Synthèse de la presse quotidienne
26 juillet 2016
Ce document est à usage strictement interne et a été réalisé par l’Ambassade de France en Allemagne
- Après Munich hier, c’est aujourd’hui Ansbach qui fait les gros titres des quotidiens. « Premier attentat suicide en Allemagne », titre la Süddeutsche Zeitung. Citant les propos du ministre bavarois de l’intérieur, la Frankfurter Allgemeine Zeitung titre : « Herrmann : l’attentat d’Ansbach avait des motivations islamistes ». « L’auteur de l’attentat d’Ansbach voulait se venger des Allemands », affiche à sa une Die Welt, tandis que le Tagesspiegel titre « jours d’incertitude (Reutlingen, Ansbach Munich) ». Comme à son accoutumée, le quotidien économique Handelsblatt se distingue en s’intéressant à la crise qui frappe les grands groupes européens cotés en bourse dont la rentabilité est en chute par rapport à celle de leurs concurrents américains, conséquence, selon le journal, du ralentissement économique mondial et du vote en faveur du Brexit.
- Allemagne
« Premier attentat suicide en Allemagne » (Süddeutsche Zeitung)
Dans leurs comptes rendus de l’attentat suicide à l’explosif survenu avant-hier soir à Ansbach (Bavière), blessant 15 personnes et causant la mort de l’auteur de l’attentat, les journaux se font l’écho des propos du ministre bavarois de l’intérieur, Joachim Herrmann (CSU), et de son homologue fédéral, Thomas de Maizière (CDU), qui ont évoqué la piste islamiste. La presse indique qu’une vidéo retrouvée sur l’un des téléphones portables de l’auteur de l’attentat, un Syrien de 27 ans, dans laquelle il profère des menaces contre les Allemands, permet d’étayer cette thèse. Si Daech a revendiqué l’attentat, l’enquête permettra de déterminer si le kamikaze avait ou non des liens avec une organisation terroriste. « Actuellement, 59 enquêtes sont en cours visant des demandeurs d’asile soupçonnés d’appartenir à un réseau islamiste », indique le Handelsblatt de source policière.
Evoquant une « semaine sanglante pour l’Allemagne », marquée par l’attaque de Würzburg, puis la fusillade de Munich et maintenant l’attentat à la bombe d’Ansbach, le tabloïd Bild s’interroge sur la nécessité ou non d’un nouveau « concept sécuritaire » et fait état de réflexions en cours au sein du gouvernement fédéral pour faire appel à des réservistes en renfort des forces de police.
« Ces attaques sanglantes vont-elles avoir des répercussions sur l’acceptation par la population allemande de la politique d’accueil des réfugiés ? », s’interrogent également, à l’instar de la Berliner Zeitung, plusieurs journaux. Le quotidien de Berlin note que le ministre-président de Bavière réclame à présent plus de fermeté en matière d’expulsion des réfugiés dont la demande d’asile aurait été refusée (ce qui était le cas du Syrien à Ansbach). « A la chancellerie fédérale, on redoute une relance du débat sur la politique migratoire », souligne la Süddeutsche Zeitung. Le Tagesspiegel entrevoit des temps difficiles avec la recherche d’un fragile équilibre entre la culture d’accueil et la nécessité de se prémunir contre le risque terroriste. « Nous ne devons pas porter de soupçon généralisé contre les réfugiés », a marqué le ministre de l’intérieur, Thomas de Maizière, dont les propos sont largement repris par l’ensemble de la presse.
Dans son commentaire du jour, le tabloïd Bild se veut optimiste et voit l’Allemagne « en mesure de faire face » car « l’Etat y fonctionne mieux qu’ailleurs et parce que le cas de Munich a montré que dans une situation extrême les citoyens sont prêts à s’entraider. « Ce qui devait arriver arriva », estime toutefois le journal, « l’Allemagne ne pouvait pas rester indéfiniment une oasis de paix ».
Soulignant que dans trois cas (Würzburg, Reutlingen, Ansbach), les attaques sont le fait de réfugiés, plusieurs quotidiens estiment que l’on est en droit de se poser des questions sur le bon fonctionnement de la politique d’asile en Allemagne. C’est le cas notamment du Handelsblatt qui juge « imprudente » la manière dont au plus fort de la crise migratoire des réfugiés ont pu entrer en Allemagne sans faire l’objet du moindre contrôle et sans avoir été enregistrés. Le cas d’Ansbach illustre en outre les déficits de la politique européenne, poursuit le quotidien, car le Syrien qui n’était que « toléré » sur le sol allemand aurait dû être renvoyé en Bulgarie où il avait déposé sa première demande d’asile. « Il n’est plus possible de continuer comme si de rien n’était », estime Die Welt qui appelle également à davantage d’ordre et de fermeté.
Par ailleurs, la presse relève que dans le cas de Reutlingen (où une Polonaise de 45 ans a succombé à des coups de couteau portés par un Syrien de 21 ans), il s’agissait bien d’un crime passionnel. Les journaux indiquent que l’auteur des faits était connu de la police pour divers délits, dont des actes de violence.
- International
Turquie : « Ankara annonce des ‘purges’ à tous les niveaux » (FAZ)
Dans une interview exclusive à l’ARD diffusée hier soir, le président Erdogan revient sur la tentative de putsch et ses conséquences en Turquie. Il fait valoir que toutes les mesures prises en réponse à ce putsch avorté l’ont été dans le cadre de l’Etat de droit et le respect de la justice. Concernant l’instauration pour trois mois de l’état d’urgence, il indique qu’en cas de « normalisation », une prolongation ne sera pas nécessaire.
Rappelant que la Turquie « combat le terrorisme depuis près de quarante ans », le président Erdogan critique le manque d’action de l’Allemagne où les « terroristes » du PKK « peuvent se mouvoir en toute impunité ».
Le président turc adresse aussi de vives critiques à l’Union européenne qui « n’a pas tenu ses promesses » concernant l’accord migratoire. Sur les trois milliards d’euros promis, « un à deux millions d’euros seulement sont arrivés » en Turquie, selon M. Erdogan qui évoque des « sommes symboliques ». Il déplore en outre l’absence de libéralisation du régime des visas alors que les Européens lui avaient promis que ce serait le cas « début juillet » avant d’affirmer que « les promesses doivent être tenues, des deux côtés ».
L’ensemble des journaux signalent aujourd’hui la poursuite des purges en Turquie, dans la diplomatie où des ambassadeurs en lien avec le mouvement Gülen vont être suspendus, selon le ministre turc des affaires étrangères cité par la FAZ, mais aussi chez Turkish Airlines ou encore dans les télécommunications. Quarante-deux journalistes turcs sont également sous le coup d’un mandat d’arrêt pour leur proximité supposée avec le mouvement Gülen, note la Süddeutsche Zeitung. Le Tagesspiegel constate que face aux interpellations d’Amnesty International sur les cas de torture dans des prisons « la Turquie se tait ».
En Basse-Saxe, signale par ailleurs la FAZ, l’opposition CDU exige que la confédération islamique d’Allemagne (Ditib), qui s’apprête à signer un contrat avec le gouvernement SPD-Verts, « prouve de façon claire » son indépendance par rapport aux autorités religieuses turques. Qualifiant la Ditib de « bras armé » des autorités religieuses turques de tutelle, la FAZ avertit dans un éditorial : « pas de contrat vaut mieux qu’un mauvais contrat ». La tageszeitung fait de son côté état des mises en garde du ministère allemand des affaires étrangères à l’intention des binationaux germano-turcs qui, dans le cadre de leurs déplacements en Turquie, risquent de ne pas pouvoir bénéficier de la protection consulaire.
Décision du CIO : « les Jeux olympiques du cynisme » (Frankfurter Allgemeine Zeitung)
La presse est scandalisée par la décision du CIO de ne pas exclure le comité olympique russe des JO 2016 malgré un dopage d’Etat avéré. « Quelle farce ! », grince le Handelsblatt qui ne trouve pas de mots assez durs pour condamner le président du CIO, l’Allemand Thomas Bach, « dont le seul souci est de ménager politiquement son mentor Vladimir Poutine ». « La médaille d’or du cynisme va à Thomas Bach pour la brutalité et la froideur avec laquelle il a exclu des Jeux la lanceuse d’alerte russe », s’indigne la Süddeutsche Zeitung. « Poutine est le véritable maître de l’olympisme, il peut être fier de son ami allemand, dont on aimerait bien savoir pourquoi il abandonne jusqu’à la dernière parcelle de crédibilité pour un sport russe à la botte des services secrets et quelles forces mystérieuses le lient de manière aussi inextricable à Poutine & co, visiblement à n’importe quel prix », s’étouffe le commentateur. « Une décision honteuse ! », juge la rédaction sportive du tabloïd Bild qui a décidé de ne pas afficher les médailles russes dans les tableaux des médailles des JO de Rio. La Frankfurter Allgemeine Zeitung se désole : « bien sûr que par le passé le dopage était présent et les manigances politiques non absentes des JO, mais il était acquis qu’il s’agissait d’abus contraires à l’esprit olympique. Depuis dimanche, les Jeux ont perdu leur sens profond, leur propre éthique ; en décidant de se plier au pouvoir russe et de tolérer un pays qui salit avec une énergie criminelle et sans aucun scrupule l’idée olympique, le président du CIO, Thomas Bach, trahit l’essentiel, ce qui différenciait les Jeux des autres événements sportifs, à savoir l’honneur d’avoir participé et la fierté de l’avoir fait honnêtement ». Die Welt conclut à « une occasion ratée de contrer les agissements du président russe sur un plan non militaire et non politique » : « Poutine peut-il donc faire ce qu’il veut et il y aura toujours des responsables compréhensifs pour justifier et tolérer ses activités ? » s’interroge le journal en ciblant une fois de plus les « Russlandversteher », ces « amis de la Russie » que ni l’annexion de la Crimée, ni l’intervention russe en Syrie n’ont découragé d’appeler à comprendre les motivations du Kremlin et à lever partiellement les sanctions contre Moscou./.