Aujourd’hui en Allemagne

Synthèse de la presse quotidienne

29 juillet 2016

Ce document est à usage strictement interne et a été réalisé par l’Ambassade de France en Allemagne

  1. L’intervention de la chancelière, hier, sous forme de conférence de presse, fait les gros titres de la plupart des journaux. « Nous allons y arriver, malgré tout », « Merkel en reste à son ‘on va y arriver’ », titrent la Süddeutsche Zeitung et la Berliner Zeitung  en reprenant la phrase désormais célèbre de Mme Merkel, prononcée l’été dernier au plus fort de la crise migratoire. « Du 100% Merkel », affiche à la une la tageszeitung.  « Les criminels se moquent du pays qui les a accueillis », titre Die Welt qui cite l’un des propos de la chancelière. Le Tagesspiegel met en exergue que « pour la chancelière, il s’agit d’une épreuve historique ».  La Frankfurter Allgemeine Zeitung et le Handelsblatt  se démarquent en titrant pour le premier : « la Turquie exige de Berlin l’extradition des sympathisants de Gülen » et en s’intéressant, pour le second, aux « chiffres secrets d’Aldi », le discounter, qui affiche une croissance de 3%, dévoilant pour la première fois des éléments chiffrés sur sa situation économique.
  2. Allemagne

Conférence de presse de la chancelière : « nous allons y arriver, malgré tout » (Süddeutsche Zeitung)

Les journaux s’accordent à constater que la chancelière n’a pas dévié de sa ligne, « tient le cap » (Bild) et reste « fidèle à elle-même » (Handelsblatt). Pour la Süddeutsche Zeitung qui voit en Mme Merkel « la reine froide de la raison pratique », « la chancelière demeure fidèle à sa conviction que l’Allemagne devait accueillir des réfugiés et qu’elle sera à la hauteur de la tâche que constituent l’accueil et l’intégration de ceux-ci ». Le quotidien déplore néanmoins que la chancelière n’a pas jugé utile d’apporter de réponse au doute, à la peur et à la colère qui se sont fait jour depuis la série d’attaques survenues en Allemagne. Le fait est que Mme Merkel n’a pas de concurrent sérieux à redouter, ni dans le camp conservateur, ni dans l’opposition », reconnaît le journal. Plusieurs quotidiens établissent un parallèle entre la chancelière et Helmut Schmidt, soulignant que si Mme Merkel n’a pas le brio oratoire de son prédécesseur, comme lui face aux violences de la RAF en 1977, elle affiche la même maîtrise de la situation, se montre « imperturbable » (Berliner Zeitung), semblable au « rocher dans la tempête ». Evoquant également cette « volonté tranquille » que les Allemands apprécient chez leurs responsables politiques, Die Welt ajoute qu’il suffit de regarder les résultats des sondages pour conclure qui, de Mme Merkel ou de M. Hollande, « prompt à se déplacer sur les lieux de l’attentat », convainc le plus. Sous le titre « l’antipopuliste », le quotidien alternatif de gauche tageszeitung constate que le style de la chancelière est en phase avec le message qu’elle entend faire passer, à savoir ne pas paniquer, ne pas sur-réagir face à la situation. Approuvant lui aussi l’attitude jusqu’ici en retrait de la chancelière, le Handelsblatt s’interroge toutefois sur les limites du pragmatisme de Mme Merkel en « des temps qui appellent de grands gestes, de grands mots ou de grandes annonces ». La FAZ émet aussi de sérieux doutes sur la stratégie esquissée par la chancelière qui a annoncé un plan en neuf points pour renforcer la sécurité. Cela sera-t-il suffisant sachant que la plupart des mesures ne sont pas nouvelles, s’interroge le journal. Ouvertement critique, le Tagesspiegel juge lui aussi ce plan insuffisant et juge que la chancelière, trop tactique face à l’urgence de la situation, n’a aucune stratégie. De l’avis du tabloïd Bild, le mantra de la chancelière (« on va y arriver ») ne peut fonctionner que si certains problèmes patents, comme l’expulsion de réfugiés condamnés par la justice, sont résolus. Rendez-vous est donné à l’été prochain, conclut le journal, lorsque les Allemands seront amenés à décider par eux-mêmes si la chancelière a tenu ses engagements et si on y est effectivement arrivé.

  1. International

« La Turquie exige de Berlin l’extradition des sympathisants de Gülen » (FAZ)

Sous ce titre, le quotidien de Francfort fait état des exigences formulées par le ministre turc des affaires étrangères et relève que lors de sa conférence de presse la chancelière s’est montrée réservée, indiquant que l’Allemagne doit « agir conformément aux principes d’un Etat de droit ». Le journal publie en outre un entretien croisé avec le ministre-président du Bade-Wurtemberg, Winfried Kretschmann (Verts), et le co-président des Verts, Cem Özdemir. M. Kretschmann indique que le consulat général turc à Stuttgart a fait parvenir à son gouvernement un courrier dans lequel il demande de « procéder à une nouvelle évaluation et à un examen » des institutions, écoles et associations supposées proches du mouvement Gülen dans son Land. « Nous n’allons évidemment pas le faire », indique M.  Kretschmann qui, tout comme M. Özdemir, appelle à la « suspension immédiate » des négociations d’adhésion de la Turquie à l’UE, sans toutefois définitivement les abandonner.

Dans un entretien avec la Süddeutsche Zeitung, le commissaire européen à l’élargissement, Johannes Hahn, appelle à ce que la situation actuelle en Turquie fasse l’objet d’un « processus d’observation » par l’OSCE. Estimant que l’accord sur la politique migratoire entre la Turquie et l’UE n’est pas en danger, il répond positivement à l’idée de lier le respect de cet accord à la question de l’adhésion à l’UE.

La Süddeutsche Zeitung rapporte par ailleurs que l’ambassadeur d’Allemagne en Turquie « est mis sur la touche » de façon systématique et n’obtient plus de rendez-vous auprès des autorités turques depuis le vote du Bundestag reconnaissant le génocide arménien.

  1. France

Attaque terroriste de Saint-Etienne-du Rouvray / lutte antiterroriste

La presse rend compte des échanges entre le gouvernement et l’opposition sur le renforcement de l’arsenal répressif dans la lutte antiterroriste et relaie l’annonce par le président de la République de la constitution d’une Garde nationale à partir de la réserve opérationnelle déjà existante. Les journaux font par ailleurs état de l’identification du second terroriste de l’attaque de Saint-Etienne-du-Rouvray.

Le correspondant du Handelsblatt, Thomas Hanke, s’inquiète de la fragilité de la cohésion sociale en France, où une violence sous-jacente risque d’éclater au premier conflit, les responsables politiques locaux déléguant, selon lui, aux forces de l’ordre la résolution de conflits qui passe par le dialogue. Une fragilité du tissu social qui ferait de la France une cible de choix pour les terroristes, avance le Handelsblatt qui cite une mise en garde récente du chef de la DGSI, Patrick Calvar, selon lequel la France serait « au bord de la guerre civile ». « On a certes besoin de la police pour lutter contre le terrorisme, mais celle-ci ne saurait ressouder les fractures au sein de la société », fait valoir T. Hanke.

Le débat sur le traitement médiatique réservé aux auteurs d’attentats terroristes trouve un large écho dans les quotidiens, qui s’interrogent eux-mêmes sur l’équilibre nécessaire entre la nécessité d’informer et le risque de starification des auteurs d’attaques terroristes ou de tueries. « Les médias français ne veulent plus montrer de photos de terroristes, le point de vue est différent en Allemagne », souligne le Tagesspiegel. Pour le quotidien alternatif tageszeitung, ne pas publier de photos de terroristes, comme Le Monde, ou pixelliser l’image, comme le faisait hier l’hebdomadaire Die Zeit, n’empêchera jamais de jeunes djihadistes ou déséquilibrés violents de passer à l’acte (« ils ne lisent ni Le Monde ni Die Zeit », ironise le journal), mais risque au contraire, comme toute prohibition, de renforcer les tendances voyeuristes sur les réseaux sociaux et d’attiser les théories du complot./.