Aujourd’hui en Allemagne

Synthèse de la presse quotidienne

9 mai 2016

Ce document est à usage strictement interne et a été réalisé par l’Ambassade de France en Allemagne

  1. La menace de la CSU bavaroise de mener une campagne indépendante de celle de la CDU lors des prochaines élections fédérales fait les gros titres de la Frankfurter Allgemeine Zeitung (« la CSU réfléchit à une campagne indépendante de la CDU ») et de la Berliner Zeitung (« la CSU envisage de conduire une campagne indépendante »). Die Welt titre pour sa part sur les rumeurs de démission du président du SPD Sigmar Gabriel qui ont été démenties hier par ce dernier (« doutes sur Sigmar Gabriel dans des rangs socio-démocrates en proie à la nervosité »). Le Tagesspiegel relève les appels de S. Gabriel à renforcer les investissements pour la construction et l’entretien des écoles (« Gabriel : ‘faites des écoles de véritables cathédrales’ »). La Süddeutsche Zeitung titre sur la volonté de la ministre fédérale de la défense Ursula von der Leyen d’augmenter les effectifs de la Bundeswehr de 14 300 personnels d’ici 2023 (« la Bundeswehr doit grossir »). Le quotidien économique Handelsblatt met à sa Une une étude de l’université de Cologne chiffrant à près de 72 milliards d’euros une sortie du charbon d’ici 2045, sortie que la fédération allemande pour l’environnement et la protection de la nature BUND vient à nouveau de demander (« cher charbon »).
  2. Allemagne

Nervosité des partis de la coalition confronté à une perte de popularité croissante

Alors que les sondages attestent de la faiblesse des grands partis (les derniers chiffres publiés par Bild am Sonntag donnent la CDU/CSU à 32 %, soit son plus mauvais score depuis 4 ans, tandis que le SPD stagne à 22%, suivi par l’AfD qui poursuit son ascension à 14%), les médias se font l’écho des velléités d’indépendance de la CSU lors de la campagne électorale des législatives de 2017 ainsi que de rumeurs de démission du président du SPD aussitôt démenties par l’intéressé. « Dans les trois partis de la coalition, on commence à comprendre qu’il ne suffit plus de diaboliser l’AfD mais qu’il faut trouver des réponses aux peurs de l’électorat », commente la Frankfurter Allgemeine Zeitung ; « enfin, le SPD commence à réaliser que l’AfD n’est pas seulement le problème des conservateurs et qu’il faut cesser de les traiter par le mépris et au contraire contrer leurs positions sur le fond », renchérit le Tagesspiegel.

  1. Europe

Grèce : « Schäuble de plus en plus isolé sur sa ligne politique dure » (Süddeutsche Zeitung)

La perspective de discussions houleuses lors de la réunion de l’eurogroupe consacrée à l’avancée des réformes en Grèce, condition du déblocage de la prochaine tranche d’aide, a fait resurgir le spectre du « retour de la crise grecque » dans la presse du week-end. Le Handelsblatt souligne que la directrice générale du FMI a invité les ministres des finances de la zone euro à mettre la question d’un allégement de la dette grecque à l’ordre du jour de la rencontre d’aujourd’hui, faute de quoi la participation du FMI au troisième plan d’aide pour la Grèce ne saurait être assurée. « Mme Lagarde met Berlin sous pression », traduit le Handelsblatt. Même au sein du gouvernement fédéral, la discorde règne à ce sujet entre le vice-chancelier et ministre de l’Economie, Sigmar Gabriel (SPD), qui appelle aussi à discuter dès maintenant d’un allègement de la dette grecque, et son homologue aux Finances Wolfgang Schäuble (CDU), partisan d’une ligne dure, rapporte le tabloïd Bild : « au ministère des Finances, les déclarations de Gabriel suscitent l’agacement, et dans l’entourage de Schäuble, on rappelle qu’il existe une ligne claire du gouvernement fédéral : d’abord les réformes, ensuite d’autres aides ». Dans les colonnes de Bild, le chef du FDP Christian Lindner appelle, quant à lui, à une décote de la dette grecque dans le cadre d’une sortie de la Grèce de la zone euro.

TTIP / interview de Matthias Machnig dans la tageszeitung (taz)

Dans un entretien avec le quotidien alternatif de gauche, le secrétaire d’Etat à l’Economie juge exagérées les craintes des opposants au traité transatlantique de libre-échange que la confidentialité des négociations traduise la disposition des Européens à faire de larges concessions sur leurs exigences. « Il n’y aura pas de marchandages [du type exportations automobiles européennes contre exportations agricoles américaines] », martèle Matthias Machnig (SPD) pour qui l’opinion publique « n’a pas assez conscience qu’il y a des lignes rouges claires pour l’UE ». Il défend la confidentialité des négociations (« imaginez que les négociations de coalition fasse l’objet d’une même exigence de transparence, les coalitions comme celle entre les Verts et les conservateurs au Bade-Wurtemberg seraient impossibles ») et revendique l’engagement de son ministère en faveur de juridictions indépendantes sur les différends liés aux investissements. Estimant qu’au vu de l’avancement actuel des négociations, la conclusion d’un accord reste très aléatoire, il rejette à nouveau l’idée d’un accord partiel (« TTIP light »), soulignant que les 28 Etats de l’UE veulent un accord clair et exhaustif sur les questions centrales.

Le dernier sondage de l’ARD en la matière indique que 70% des Allemands interrogés considèrent que le TTIP apportera plus d’inconvénients que d’avantages, contre 17% pensant le contraire (le rapport était de 55% / 31% il y a deux ans, rappelle la taz).

  1. International

« Erdoğan remet en question l’accord UE-Turquie sur les réfugiés » (Welt)

Dans leurs éditions du week-end et de ce matin, les journaux continuent de redouter les conséquences de l’éviction du Premier ministre Ahmet Davutoğlu – notamment sur la mise en œuvre par la Turquie de l’accord UE-Turquie du 18 mars dernier. A l’instar de Die Welt, la presse voit une confirmation de ses inquiétudes dans le refus du président Recep Tayyip Erdoğan de modifier loi antiterroriste turque, pourtant nécessaire à la libéralisation des visas par l’UE. Le tabloïd Bild croit savoir que les gouvernements européens prépareraient même déjà une solution de substitution à l’accord UE-Turquie dans l’hypothèse où « Erdoğan, [n’obtenant pas la libéralisation des visas en raison de sa position sur la loi antiterroriste] décidait dans un coup de sang de laisser partir des milliers de réfugiés vers l’Europe ». D’après Bild, l’option serait étudiée à Bruxelles de choisir des îles grecques éloignées du continent comme lieux d’accueil provisoire des réfugiés. « Les réfugiés pourraient rester bloqués sur les îles et les déboutés du droit d’asile pourraient être directement renvoyés dans leurs pays d’origine », affirme un ministre européen au tabloïd sous couvert d’anonymat. Le journal ajoute que les aides financières promises à Ankara pourraient, dans ce cadre, revenir à la Grèce. Pour le Handelsblatt, il faut se résoudre au fait qu’Ankara est désormais un partenaire « imprévisible », tant pour l’UE que pour les Etats-Unis, qui pourraient perdre un allié important dans la lutte anti-terroriste. La « tempête menace » en Turquie affirme pour sa part la Frankfurter Allgemeine Zeitung qui constate que les déclarations du président turc interviennent le même jour que la condamnation à la prison des deux journalistes de Cumhuriyet. Or sans contrepoids à son pouvoir, R.T. Erdoğan pourrait continuer de déstabiliser la Turquie, écrit le journal de Francfort. Mettant dans un même ensemble « le césarisme » d’Erdoğan et les succès de Donald Trump aux Etats-Unis, la Süddeutsche Zeitung s’inquiète de la montée en puissance des populismes qui « menacent les démocraties occidentales ».

  1. France

La filière nucléaire, talon d’Achille de la France selon le Handelsblatt

Le correspondant à Paris du Handelsblatt, Thomas Hanke, rebondit sur la récente affaire touchant Areva pour pointer les « faiblesses » d’une politique nucléaire française refusant les mises en question. Critiquant le manque de transparence dans une filière « de tout temps chasse gardée du pouvoir présidentiel » et où « la frontière entre techniques militaires et civiles a toujours été ténue », le Handelsblatt considère que « l’énergie nucléaire et le système présidentiel ne font pas bon ménage ». Trop longtemps, critique le quotidien, la France s’est reposée sur la conviction que l’énergie nucléaire était l’atout de sa prospérité, négligeant d’investir dans les économies d’énergie et les énergies alternatives. Même après la charge portée par l’ex-directeur financier d’EDF Thomas Piquemal contre le projet trop cher d’EPR en Grande-Bretagne, le ministre de l’Economie Emmanuel Macron, « pourtant connu pour son esprit non-conformiste, continue de faire allégeance » à cette politique en défendant la présence de l’industrie nucléaire française sur le marché britannique, déplore le Handelsblatt, pour qui « quand l’honneur national est en jeu, les évaluations et bilans n’ont plus droit de cité ».

Réformes : « un système encroûté mais une société et une économie qui avancent » (Süddeutsche Zeitung)

La Süddeutsche Zeitung dépeint, dans un éditorial signé de son correspondant économique à Paris, une France à double visage : d’un côté, un système politique et social figé dans l’immobilisme et le passéisme, de l’autre une économie et une société dynamiques au quotidien « utilisant la mondialisation et les avancées de l’ère numérique pour se libérer des structures établies ». Citant en exemple les régions économiques de Nantes et Rennes « où règne le plein-emploi loin des rituels de lutte de classes », notant que dans toute la France, hors de l’attention médiatique, des milliers d’entreprises ont déjà conclu des accords internes visant à réorganiser le travail, et soulignant l’émergence chez les jeunes d’une culture d’entreprise inédite grâce notamment à un vivier de start-ups performantes, la Süddeutsche Zeitung constate, dans une conclusion fataliste, des Français pris dans leurs contradictions entre leur volonté d’aller de l’avant dans leur vie quotidienne et la peur des évolutions politiques et sociales./.