Synthèse de la presse quotidienne
22 juin 2016
Ce document est à usage strictement interne et a été réalisé par l’Ambassade de France en Allemagne
- Le rejet par le Cour constitutionnelle de Karlsruhe des plaintes à l’encontre des opérations monétaires sur titres de la Banque centrale européenne fait les gros titres de la Süddeutsche Zeitung (« Karlsruhe laisse faire le patron de la BCE Mario Draghi ») et de Die Welt (« Karlsruhe comble Draghi et ses opposants »). Les mises en garde du président de la Commission européenne sur la perspective d’un Brexit sont à la Une de la Frankfurter Allgemeine Zeitung (« Juncker : les Britanniques ont besoin de l’UE, l’UE a besoin du pragmatisme britannique ») et du Tagesspiegel (« l’Europe met en garde avant le Brexit – et menace »). Le quotidien des affaires Handelsblatt titre sur le choix du patron de Daimler Dieter Zetsche de transformer son groupe autour du développement de véhicules électriques (« Daimler change de cap »).
- Europe
« Karlsruhe approuve sous condition la politique de la BCE » (FAZ) ; « relaxe pour Draghi » (Tagesspiegel)
Le verdict très attendu du tribunal fédéral constitutionnel validant, sous conditions, le programme de rachat de dette publique adopté en 2012 par la Banque centrale européenne – jamais utilisé à ce jour, rappellent les journaux – est plutôt favorablement accueilli par une grande partie de la presse, soulagée de ce que Karlsruhe n’ait pas adopté une position de blocage dans un contexte européen extrêmement fragilisé. En se ralliant à la décision prise il y a un an par la Cour de justice de l’Union européenne, les juges suprêmes allemands affichent une nouvelle ligne « pro-européenne », s’accordent à constater la Frankfurter Allgemeine Zeitung et la Berliner Zeitung, tandis que la Süddeutsche Zeitung se félicite de ce que « la guerre froide entre Karlsruhe et Luxembourg s’achève, Karlsruhe accepte enfin, d’un geste souverain, la suprématie de décision et d’interprétation de la juridiction supérieure dans les affaires européennes ; c’est un traité de paix pour le bien de l’Europe ». « En fait, le tribunal fédéral constitutionnel a quand même obtenu un succès en poussant la CJUE à encadrer un peu plus sévèrement la BCE, (…) et le message de Karlsruhe est que les juges suprêmes continuent à surveiller l’Europe mais ont modernisé leurs méthodes d’éducation », relativise non sans ironie le quotidien alternatif tageszeitung.
Sur le fond, c’est-à-dire le bien-fondé du programme OMT de la BCE, les éditorialistes ne varient pas et restent fondamentalement opposés à ce qu’ils considèrent, dans leur grande majorité, comme un financement illicite des budgets nationaux par la Banque centrale européenne. « Même avec le feu vert des juristes, le problème politique reste entier, maintenir artificiellement les taux d’intérêt très bas est une catastrophe pour les épargnants et encourage les gouvernements à continuer à s’endetter », fait valoir le tabloïd Bild, pour qui Karlsruhe a « autorisé la BCE à venir au secours des Etats endettés ». Pour le Handelsblatt, la question reste posée de la légitimité de la BCE à pratiquer une telle politique : « la question est de savoir si une administration – car la BCE n’est rien d’autre – a le droit de transférer des risques financiers de plusieurs milliards d’un Etat membre à un autre sans que des parlementaires à la légitimité démocratique n’aient voix au chapitre (…). Ce ne sont pas des juristes qui arrêteront Mario Draghi, nous avons besoin d’un débat politique sur le mandat de la BCE », estime le Handelsblatt. « Une salle de tribunal n’est pas le lieu pour débattre des mesures de crise de la BCE, l’Europe et ses citoyens de plus en plus eurosceptiques ont besoin d’un débat politique sur l’avenir du continent », renchérit Die Welt.
Brexit / interviews Jean-Claude Juncker et de Martin Schulz
Dans un entretien accordé à la Frankfurter Allgemeine Zeitung lors de son déplacement à Athènes, le président de la Commission européenne a déclaré « espérer que les Britanniques se laisseront guider par leur pragmatisme, car c’est une vertu britannique. Les Britanniques ont besoin de l’UE et l’UE a besoin du pragmatisme britannique ». Jean-Claude Juncker se justifie de s’être peu exprimé sur le sujet « car j’avais l’impression que cela aurait pu être ressenti comme une provocation si la commission européenne se mêlait de la campagne électorale britannique du référendum ». A la question de savoir si le préambule du traité de Lisbonne, qui fixe l’objectif d’une « union toujours plus étroite des peuples européens », est une erreur historique, le président de la commission répond qu’« on peut être en définitive membre de l’UE sans pour autant sur chaque question revendiquer une union toujours plus étroite » : « l’avenir européen n’est pas forcément ‘plus d’Europe’ mais une meilleure Europe », explique-t-il.
Dans une interview au Tagesspiegel, le président du parlement européen répète qu’un vote d’une majorité britannique en faveur du Brexit devrait être suivi de négociations rapides de Londres pour une sortie de l’Union européenne, et critique vivement les conservateurs britanniques pour « avoir pris en otage un continent entier dans une lutte de pouvoir interne ».
Alors que les avant-papiers s’épuisent en conjectures et en mises en garde contre un Brexit avec force tribunes et interviews d’économistes, de chefs d’entreprises ou encore d’artistes, certains articles s’inquiètent d’un possible effet d’entraînement sur les camps eurosceptiques des autres pays européens d’une décision des Britanniques en faveur du « Leave ».
« Déjà 50 000 réfugiés arrivés en Italie » (Bild)
Sans citer ses sources, le tabloïd signale à sa une que depuis le début de l’année 50 000 réfugiés, essentiellement originaires de nombreux pays africains, ont rejoint l’Italie par voie maritime.
Sous le titre « des investissements européens pour freiner le flux de réfugiés », la Süddeutsche Zeitung rapporte la teneur d’un entretien que lui a accordé, ainsi qu’à six autres journaux européens, le président de la BEI, Werner Hoyer. « La banque européenne d’investissement propose de financer par un doublement des sommes allouées jusqu’ici des projets en dehors de l’Union européenne, à savoir six milliards d’euros supplémentaires dans les cinq ans à venir pour lutter contre les causes de l’exode », indique le quotidien de Munich qui cite comme bénéficiaires de ces investissements la Jordanie, le Liban, l’Egypte et le Maghreb, mais aussi la Serbie et l’Albanie. Selon le journal, la BEI saisira l’occasion du Conseil européen de la semaine prochaine pour appeler les 28 à augmenter leurs financements en ce sens.
- Europe/International
« L’UE prolonge les sanctions à l’encontre de la Russie » (Frankfurter Allgemeine Zeitung)
Faisant état de l’approbation par les ambassadeurs des 28 pays membres de l’Union européenne de la reconduite pour six mois des sanctions visant la Russie, décision qui devrait être formalisée lors du Conseil européen de la semaine prochaine, la FAZ indique que le président français, le Ministre et son homologue allemand Frank-Walter Steinmeier avaient en amont « évoqué la possibilité d’un assouplissement des sanctions tout en insistant sur l’importance de la mise en application des accords de Minsk pour surmonter le conflit dans l’est de l’Ukraine ».
Visiblement soulagée, la FAZ qualifie cette décision de « signal important » car elle témoigne de « l’unité » qui a prévalu au sein de l’Union européenne qui traverse des temps agités et démontre aussi la « détermination » des Européens face à la Russie. Moins optimiste, le Handelsblatt estime que cette démonstration d’unité sur fond de menace d’un Brexit britannique n’est en réalité que de façade et que la dispute qui divise les Européens sur la question des sanctions n’est qu’ajournée. Estimant, tout comme Die Welt, que la politique des sanctions n’a pas vraiment atteint son but qui est de rendre le président Poutine plus conciliant sur le dossier ukrainien, le quotidien conclut sur l’idée qu’un assouplissement des sanctions mériterait d’être tenté.
Le Handelsblatt signale par ailleurs que le vice-chancelier et président du SPD se rendra lundi à Moscou où il rencontrera le président Poutine. Jugeant que cette initiative apparaît comme une preuve supplémentaire de la volonté du SPD de se démarquer de son partenaire de coalition CDU, le journal fait état de « grincements de dents » dans les rangs conservateurs. Ouvrant son édition du jour sur « le 22 juin, date oubliée » de l’histoire, le quotidien alternatif de gauche tageszeitung évoque le 75ème anniversaire de l’invasion de la Russie par l’Allemagne nazie et signale la tenue d’une cérémonie de commémoration, sans représentant du gouvernement fédéral, au pied du mémorial soviétique situé dans le Tiergarten. Le journal saisit cette occasion pour saluer la volonté manifestée par MM. Gabriel et Steinmeier de renouer le dialogue avec la Russie./.