Synthèse de la presse quotidienne
19 juillet 2016
Ce document est à usage strictement interne et a été réalisé par l’Ambassade de France en Allemagne
- Les réactions à la situation en Turquie font la une de la plupart des journaux : « Berlin et Bruxelles mettent en garde Erdogan contre une réintroduction de la peine de mort » (Frankfurter Allgemeine Zeitung), « l’Europe met en garde Erdogan contre la peine de mort » (Süddeutsche Zeitung), « Merkel qualifie la peine de mort en Turquie de la ligne rouge » (Die Welt), « avec la peine de mort, pas d’adhésion à l’UE » (Berliner Zeitung). Le Tagesspiegel titre sur le dopage en Russie et le risque que le pays soit exclu des Jeux Olympiques. Le quotidien économique Handelsblatt s’intéresse au changement de stratégie du constructeur automobile Audi qui va concentrer ses investissements sur l’électromobilité et la conduite autonome (« la révolution Audi »).
Seul le tabloïd Bild fait état en première page de l’attaque survenue hier soir dans un train régional aux alentours de Würzburg (Bavière) où un demandeur d’asile afghan de 17 ans a attaqué à la hache et au couteau et grièvement blessé quatre passagers avant de prendre la fuite et d’être abattu par la police. La presse en ligne signale qu’après la découverte dans la chambre du jeune homme d’un drapeau de Daech, l’enquête s’oriente vers une piste terroriste.
- Europe
Conseil affaires étrangères / première participation de Boris Johnson
Le nouveau chef de la diplomatie britannique et chef de file des partisans du Brexit, Boris Johnson, était en terrain connu à Bruxelles où, fils d’un diplomate européen, il y a été scolarisé avant d’y être un correspondant de presse certes peu soucieux de précision journalistique mais parfaitement au fait du fonctionnement des institutions européennes, font valoir les journaux. « C’est le retour du fils mal élevé », titre la FAZ ; pour sa première rencontre avec ses homologues européens, Boris Johnson s’est toutefois « voulu sérieux » (FAZ), « conciliant » (Süddeutsche Zeitung) ou encore « docile » (Die Welt), déclarant à son arrivée à Bruxelles que si le Royaume-Uni quittait l’UE, il ne tournait pas pour autant le dos à l’Europe dans laquelle Londres entendait continuer à jouer un rôle majeur. Ce profil bas lui a valu d’être accueilli « avec flegme » (Bild) par les ministres européens des affaires étrangères, notamment par Jean-Marc Ayrault qui l’avait auparavant sévèrement critiqué, relèvent les quotidiens sans autre commentaire sur le fond.
« Bruxelles veut sauver les producteurs laitiers » (Tagesspiegel)
Le ministre fédéral de l’agriculture, Christian Schmidt (CSU), s’est déclaré satisfait de la volonté de la Commission européenne de débloquer une nouvelle aide de 500 millions d’euros pour le secteur laitier, saluant les 58 millions d’euros supplémentaires dont vont bénéficier les producteurs allemand, mais aussi le fait qu’une partie de l’aide est conditionnée à une maîtrise des quantités de production, rapporte le Tagesspiegel. Christian Schmidt a annoncé vouloir engager dès son retour à Berlin des discussions avec le ministre allemand des finances pour compléter ces aides par des subventions nationales, indiquent les journaux. Le ministre de l’agriculture de Basse-Saxe, Christian Meyer (Verts) s’est montré au contraire déçu du montant des aides bruxelloises au regard des pertes individuelles des producteurs, notent le Tagesspiegel et Die Welt. La Süddeutsche Zeitung pointe le fait que l’Allemagne a perdu l’occasion d’influer sur la politique bruxelloise en raison d’un désaccord au niveau des Länder : alors que la plupart des gouvernements régionaux plaidaient en faveur d’une réactivation limitée dans le temps des quotas laitiers, le ministre FDP de l’agriculture de Rhénanie-Palatinat y a mis son veto, déplore le journal.
- Turquie-Europe
« Merkel qualifie la peine de mort en Turquie de ligne rouge » (Die Welt)
Sous ce titre, Die Welt fait état de l’entretien téléphonique hier entre la chancelière et le président turc. Le journal indique qu’elle a demandé à M. Erdogan de « s’en tenir aux principes de l’Etat de droit » et lui a fait part de sa « vive inquiétude » suite à la vague d’arrestations et de suspensions dans l’armée, la police et la justice. Relayant également les inquiétudes allemandes, les autres quotidiens font état des propos du porte-parole du gouvernement fédéral selon lequel « une réintroduction de la peine de mort en Turquie signifierait la fin des négociations d’adhésion à l’Union européenne ».
Plus qu’hier, l’ensemble des journaux s’inquiètent en outre des possibles troubles au sein de la communauté turque d’Allemagne entre partisans et adversaires d’Erdogan. Ainsi, le tabloïd Bild fait état de dégradations subies par des institutions turques critiques envers le régime d’Ankara, ainsi que d’appels à recourir à la violence envers les sympathisants de Fethullah Gülen, et estime dans son commentaire que « les limites ont été franchies ». Condamnant de telles violences, le journal appelle les responsables politiques allemands à réaffirmer clairement que la violence n’a pas sa place en Allemagne. La Süddeutsche Zeitung souligne que les Turcs d’Allemagne se retrouvent divisés par la tentative de putsch avorté et que nombre d’entre eux sont « en proie à un conflit de loyauté » entre l’Allemagne où ils vivent et dont ils respectent les principes, et leur soutien à la démocratie turque avec un « politicien autoritaire » à sa tête. La FAZ indique à cet égard que si 60% des Turcs d’Allemagne ont voté en 2015 pour l’AKP (soit 10% de plus qu’en Turquie), ils sont aussi plus nombreux à voter pour le parti pro-kurde HDP (15,9% contre 10,8% en Turquie).
De la tonalité éditoriale se dégage aujourd’hui l’idée qu’en dépit de leurs mises en garde, les Européens disposent de peu d’atouts pour faire pression sur les autorités turques. La FAZ rappelle ainsi que la Turquie est un allié majeur de l’OTAN qui garantit la sécurité du flanc sud de l’Alliance et qu’elle constitue également un partenaire de premier plan en matière de politique migratoire. Comme le fait valoir la Berliner Zeitung, « Berlin et ses partenaires de l’OTAN ont à l’évidence plus besoin d’Erdogan que lui n’a besoin d’eux ». Pour la tageszeitung qui s’inquiète de l’avenir de l’accord migratoire avec la Turquie et se montre critique envers la volonté d’Angela Merkel de maintenir cet accord en dépit des dérives autoritaires d’Erdogan, « ce qui est actuellement en jeu ce n’est rien moins que la crédibilité de la politique de la chancelière », laquelle a fait savoir hier qu’il convenait de traiter séparément le dossier migratoire des événements survenus en Turquie. Tonalité similaire du côté du Handelsblatt qui s’interroge dans les termes suivants : combien de longanimité la chancelière et l’UE peuvent-elles se permettre sans ruiner leur crédibilité en matière de droits fondamentaux et de respect de l’Etat de droit ? ».
- France
« Atmosphère empoisonnée » (Tagesspiegel) dans la classe politique après l’attentat de Nice
L’hommage rendu à Nice aux victimes de l’attaque terroriste est illustré dans certains quotidiens par des images de la foule rassemblée pour la « minute de silence sur la plage de Nice » (Die Welt), soulignant parfois, comme le Tagesspiegel, que « les Français se tiennent debout ensemble ». D’autres, telle la FAZ, soulignent que la cérémonie de Nice a été « troublée » et le Premier ministre « hué » par des passants. Le quotidien de Francfort fait état d’un sondage Ifop selon lequel 67% des Français ne feraient plus confiance au gouvernement dans la lutte antiterroriste, et que 81% d’entre eux seraient prêts à accepter de nouvelles restrictions de leurs libertés individuelles si cela contribuait à renforcer la sécurité.
La plupart des commentateurs s’inquiètent du procès, qu’ils jugent peu digne, voire de mauvais goût, fait par les ténors des Républicains au président de la République et au Premier ministre dans le débat sur les moyens sécuritaires contre le terrorisme. « Les islamistes peuvent se réjouir d’une campagne électorale grossière, les Républicains n’ont plus aucune retenue et se livrent avec le Front national à la surenchère pour savoir qui sera le plus dur », déplore la Süddeutsche Zeitung en soulignant que « les mesures martiales, tortures, prisons secrètes et guerres n’ont pas préservé les Etats-Unis d’attaques telles que celle de San Bernardino ». « Une attaque comme celle de Nice ne peut être empêchée ni par l’état d’urgence, ni par la déchéance de nationalité, ni par le rappel de réservistes, ni par la présence massive de policiers et de militaires et même pas par des caméras de surveillance dont la ville de Nice est particulièrement truffée », fait également valoir le conservateur Die Welt qui s’en prend en particulier à MM. Sarkozy et Juppé : « on peut reprocher au gouvernement français et à François Hollande d’avoir échoué à beaucoup d’égards, mais ils ne sont pas responsables du terrorisme. Même un Etat policier serait impuissant devant ces nouvelles formes de terrorisme ». Le Tagesspiegel n’est pas en reste pour critiquer la « démagogie de la droite », estimant que les mesures sécuritaires proposées par le président des Républicains « n’auraient eu aucun effet » pour arrêter le terroriste de Nice dans son entreprise, et que N. Sarkozy « veut oublier que le gouvernement a fermé des lieux de culte et expulsé 80 imams radicaux, alors qu’il avait au contraire réduit les effectifs de police et de gendarmerie que son successeur a ensuite augmentés »./.