Rome étudie une redevance sur les multinationales du Net

Un an après l’abandon d’un projet de « Google tax », Matteo Renzi réfléchit à une redevance de 25 % sur les revenus réels des agrégateurs en Italie.

La « Google tax » à l’italienne est de retour, mais dans une version élargie. Un an après avoir abandonné le projet de taxe sur les moteurs de recherche proposé par son prédécesseur, Enrico Letta, pour cause d’avis contraire de la Commission européenne, le gouvernement de Matteo Renzi réfléchit à un dispositif pour combattre la tactique d’« évitement fiscal » des géants de l’Internet. Principal promoteur du projet, le sous-secrétaire à l’Economie, Enrico Zanetti, a confirmé, vendredi, les grandes lignes du dispositif à l’agence Reuters : les agrégateurs se verront imposer une retenue à la source de 25 % sur leurs revenus réels perçus en Italie, à moins qu’ils ne décident d’opter pour la création d’une « organisation stable » ayant ses propres revenus imposables dans le pays.

En application à l’automne

« Il est raisonnable de penser que l’on puisse encaisser quelques milliards d’euros en plus de recettes fiscales », a expliqué Enrico Zanetti, en ajoutant qu’« il va de soi que sera reconnu [aux opérateurs] un crédit d’impôt à faire valoir dans le pays de résidence fiscale afin d’éviter la double imposition ». Selon lui, Matteo Renzi a déjà donné son soutien de principe au projet, qui sera examiné prochainement et pourrait entrer en application à l’automne. « C’est un pas en avant dans la lutte contre l’évitement fiscal des grandes multinationales du Net qui permettrait à l’Etat italien de récupérer des recettes fiscales », a estimé vendredi le président de la commission des Finances de la Chambre des députés, Francesco Boccia, en se déclarant prêt à appuyer le projet. Mais il n’a pas caché qu’une meilleure solution, à ses yeux, serait encore une harmonisation de la fiscalité indirecte et de la TVA au niveau européen.

Jusqu’ici les Gafa (Google, Apple, Facebook et Amazon) et autres multinationales du numérique ont acquitté en Italie moins de 10 millions d’euros par an d’impôt sur les sociétés alors qu’elles ont facturé près de 11 milliards d’euros de recettes annuelles. Selon une récente étude de Nielsen, les réseaux sociaux (Google, YouTube, Facebook…), qui facturent leurs services à travers des sociétés basées en Irlande ou aux Pays-Bas, ont encaissé quelque 1,43 milliard d’euros de recettes publicitaires en 2014, sur un marché global italien estimé à 7,6 milliards d’euros (soit 20 % du marché). A son actif, le triple mécanisme de retenue à la source, crédit d’impôt et faculté d’option aurait l’avantage d’être conforme aux recommandations de l’OCDE (Organisation de coopération et de développement économiques). Le projet de redevance intervient quelques semaines après les rumeurs sur le paiement d’une amende de 320 millions d’euros acquittée par Google en vue de solder un contentieux avec le fisc italien portant sur 2008-2013.

  • Pierre de Gasquet (Les Echos, 27/04/2015)