Synthèse de la presse quotidienne
8 mars 2016
Ce document est à usage strictement interne et a été réalisé par l’Ambassade de France en Allemagne
- L’offre faite par la Turquie lors du sommet avec l’UE hier fait les gros titres de la presse allemande ce matin : « la Turquie met l’UE sous pression » (Süddeutsche Zeitung) ; « la Turquie exige davantage d’argent et des facilitations rapides sur les visas lors du sommet avec l’UE » (Frankfurter Allgemeine Zeitung) ; « la Turquie prend l’Europe par surprise » (Der Tagesspiegel) ; « quand vous donnez plus, vous exigez plus » (Die Welt citant un diplomate européen). Le quotidien économique Handelsblatt relève pour sa part que le « conseil de surveillance [de Volkswagen est] divisé », son président, ancien proche de M. Winterkorn, étant soupçonné d’avoir été au courant du trucage des véhicules.
- Europe
Sommet UE/Turquie : « la Turquie met l’UE sous pression » (Süddeutsche Zeitung)
L’ensemble de la presse s’accorde à souligner que la Turquie a fait monter les enchères pour une résolution de la crise migratoire. Evoquant la soirée de dimanche, le tabloïd Bild indique que la chancelière s’était entretenue plus de cinq heures durant avec les Premiers ministres turc et néerlandais avant de faire part au président du Conseil Donald Tusk, le lendemain matin, d’une « véritable percée » dans les négociations. Dans son journal de fin de soirée, le correspondant à Bruxelles de la première chaîne publique ARD croyait savoir hier que le compromis semblait avoir été dicté par l’Allemagne et les Pays-Bas, ce qui aurait entre-temps été démenti par la chancelière.
Dans leurs commentaires, les journaux se montrent largement critiques vis-à-vis d’une Union européenne prête à payer le prix fort à la Turquie au moment où celle-ci foule aux pieds la liberté de la presse. « Sous l’impulsion de la chancelière, l’UE a remis son sort entre les mains du gouvernement d’Ankara et l’obstination de Mme Merkel à fermer non pas la route des Balkans mais la frontière greco-macédonienne n’a guère laissé d’autre choix à l’UE », déplore ainsi la FAZ pour qui le vrai prix que l’UE s’apprête à payer est celui de l’adhésion de la Turquie à l’UE que Davutoglu a mise dans la balance. Critiquant lui aussi la mise sous tutelle du journal d’opposition turc Zaman, le Tagesspiegel estime que la crise migratoire « donne au président turc la certitude qu’en dépit de flagrantes atteintes aux libertés fondamentales, l’Union européenne en restera à quelques protestations ». Sur le plan intérieur, Erdogan met à profit la détresse des Européens, mais en matière de politique étrangère son comportement de plus en plus « imprévisible » risque fort de lui nuire à terme car la réputation de fiabilité de son pays à l’égard de l’Occident est sérieusement mise à mal, s’inquiète le quotidien. « La fin justifie-t-elle le pacte noué avec celui qui pourchasse des journalistes critiques et attise la guerre contre les Kurdes ? », s’interroge la Süddeutsche Zeitung pour qui il n’est « pas faux de chercher une solution avec la Turquie, à condition toutefois de ne pas s’efforcer de la justifier sur le plan moral ». Revenant sur « l’isolement » de la chancelière et son refus de reconnaître la fermeture de la route des Balkans, le quotidien se veut pragmatique : « il faudra bien accepter la décision prise par les pays le long de la route des Balkans, de même que l’accord conclu avec la Turquie. Ce n’est sans doute pas le début de la solution mais d’une solution européenne ».
Grèce/retour de la troïka à Athènes pour poursuivre l’examen des réformes
Dans le contexte de la rencontre entre la Grèce et ses créanciers internationaux, la Süddeutsche Zeitung s’émeut du fait que le commissaire européen, M. Moscovici, ait fait valoir que dans les discussions portant sur l’avancée des réformes, il convenait aussi de tenir compte de la crise des réfugiés. « Il existe pourtant à Bruxelles une règle non écrite qui consiste à distinguer la crise financière que traverse le pays de la crise des réfugiés », souligne le journal pour qui Pierre Moscovici, comme membre de la commission, a « transgressé cette règle ».
- Allemagne
Elections communales en Hesse : « les partis et les gouvernements refroidis » (Die Welt)
Tous les journaux commentent abondamment le « virage à droite » (Tagesspiegel) auquel ont donné lieu les élections communales qui consacrent le parti populiste AfD comme troisième force politique derrière la CDU et le SPD. La FAZ titre sur les propos du ministre-président de Hesse, Volker Bouffier (CDU), qui a évoqué un « vote protestataire » dont il a reporté la responsabilité sur le gouvernement fédéral en raison de ses dissensions sur la politique migratoire. Les élections de dimanche ont effectivement révélé le potentiel énorme dont disposent les partis protestataires, concède le Tagesspiegel pour qui cette « inquiétante » issue doit être comprise comme un « signal d’alarme en direction de Berlin ». Sur fond de crise des réfugiés, en Allemagne c’est le peuple qui fuit en tournant le dos aux partis traditionnels, observe la FAZ avant d’ajouter que les « fuyards » en question ne sont pas des extrémistes de droite mais des citoyens normaux unis dans le sentiment que ni la CDU, ni le SPD ne sont à l’écoute de leurs inquiétudes. « L’AfD vient combler le vide laissé par les partis établis », juge également le Handelsblatt qui n’exclut pas un « séisme » lors des élections de 2017 si le gouvernement ne parvient pas d’ici là à rassurer l’opinion. Pour la Süddeutsche Zeitung, la percée de l’AfD, qui vient bouleverser les équilibres traditionnels, va contraindre les partis classiques à des alliances inhabituelles et nul doute que dimanche l’AfD fera son entrée dans trois parlements régionaux, réduisant à néant les objectifs classiques de coalition. Se voulant rassurant, le tabloïd Bild refuse de céder à l’hystérie et fait valoir que le résultat de dimanche n’est « ni la fin du monde, ni la fin de la démocratie ». C’est en revanche un « avertissement pour les partis classiques ». Sur la même ligne, la Berliner Zeitung juge le résultat « douloureux pour les conservateurs » allemands, mais « sans surprise au regard de la manière dont la CSU, qui a polarisé le débat, a apporté de l’eau au moulin de l’AfD ».
« La police criminelle fédérale en possession de documents secrets sur Daech » (Süddeutsche Zeitung)
La Süddeutsche Zeitung et les chaînes télévisées NDR et WDR révèlent ce matin que la police criminelle fédérale (BKA) serait en possession de documents secrets de Daech qui contiendraient une liste de noms d’étrangers qui auraient rejoint le groupe djihadiste. Ils précisent que ces dossiers rassembleraient les informations collectées par Daech lors de l’arrivée de nouveaux combattants étrangers et incluraient à la fois des données sur le lieu antérieur de résidence, la religion, les membres de la famille, l’éducation et l’« expérience djihadiste » du nouvel arrivant. Les quotidiens indiquent en outre que le BKA aurait obtenu ces informations grâce à des partisans de Daech en Syrie et affirment l’authenticité de ces documents. La Süddeutsche Zeitung ajoute que plus de 800 Allemands auraient rejoint les rangs de Daech et environ 260 d’entre eux seraient revenus en Allemagne.
- France
Centrale nucléaire de Fessenheim : « fermer ou ne pas fermer ? » (Süddeutsche Zeitung)
La presse continue d’accorder une couverture importante à l’incident qui a lieu dans la centrale de Fessenheim en avril 2014. Les quotidiens rapportent l’annonce par la ministre du Logement et de l’Habitat durable, Emmanuelle Cosse, de la fermeture de la centrale en 2016 et soulignent que cette annonce contredit les déclarations initiales du président de la République et de la ministre de l’Environnement, de l’Energie et de la Mer, Ségolène Royal. Le quotidien alternatif de gauche tageszeitung s’inquiète du risque d’accident nucléaire en France, estime nécessaire un renforcement de la réglementation nucléaire européenne et appelle la chancelière à prendre position sur le dossier. La presse régionale (Südwest Presse, Reutlinger General-Anzeiger) souligne pour sa part le danger que représente la centrale de Fessenheim et espère qu’un accident grave n’aura pas lieu.
« Le directeur financier d’EDF démissionne pour protester contre un projet nucléaire » (FAZ)
Tous les journaux rendent compte de la démission du directeur financier d’EDF, Thomas Piquemal, en raison d’un désaccord sur le coût du projet de construction de deux réacteurs EPR à Hinkley Point en Grande-Bretagne. A l’instar de la FAZ, les journaux expliquent le geste de M. Piquemal par la situation financière de l’entreprise sous menace d’une dégradation de sa note par Standard & Poor’s et qui devrait, en plus des investissements pour Hinkley Point C, construire d’autres centrales, « sauver Areva, fermer Fessenheim, moderniser les centrales nucléaires, investir dans les énergies renouvelables et assurer un prix abordable au consommateur ». La presse présente cette démission comme un coup dur pour la mobilisation des autres investisseurs sur un projet soutenu par l’Etat. Pour le quotidien de Francfort, l’affaire démontre qu’EDF « doit encore trouver sa place dans le nouveau monde de l’électricité ».
« La réforme du travail sous le feu des critiques » (FAZ)
Le correspondant économique à Paris de la FAZ consacre un article aux « résistances accrues » que rencontre le projet de la ministre du travail. Mentionnant une enquête de l’institut Odoxa selon laquelle 67% des Français rejetteraient le projet, le journal mentionne aussi la mobilisation des syndicats et de l’aile gauche du parti socialiste qui ont appelé à des actions pour la journée de demain. Pour le quotidien de Francfort, ce projet est plus que jamais le test de la capacité du gouvernement à mettre en œuvre des réformes./.