarations du vice-président de la CDU Armin Laschet (« l’intégration de plus d’un Allemand a échoué »).  La Frankfurter Allgemeine Zeitung titre sur le Brexit (« le débat sur l’appartenance à l’UE divise les conservateurs britanniques »). Le quotidien économique Handelsblatt note que « BMW programme de nouveaux modèles de luxe ».
  2. Allemagne

« Indignation après les incidents xénophobes en Saxe » (Frankfurter Allgemeine Zeitung)

Les journaux se font l’écho des vives réactions de la classe politique après les incidents survenus récemment en Saxe. Jeudi dernier, des habitants de la ville de Clausnitz avaient cherché à empêcher l’arrivée par bus d’une vingtaine de réfugiés et dans la nuit de samedi à dimanche, un incendie, qui n’a pas fait de victimes, a détruit un centre devant accueillir des réfugiés à Bautzen.

Dans leurs commentaires, les journaux font le constat inquiétant de la violence à caractère xénophobe qui progresse dans certaines régions d’Allemagne, attisée par le mouvement Pegida ou la rhétorique du parti AfD. Cependant, met en garde le tabloïd Bild, « celui qui se contente de pointer du doigt les dangereux agitateurs et fauteurs de troubles se rend la tâche trop facile. Il ne suffit pas de vanter la culture d’accueil et de célébrer à Berlin le rendez-vous réussi avec la mondialisation si des communes complètement dépassées par les événements baissent les bras face au devoir de maintien de l’ordre public ».

« Les candidats de la CDU en campagne perdent patience avec la chancelière » (Die Welt, Handelsblatt)

Sous ce titre, les quotidiens font état de la position commune défendue par les candidats tête de liste dans le Bade-Wurtemberg et en Rhénanie-Palatinat, Guido Wolf et Julia Klöckner, et soutenue par leur homologue en Saxe-Anhalt, Reiner Haseloff, qui réclament pour juguler l’afflux de réfugiés des « mesures immédiates », dont la mise en place de centres d’accueil et d’enregistrement près des pays d’origine des migrants, des aides directes pour les camps de réfugiés de Jordanie, du Liban et de Turquie, ainsi que l’adoption par l’Allemagne de contingents quotidiens d’entrée sur le territoire. « Temporiser au lieu d’agir va s’avérer douloureux et dommageable, font valoir J. Klöckner et G. Wolf, selon qui l’UE, étant donné le manque de coopération, apparaît davantage comme une partie du problème que comme la solution.

Alors qu’une « rencontre spéciale » avec la Turquie doit se tenir le 6 mars, les candidats aux élections (qui auront lieu le 13 mars), estiment qu’il ne faut pas perdre de temps et agir dès à présent. Selon un sondage IINSA que publie le tabloïd Bild, à trois semaines du scrutin, la CDU a de bonnes raisons de s’inquiéter. En perte de vitesse dans le Bade-Wurtemberg, les conservateurs (30%) font actuellement jeu égal avec les Verts (30,5%) et en Rhénanie –Palatinat, avec 35%, ils ne sont plus qu’à deux points d’écart du SPD (33%).

« Les exportations allemandes d’armement augmentent massivement » (FAZ

Dans son édition de samedi, la Frankfurter Allgemeine Zeitung indiquait que Sigmar Gabriel a devancé la publication au printemps du rapport annuel sur les exportations d’armement en faisant savoir que, conformément à la ligne qu’il prône, les exportations d’armes légères ont sensiblement diminué (16 millions en 2015 contre 42 millions en 2013). La forte augmentation des exportations d’armes lourdes (les blindés à destination du Qatar notamment) se justifie, selon lui, par le fait que les contrats signés par la majorité précédente n’ont pu être annulés. Soulignant l’inconfort de la position du ministre allemand de l’économie, une partie de la presse souligne qu’il a au moins le mérite d’avoir invité dans le débat public la question des exportations d’armement jusqu’ici cantonnée aux cercles pacifistes.

  1. Europe

Conseil européen : « le sommet du chantage » (Süddeutsche Zeitung)

Les éditoriaux, toutes tendances confondues, ne sont pas tendres avec le Premier ministre britannique dont ils estiment qu’il a monopolisé les ressources du Conseil européen à des fins de politique intérieure. « Cameron ne souhaitait pas vraiment réformer l’UE, il ne pensait qu’à sa propre sauvegarde politique. Quel gâchis d’énergie politique ! 27 Etats au secours d’un seul, les mousquetaires n’étaient rien à côté », ironise la Süddeutsche Zeitung, presque dans les mêmes termes que le conservateur Die Welt : « pendant que l’Orient est au bord du gouffre, les chefs d’Etat et de gouvernement de 27 pays européens ont consacré deux jours et deux nuits à aider le Premier ministre d’une 28ème nation à régler un problème de politique intérieure que celui-ci s’était créé tout seul sur un coup de tête il y a trois ans ». Quant à savoir s’il est réglé, toute la presse en doute fortement au vu des premières montées au créneau des partisans du « Brexit » au gouvernement britannique et du maire de Londres. « Après le show, le show continue », résume la FAZ.

Sur le fond, les éditorialistes s’accordent à constater, à l’instar de la Frankfurter Allgemeine Zeitung, que si les mesures concédées à David Cameron « ne sont pas banales, elles sont très loin de son objectif initial d’une refonte fondamentale de l’UE ». « En fait, il n’a jamais eu l’intention de réformer en profondeur l’UE vers davantage de marché ou de subsidiarité. Tout ce qu’il voulait, dans la tradition de ses prédécesseurs, c’est négocier quelques avantages supplémentaires pour son pays », fait également valoir le correspondant à Bruxelles de la FAZ. Les grandes plumes de la Süddeutsche Zeitung s’accordent à trouver consternant le « deal » des 27 avec la Grande-Bretagne mais estiment qu’il était nécessaire pour sauver ce qui pouvait l’être de l’Union européenne. Le compromis trouvé sur l’indexation des allocations familiales versées aux ressortissants communautaires sur le coût de la vie dans leur pays d’origine si leurs enfants y résident « pourrait être aussi appliqué en Allemagne », relèvent la FAZ et Bild en citant les déclarations en ce sens de la chancelière fédérale à l’issue du Conseil. « Si l’Allemagne envisage de reprendre à son compte les concessions faites à David Cameron, on voit bien que ce n’est pas un statut particulier accordé à la Grande-Bretagne mais de nouvelles règles pour tous », analyse le quotidien alternatif tageszeitung.

S’agissant de la crise des réfugiés, les médias constatent que l’ajournement du débat au sommet avec la Turquie dans quinze jours offre à Angela Merkel un certain répit, alors que l’ensemble des quotidiens prédisaient que ce Conseil acterait de manière spectaculaire l’échec de la politique européenne voulue par la chancelière allemande. « Politiquement, elle vit au jour le jour, mais le résultat du Conseil lui suffit pour poursuivre pour l’instant sur la voie qu’elle a choisie : ce gain de temps est un petit succès pour Merkel », estime la Süddeutsche Zeitung. Pour le chef du service étranger de la FAZ, la crise migratoire a suffi à remiser aux oubliettes le rôle dirigeant que les observateurs attribuait à l’Allemagne en Europe suite à la crise de l’euro : « l’Allemagne n’est plus vue comme une puissance hégémonique, aujourd’hui c’est Berlin qui est acculé », conclut Klaus-Dieter Frankenberger.

  1. International

Tribune conjointe de Jean-Marc Ayrault et de Frank-Walter Steinmeier sur l’Ukraine dans la FAZ

La Frankfurter Allgemeine Zeitung publie, dans son édition de ce matin, la tribune commune du Ministre et de son homologue allemand, Frank-Walter Steinmeier, dans laquelle les deux ministres appellent le gouvernement ukrainien à poursuivre sur la voie des réformes pour moderniser le pays « avec l’aide de la France, de l’Allemagne, de l’Union européenne et d’autres partenaires internationaux ».

« Phase finale pour le TTIP » (Süddeutsche Zeitung)

La presse allemande revient sur les enjeux du 12ème round de négociation sur le Partenariat transatlantique de commerce et d’investissement (TTIP) qui s’ouvre aujourd’hui à Bruxelles. A l’instar de la Süddeutsche Zeitung, les journaux soulignent que les négociateurs vont devoir discuter des « plus grands points d’achoppement » et indiquent que « le temps presse » en raison de la tenue d’élections à la fois aux Etats-Unis en 2016 et en France et en Allemagne en 2017. Die Welt estime que ces négociations permettront aux Européens de « mettre sur la table leur proposition pour une protection moderne des investissements » et aux Etats-Unis « de faire des propositions concrètes en matière de coopération réglementaire ». Dans un entretien à Bild am Sonntag, le représentant au Commerce des Etats-Unis, Michael Froman, affirme croire que les négociations pourraient être conclues en 2016 et déclare, en réaction aux sondages témoignant du scepticisme allemand vis-à-vis du TTIP, que l’Allemagne n’a aucune raison de craindre ce partenariat, puisqu’elle est l’un des pays qui profite le plus du commerce international. Dans un éditorial ce matin, Die Welt appelle à refuser un TTIP au rabais (« ttip Light ») qui ne ferait les affaires que des opposants au libre-echange. Pour le quotidien de Berlin, mieux vaut envisager de prolonger la négociation  au-delà de 2016 avec la prochaine administration americaine.

  1. France

Réforme du temps de travail : « la fin d’un tabou » (Süddeutsche Zeitung)

« La ministre du travail s’attaque à des réformes en profondeur », titre le Handelsblatt pour qui Myriam El Khomri « prépare une sorte de petit ‘Agenda 2010’ [Ndr : les réformes du travail allemandes] » « De manière surprenante, le gouvernement français présente un projet de réforme du marché du travail qui constitue une attaque contre deux institutions de gauche : les syndicats et la semaine des 35 heures », s’étonne la Süddeutsche Zeitung qui, comme la Frankfurter Allgemeine Zeitung, note que le projet de réforme envisage de nombreuses possibilités de contournement de la semaine des 35 heures. Ces journaux évoquent l’entretien de la ministre du Travail avec le quotidien Les Echos et relèvent notamment que Mme El Khomri n’exclut pas le recours au 49-3 si la majorité du parlement lui faisait défaut. « Un an avant les élections présidentielles, Hollande est massivement sous pression compte tenu de sa promesse de parvenir à inverser la courbe du chômage », expliquent la Süddeutsche Zeitung et le Handelsblatt. « Est-ce une lucidité tardive ou un calcul tactique qui pousse le président Hollande à proposer la réforme la plus courageuse de son mandat ? En tout cas, il s’attaque enfin aux dossiers brûlants que personne n’a osé ouvrir jusqu’ici », reconnaît le correspondant économique de la FAZ.

Commémoration de la bataille de Verdun

Le 100ème anniversaire de la bataille de Verdun a donné lieu à de nombreux articles ces derniers jours évoquant aussi la réouverture après rénovation du Mémorial de Verdun et signalant la participation de la chancelière aux côtés du président de la République à une cérémonie d’hommage le 29 mai. Les médias audiovisuels se sont largement emparés du sujet pour souligner la dimension franco-allemande nouvelle du memorial de Verdun, estimant qu’une telle entreprise aurait été inimaginable il y a quelques décennies./.