Synthèse de la presse quotidienne

15 mars 2016

Ce document est à usage strictement interne et a été réalisé par l’Ambassade de France en Allemagne

1. La colère froide du ministre-président bavarois et président de la CSU Horst Seehofer contre la chancelière après les élections en Bade-Wurtemberg, Rhénanie-Palatinat et Saxe-Anhalt fait les gros titres de la presse : la Süddeutsche Zeitung et le Tagesspiegel citent H. Seehofer : « c’est la faute de Merkel  ». La Frankfurter Allgemeine Zeitung note que « Mme Merkel contredit M. Seehofer quand elle dit que l’AfD n’est pas un problème existentiel pour la CDU ». Die Welt cite les deux chefs de parti : « pour Mme Merkel, c’est un jour difficile pour la CDU. Pour M. Seehofer, l’alliance CDU/CSU est en danger ». Le quotidien économique Handelsblatt publie une étude montrant que les acteurs économiques allemands sont partagés sur la politique migratoire de Mme Merkel (« Mme Merkel divise les acteurs économiques »).
2. Allemagne 

« Merkel contredit Seehofer : l’AfD n’est pas un problème existentiel pour la CDU » (Frankfurter Allgemeine Zeitung)

Les journaux rendent compte de la réaction des responsables de la CDU, de la CSU et du SPD aux résultats des scrutins régionaux dans la Bade-Wurtemberg, en Rhénanie-Palatinat et en Saxe-Anhalt. La FAZ rend compte des déclarations de la chancelière qui a rejeté l’idée que le succès du parti populiste AfD serait une menace pour la CDU/CSU. Estimant que dimanche a été une « journée difficile » pour son parti, Mme Merkel a jugé que face à l’AfD un « débat argumenté » était nécessaire, mais qu’il fallait fixer des limites claires en termes de coopération avec ce parti. Concernant sa politique migratoire, Mme Merkel a réaffirmé la nécessité d’une solution européenne qui, a-t-elle ajouté, va prendre du temps. Les journaux notent que pour le SPD, Sigmar Gabriel a fait valoir que les scores enregistrés par l’AfD ne justifiaient pas un changement de cap et que l’on n’allait pas « se mettre à courir derrière l’AfD ».

Sous le titre « c’est la faute de Merkel », le Tagesspiegel met l’accent sur les critiques de Horst Seehofer qui a une nouvelle fois appelé à un changement de politique, faute de quoi il pourrait bien s’avérer que la formation d’une grande coalition ne soit pas possible en 2017. Evoquant la colère froide du chef de la CSU qui s’est livré à un monologue de 45 minutes devant la presse, Bild cite H. Seehofer : « ‘continuons comme ça’ n’est pas une réponse acceptable. Nous courons à l’échec ». Le tabloïd indique qu’à l’occasion d’une nouvelle rencontre de la direction de la CDU/CSU demain soir, H. Seehofer fera part à la chancelière de son rejet du plan européen avec la Turquie visant à endiguer le flux migratoire.

Le Handelsblatt consacre sa une à des milieux économiques divisés sur la politique migratoire de la chancelière. Le cap décidé par A. Merkel « n’effraie pas seulement ses électeurs, mais aussi les décideurs économiques », fait valoir le quotidien qui en veut pour preuve les résultats du dernier Business Monitor. Selon cette enquête réalisée auprès de 650 managers, un peu plus de la moitié d’entre eux soutiennent la politique migratoire de la chancelière, tandis que l’autre moitié souhaite une inflexion, 45% se prononçant en faveur d’un plafond migratoire, 40% se déclarant favorables à la fermeture des frontières nationales.

Dans leurs commentaires à nouveau très nombreux, les journaux se penchent avant tout sur les succès de l’AfD. Dans son éditorial du jour, Bild fait valoir que les populistes sont parvenus à combler un vide laissé par les partis traditionnels et qui s’est formé bien avant la crise des réfugiés, celle-ci ayant joué, pour la FAZ, le rôle de catalyseur. Le quotidien de Francfort qualifie l’AfD de « rejeton du ménage à trois formé par la grande coalition et les Vets sur la crise migratoire ». Le Tagesspiegel avance que l’AfD tire sa force de la faiblesse des partis établis à laquelle s’ajoute le fait que sous Mme Merkel, les sujets de fond ne sont plus débattus mais tranchés avant même d’avoir fait l’objet d’une amorce de discussion. Pour inverser la tendance, il faut donc que les responsables politiques se remettent à l’écoute du citoyen, conclut le journal. De l’avis du Handelsblatt, le style de plus en plus « présidentiel » de la chancelière, déjà observé lors de la crise de l’euro, « rencontre à présent ses limites ». Pour le journal, le succès de l’AfD est la conséquence inéluctable du fait qu’en tant que présidente de la CDU, Mme Merkel n’a jamais été à l’écoute de l’aile conservatrice du parti, laquelle se murait jusqu’ici dans le silence dans le seul but de conserver le pouvoir. Nombreux sont les quotidiens qui relèvent par ailleurs qu’après des décennies d’exception, l’Allemagne est désormais rattrapée par une certaine normalité que connaissent la plupart de ses voisins européens confrontés à des partis populistes forts.

3. Europe

Conflit social à l’Office européen des brevets : « révolte au paradis » (Handelsblatt)

Le quotidien économique consacre un reportage au conflit social qui oppose le président français de l’Office européen des brevets, Benoît Battistelli, au principal syndicat de cet organisme, présentant sous un jour positif la volonté réformatrice d’un « haut fonctionnaire français » et pointant les salaires et pensions très confortables dont bénéficient les employés d’une institution très convoitée. Le Handelsblatt publie une interview de B. Battistelli dans lequel celui-ci, selon le journal, « répond pour la première fois dans un média allemand aux critiques massives à son égard », dénonçant « le harcèlement et les diffamations » dont il fait l’objet.

Crise des réfugiés : interview de la commissaire européenne à la politique régionale dans Die Welt

Interrogée par Die Welt, la vice-présidente roumaine de la commission européenne Corina Creţu se félicite que l’Allemagne s’intéresse à l’intégration des réfugiés : « les réfugiés vont rester ici pour longtemps », souligne-t-elle, en insistant sur le fait que l’émergence de sociétés parallèles est « le plus grand danger guettant l’Union européenne ». Elle déplore que la volonté de la Commission d’utiliser les fonds structurels européens pour des projets liés à l’accueil et l’intégration des demandeurs d’asile ne rencontre que trop peu d’échos dans la plupart des Etats membres. Pour l’Allemagne, ce sont quelque 29 milliards d’euros de fonds structurels prévus jusqu’à 2020 qui peuvent être utilisés à ces fins, ajoute-t-elle en citant plusieurs exemples concrets de projets d’intégration réalisés dans les Länder.

4. International

« Poutine veut retirer ses troupes de Syrie » (Süddeutsche Zeitung)

Les médias rapportent de premières réactions encourageantes, dont celle de Frank-Walter Steinmeier, à l’annonce par Vladimir Poutine du retrait partiel des troupes russes de Syrie. Dans un commentaire, la Süddeutsche Zeitung se montre toutefois sceptique, s’inquiétant d’une nouvelle « feinte » du président russe alors que la Russie n’a atteint en Syrie ni ses « objectifs officiels » puisque le terrorisme n’a pas été éradiqué, ni ses « objectifs officieux » compte tenu des incertitudes sur l’issue du processus politique. Le journal conclut que seuls la fin des bombardements et l’engagement sérieux du régime dans les négociations permettront de juger de la valeur de l’annonce russe.

« L’armée turque étend ses opérations contre le PKK » (FAZ)

Les journaux s’inquiètent à nouveau d’une accélération de la « spirale de la violence » après la décision du gouvernement turc de bombarder des positions kurdes en réponse à l’attentat d’Ankara. Pour la Süddeutsche Zeitung, la Turquie, qui a désormais passé l’occasion historique d’une réconciliation avec les Kurdes, semble s’engager dans « une guerre éternelle ». Sous le titre « escalade en Turquie », la Frankfurter Allgemeine Zeitung constate la répétition des attentats à Ankara et se demande si « l’Etat turc est aussi fort qu’il croit l’être ». La Berliner Zeitung ajoute que « l’Europe n’a pas seulement besoin de la Turquie dans la crise des réfugiés, mais qu’elle doit aussi user de son influence à Ankara pour empêcher une plus vaste déstabilisation du pays ».

Attentat en Côte d’Ivoire

Les journaux déplorent l’attentat qui a eu lieu dimanche dans la station balnéaire ivoirienne de Grand-Bassam et publient de nombreux portraits de la victime allemande, la directrice de l’Institut Goethe dans le pays, Henrike Grohs. Dans un commentaire, la Süddeutsche Zeitung s’inquiète de la progression du terrorisme islamiste en Afrique, estimant que l’attentat en Côte d’Ivoire « ouvre le prochain front du terrorisme » et regrettant que « les islamistes qui opéraient jusqu’à présent surtout dans les régions délaissées du Nigéria et du Mali, s’attaquent désormais aux métropoles, traversent les frontières et envahissent des pays qui étaient autrefois sûrs »./.