Les DRH comprennent-ils les 20-30 ans ?

Le baromètre de l’Observatoire Cegos « Les Millenials et le travail » publié mardi 25 avril a interrogé les salariés de moins de 30 ans sur l’entreprise.

L’observatoire Cegos, spécialiste de la formation, a mené au mois de mars une enquête auprès d’un millier de jeunes salariés du secteur privé, âgés de 20 à 30 ans, dont un tiers exerce déjà un rôle de manageur, et de 175 DRH. Ses résultats révèlent un fort décalage entre le jugement que les jeunes portent sur le travail et l’idée que s’en font les responsables des ressources humaines.

Au-delà du salaire, dont les DRH ont bien compris l’enjeu, ce qui attire les jeunes lors de leur première embauche c’est d’abord le contenu du poste (54 %) puis sa stabilité (53 %) et non pas les conditions de travail comme le croient 58 % des responsables RH interrogés.

Ecart de perception

Depuis 2012, le but du travail ne change pas : les jeunes travaillent d’abord pour gagner de l’argent (93 %), puis pour s’épanouir (56 %), et de plus en plus pour « développer leurs connaissances et leurs compétences ». L’importance de l’employabilité recueille 16 points de plus qu’il y a cinq ans lorsque la question a été posée aux jeunes salariés pour l’édition 2012 du baromètre Cegos (56 % contre 40 %). Et la place de l’argent a pris de l’ampleur dans leurs priorités par rapport à 2012.

« Ces jeunes ont parfaitement intégré la nouvelle normalité du travail, commente Christophe Perilhou, le directeur d’activité de Cegos, sans doute plus que les RH ». Ils considèrent le concept de flexibilité comme pertinent, mais bien moins que ce qu’imaginent les responsables des ressources humaines.

L’écart de perception s’accroît sur les politiques développées par l’entreprise pour recruter et fidéliser les jeunes. Seuls 42 % des jeunes estiment qu’elles sont appropriées tandis que 80 % des responsables des ressources humaines croient qu’elles sont jugées efficaces. 49 % des jeunes estiment aussi que l’offre de formation ne répond pas aux enjeux de développement, tandis que 83 % des DRH croyaient leur politique approuvée.

De fortes attentes

Enfin, les jeunes salariés interrogés ont aussi une image de l’entreprise plus positive que ne se l’imaginent les DRH, la qualifiant « engageante », « ouverte », voire « chaleureuse ».

Malgré ce déphasage entre les jeunes et les DRH, les salariés de moins de 30 ans ne sont pas pour autant en rupture avec leurs manageurs. Ils ont au contraire de fortes attentes à leur égard, pour toujours plus d’écoute et d’empathie. « La capacité à être à la fois efficace et bienveillant est de plus en plus appréciée, note M. Perilhou. L’objectif est de réussir ensemble le pari de l’intelligence collective face aux besoins d’adaptabilité ».

Le management a pris une place considérable à leurs yeux. Promoteurs de l’entreprise, les jeunes salariés sont ouverts à l’idée de la quitter rapidement. 48 % des jeunes interrogés sont prêts à partir dans l’année, contre une moyenne de 19 % des salariés des grandes entreprises. Et indépendamment des questions d’argent, ils affirment que c’est d’abord « pour un meilleur management » qu’ils changeraient d’employeur. Une bonne raison pour l’entreprise d’améliorer la connaissance que les responsables des ressources humaines peuvent avoir des jeunes salariés.

Méthodologie de l’étude : Les 1 043 jeunes de 20 à 30 ans et les 175 DRH interrogés en mars travaillent dans des entreprises privées d’au moins 100 salariés. Concernant les jeunes, 68 % ont 20 à 25 ans et 32 % de 26 à 30 ; 49 % sont des hommes et 51 % des femmes ; 56 % sont employés, 22 % cadres, 13 % de profession intermédiaire et 9 % ouvriers. Ils travaillent dans des entreprises qui pour 53 % d’entre elles comptent plus de 500 collaborateurs. Les responsables de ressources humaines (DRH et RRH) sont à 50 % des hommes, 29 % ont 20 à 45 ans et 71 % de 46 à 68 ans ; 72 % sont en Ile-de-France ; 54 % sont RRH et 46 % DRH. Enfin, 63 % des entreprises où ils travaillent comptent entre 100 et 500 collaborateurs.

  • Journaliste en charge de l’emploi et du management, Service Economie, et responsable du semestriel Le Monde-Campus

Le Monde 27/04/2017