Aujourd’hui en Allemagne

Synthèse de la presse quotidienne

5 octobre 2016

Ce document est à usage strictement interne et a été réalisé par l’Ambassade de France en Allemagne

  1. Plusieurs sujets se partagent les Unes de la presse. La Frankfurter Allgemeine Zeitung s’inquiète qu’une « nouvelle ère glaciaire entre l’Amérique et la Russie menace ». La Süddeutsche Zeitung retient des prévisions économiques du FMI que « le populisme ralentit la croissance ». Der Tagesspiegel  titre sur le non-lieu rendu par le parquet de Mayence contre l’humoriste de la ZDF auteur d’un sketch satirique visant le président turc (« la satire visant Erdogan sans suites judiciaires »). Die Welt consacre sa Une aux perspectives d’une hausse des cotisations retraite à prestations stabilisées (« les retraites plus certaines – en dépit des politiques »). Le quotidien des affaires Handelsblatt publie une interview du ministre de la Justice Heiko Maas sur les géants de l’internet (« attaque sur Google and Co. »).
  2. Allemagne

Affaire Böhmermann : « la satire visant Erdogan sans suites judiciaires » (Tagesspiegel)

La presse rend compte du non-lieu prononcé par le parquet de Mayence dans l’affaire du poème satirique de l’humoriste Jan Böhmermann visant le président Erdogan. Saisi pour « insulte à un chef d’Etat étranger » (article 103 du code pénal allemand), le parquet a estimé qu’il n’y avait pas motif à engager des poursuites. La presse se félicite de cette décision de justice qui conforte, selon elle, les libertés démocratiques et l’Etat de droit. De l’avis du tabloïd Bild, critique envers la manière dont la chancelière avait volé au secours du président turc en qualifiant la satire de J. Böhmermann d’« intentionnellement blessante », « la leçon à tirer de l’affaire est que la politique doit s’abstenir de toute intervention ».

Monopole des grands groupes américains dans le secteur de l’internet / entretien de Heiko Maas avec le Handelsblatt   

Dans un entretien au quotidien économique, le ministre fédéral de la justice, Heiko Maas (SPD), plaide en faveur d’une harmonisation européenne afin d’empêcher que des géants tels Apple en Irlande tirent profit de conditions fiscales avantageuses. Il estime également qu’en matière de contrôle de la concurrence, les Européens sont appelés à s’interroger sur la pertinence de leur législation pour éviter des situations monopolistiques, telle celle du moteur de recherche Google. Jugeant que des entreprises comme Facebook ou Twitter qui gagnent beaucoup d’argent, ont également des responsabilités envers la société, il se prononce en faveur de l’engagement de poursuites dès lors que des contenus passibles de sanctions ne seraient pas effacés des réseaux sociaux.

  1. Europe

« Feu vert pour l’accord de Paris sur le climat » (Süddeutsche Zeitung)

La presse se félicite que le parlement européen ait approuvé à une écrasante majorité la ratification par l’UE de l’accord de Paris, ouvrant la voie à son entrée en vigueur début novembre. « Incontestablement, la protection mondiale du climat a, en un temps record, davantage avancé que ne l’espéraient ses défenseurs dans leurs rêves les plus fous il y a un an », constate avec emphase la Frankfurter Allgemeine Zeitung, nous sans rappeler que les objectifs doivent être concrétisés. Un avertissement lancé également par le quotidien alternatif tageszeitung (taz) : « la protection du climat a avancé trop lentement pendant 20 ans et, à présent, on va presque trop vite, même s’il y a de bonnes raisons à cela, réchauffement climatique, présidentielles américaines », s’inquiète le journal. La taz invite la communauté internationale à se pencher avec la même attention sur la mise en œuvre de l’accord de Paris : « comment rendre comparables les plans nationaux ? Comment évaluer des contributions trop faibles ou trop lentes ? Quel financement, quel rôle pour les mécanismes de marché sur les droits à émettre ? Faute de clarifier précisément ces détails, l’accord pourrait devenir un tigre de papier. Tout à leur jubilation, les défenseurs du climat ne doivent pas donner l’impression qu’en signant des papiers, on a déjà fait beaucoup pour lutter contre le réchauffement climatique. Le travail ne fait que commencer, restons honnêtes et réalistes malgré notre enthousiasme », fait observer le quotidien.

Entretien du vice-président de Blackrock, 1er actionnaire de la Deutsche Bank, avec la FAZ

Alors que la situation financière de la Deutsche Bank continue de préoccuper la presse, dans un entretien à la FAZ, l’ancien banquier central suisse et actuel vice-président de Blackrock, Philipp Hildebrand, déplore qu’en dépit d’appels répétés à le faire, de nombreux instituts financiers européens peinent à s’interroger sur leur modèle économique alors même qu’ils sont pénalisés pour ce manque de clarté par un défaut d’investissements. Interrogé sur la pertinence d’une fusion entre la Deutsche Bank et la Commerzbank afin de consolider le secteur, il juge contreproductif de vouloir se limiter à des consolidations nationales et plaide en faveur de fusions au niveau européen. Sur les suites du Brexit, il se déclare convaincu que la place boursière de Londres va continuer de jouer un rôle de premier plan. Estimant qu’en dépit de certains atouts, Francfort ne saurait rivaliser avec Londres (faute notamment d’écoles internationales susceptibles d’attirer les cadres et leurs familles), il juge « idéal un axe franco-allemand avec Paris et Francfort ».

  1. International

« Guerre froide entre Washington et Moscou » (Handelsblatt)

L’ensemble des quotidiens craint, à l’instar de la Frankfurter Allgemeine Zeitung, que ne s’ouvre une « nouvelle ère glaciaire entre les Etats-Unis et la Russie » suite à l’annonce par Moscou de suspendre un accord bilatéral de recyclage de plutonium militaire au plus fort des tensions dans la crise syrienne. « Poutine cherche la confrontation directe avec les Etats-Unis ; en choisissant de dénoncer un accord touchant aux armes nucléaires, il réveille de vieilles peurs presque oubliées datant de l’époque de la guerre froide, et réactive un domaine de conflit qui était devenu tabou dans les bras de fer politiques depuis la fin des confrontations entre blocs », analyse la FAZ, pour qui le président russe « joue un jeu dangereux » et « veut renforcer l’image de la Russie comme acteur imprévisible, à la manière d’un hooligan dont il vaut mieux éviter de croiser le chemin ». Les éditorialistes s’accordent à penser que les Etats-Unis ont, dans un tel contexte, eu raison de stopper les discussions avec la Russie : « ces pourparlers n’étaient qu’une farce, Moscou ne voulait pas d’une solution de paix pour la Syrie », juge la Süddeutsche Zeitung qui, dans un commentaire très pessimiste, craint que la Russie ne fasse en Syrie « la même guerre qu’en Tchétchénie : tout bombarder jusqu’à la destruction totale, mettre en place un dirigeant à sa botte et cimenter sa domination ». Le ton est également quasi-apocalyptique sous la plume du correspondant diplomatique du Handelsblatt, qui voit le monde « au bord d’un gouffre qui pourrait mener à la troisième guerre mondiale ».

Le Tagesspiegel et la Süddeutsche Zeitung font par ailleurs état de la rencontre, aujourd’hui à Berlin, des directeurs politiques des ministères des affaires étrangères allemand, français, italien, américain et britannique à l’invitation de l’Auswärtiges Amt, rencontre révélée hier en ligne par le Tagesspiegel et confirmée par l’AA : dans le conflit syrien, « Berlin mise toujours sur la diplomatie », titre le quotidien.

Afghanistan / conférence des donateurs

La conférence des donateurs pour l’Afghanistan s’est ouverte hier à Bruxelles par la signature d’un accord par lequel l’Union européenne s’engage à verser une aide financière de 200 millions d’euros à Kaboul sous conditions, notamment de mise en œuvre de réformes et de réadmission de migrants illégaux, point important pour l’Allemagne, souligne la Süddeutsche Zeitung. Un tel accord de réadmission a été signé entre l’Afghanistan et l’UE deux jours avant la conférence, « l’aide au développement est un moyen de pression », écrit la Frankfurter Allgemeine Zeitung. Dans une interview au Tagesspiegel, le commissaire européen à la coopération internationale, Neven Mimica, explique les conditions de l’aide promise par l’UE et se déclare fort inquiet de la dégradation des conditions de sécurité en Afghanistan, qui pourrait déclencher de nouveaux flux migratoires.

Déplacement de Sigmar Gabriel en Iran : « la visite se termine par un affront » (Süddeutsche Zeitung)

L’ensemble de la presse note que le vice-chancelier et ministre de l’économie Sigmar Gabriel (SPD) a essuyé au dernier jour de sa visite à Téhéran un « affront », le président du parlement iranien, Ali Larijani, ayant annulé à la dernière minute l’entretien prévu sans fournir d’explication officielle. De source iranienne, les journaux indiquent que les critiques de S. Gabriel sur la politique de l’Iran vis-à-vis de la Syrie, ainsi que sur la situation des droits de l’homme, mais aussi et surtout ses propos sur le fait que Berlin ne saurait entretenir des relations normales avec Téhéran que si l’Iran respecte le droit à l’existence d’Israël auraient suscité la colère des autorités iraniennes. Dans leurs commentaires, les journaux jugent néanmoins « réussie » (Süddeutsche Zeitung) la mission de S. Gabriel en Iran et conviennent que pour tout responsable politique allemand « le terrain est de toute façon miné » (FAZ). S. Gabriel pouvait anticiper la réaction iranienne à ses prises de position, tout comme l’Iran connaît parfaitement la relation particulière qui unit l’Allemagne à Israël, fait valoir le quotidien de Francfort pour qui le partenariat économique germano-iranien ne sera jamais sans nuages, n’en déplaise à des milieux économiques plus ou moins scrupuleux./.