Aujourd’hui en Allemagne

 

Synthèse de la presse quotidienne

Ce document est à usage strictement interne et a été réalisé par l’Ambassade de France en Allemagne

14 octobre 2016

  1. La mise en cause des autorités de Saxe pour le suicide dans la prison de Leipzig de Jaber Albakr, détenu soupçonné d’avoir préparé un attentat de grande ampleur à Berlin, fait les gros titres de la presse allemande ce matin : « stupeur face à la justice saxonne » (Frankfurter Allgemeine Zeitung) ; « sévères critiques contre la justice saxonne après le suicide d’Albakr » (Süddeutsche Zeitung) ; « en Saxe, l’Etat a été défaillant – et ce n’était la faute de personne » (Die Welt) ; « le suicide d’Albakr vire au scandale judiciaire en Saxe » (Der Tagesspiegel). Le Handelsblatt met à sa Une que les crédits prévus par Wolfgang Schäuble pour les investissements restent non employés en raison de l’incapacité de l’Etat fédéral, des Länder et des communes à préparer et gérer les projets d’investissements (« les milliards inemployés »). Le quotidien des affaires consacre son dossier du week-end à l’élection présidentielle américaine (« puissance mondiale désorientée »)
  2. Allemagne

« La justice saxonne en butte à de sévères critiques après le suicide d’Albakr » (FAZ)

L’ensemble de la presse fait état des réactions indignées après le suicide en prison, mercredi soir, du terroriste présumé, arrêté en début de semaine. Les journaux citent notamment les propos du président du groupe parlementaire SPD, Thomas Oppermann, selon qui, en Saxe, « toutes les conditions font défaut pour permettre de lutter avec professionnalisme contre le terrorisme ». Mis en accusation pour le défaut de surveillance du suspect lors de son incarcération, le ministre de la justice du Land a déclaré assumer la responsabilité politique de l’affaire tout en excluant de démissionner et le ministre-président, Stanislaw Tillich (CDU), lui a exprimé sa « pleine et entière » confiance. Déjà, en début de semaine, la police de Saxe avait été critiquée pour l’arrestation ratée, samedi, à Chemnitz, du suspect, alors même qu’il était sous surveillance. Les journaux notent brièvement que le ministre fédéral de l’intérieur, Thomas de Maizière (CDU), s’est contenté de faire valoir que ce décès vient compliquer l’enquête.

A l’exclusion notoire de la FAZ qui estime qu’il est devenu courant de critiquer les failles des autorités policières et judiciaires et fait valoir qu’il n’y a rien de plus difficile que d’empêcher efficacement quelqu’un de résolu à commettre l’irréparable, les journaux se montrent unanimement sévères envers un dénouement jugé « lamentable » (Bild), qu’ils qualifient de « catastrophe » (Die Welt), ou plus ironiquement de « mauvais polar » (Handelsblatt). Pour le quotidien alternatif de gauche tageszeitung, qui appelle à la démission du ministre de la justice de Saxe et à une refonte totale de la police et de la justice dans le Land, le suicide du suspect à la prison de Leipzig signifie « l’apogée d’une série de pannes » imputables aux autorités du Land. Evoquant un « puzzle d’incompétences », la Süddeutsche Zeitung constate amèrement qu’en Saxe, il est devenu coutumier de faire comme si c’était la seule faute du destin. Condamnant « l’incroyable dilettantisme » des autorités saxonnes, le Handelsblatt estime qu’il faut certes se garder de la tentation de croire que la survie du suspect aurait permis de faire toute la lumière sur les réseaux terroristes en Allemagne, mais constate également que ce qui fait gravement défaut dans l’affaire c’est la capacité des responsables à assumer leur échec. « Encore une fois la Saxe », déplore le Tagesspiegel qui rappelle que lors des cérémonies officielles du 26ème anniversaire de l’unité allemande, le 3 octobre dernier à Dresde, la police n’avait déjà pas été en mesure de protéger efficacement les plus hautes autorités de l’Etat des insultes et quolibets d’une foule en colère. Le journal explique le refus des autorités du Land de tirer les conséquences politiques qui s’imposeraient par « l’arrogance » et la « suffisance » d’une CDU qui gouverne le Land depuis la réunification. Selon le tabloïd Bild, dans les rangs du parti conservateur, le ministre-président Stanislaw Tillich serait connu pour son manque d’autorité et sa propension à s’entourer de ministres faibles. Le journal ajoute que si personne, au niveau fédéral, n’ose à ce stade le critiquer ouvertement, il n’en demeure pas moins, selon un membre des instances fédérales du parti dont l’identité n’est pas révélée, qu’« à partir du moment où l’un des quatre derniers ministres-présidents conservateurs au pouvoir en Allemagne se trouve constamment mis en accusation, à moins d’un an des élections fédérales, ce n’est pas une bonne publicité pour la CDU ».

Dans un entretien à la FAZ, le chef des services allemands de renseignement, Hans-Georg Maaßen, revient longuement sur la manière dont ses services sont parvenus à identifier le terroriste présumé et à intervenir avant qu’il ne passe à l’acte. Il évalue à 1200 individus le nombre de personnes en Allemagne susceptibles de commettre un acte terroriste à motivation islamiste et indique que la police criminelle allemande a pour sa part identifié plus de 500 individus dangereux.

  1. Europe

« Karlsruhe accepte le Ceta » (Handelsblatt), « Karlsruhe autorise la signature du Ceta » (FAZ)

Le « oui mais » du tribunal constitutionnel fédéral à l’approbation par l’Allemagne du traité de libre-échange UE-Canada est dans la ligne des décisions rendues ces dernières années par Karlsruhe sur des sujets politiques sensibles, tels l’aide à la Grèce ou le sauvetage de l’euro, remarque de prime abord la Süddeutsche Zeitung. Au-delà du soulagement unanime, toutes tendances confondues, que l’Allemagne ne soit pas un obstacle à la signature du Ceta fin octobre (« Karlsruhe a compris qu’une décision négative serait une atteinte à la compétence du gouvernement fédéral en matière de politique étrangère », explique la FAZ), les éditorialistes sont également satisfaits que la Cour constitutionnelle ait posé des conditions donnant droit à certaines requêtes des plaignants : « c’est bon pour la démocratie », estime le Tagesspiegel. « Cela semble paradoxal que partisans comme opposants du Ceta considèrent cette décision comme un succès, mais c’est effectivement le cas », résume la Berliner Zeitung.

La Süddeutsche Zeitung se réjouit par ailleurs du « succès de Sigmar Gabriel, qui a fait excellente figure lors de l’audience du tribunal, se montrant extrêmement bien préparé jusque dans les détails juridiques ».

  1. International

Ukraine / « la fin de la mascarade », tribune de Petro Porochenko dans la FAZ

Dans une contribution au ton offensif, le président ukrainien appelle la communauté internationale à « cesser de se faire des illusions sur les vrais intentions de la Russie, faute de quoi les agressions russes deviendront globales » et à « dénoncer sans relâche la mascarade de la Russie, dans le Donbass comme à Alep ». P. Porochenko insiste sur la mise en œuvre des dispositions sécuritaires des accords de Minsk. Les sanctions, qui ne sauraient être levées tant que la souveraineté et l’intégrité territoriale de l’Ukraine n’ont pas rétablies, « sont un moyen d’obliger la Russie à rester à la table des négociations et de l’empêcher de causer encore plus de pertes en vies humaines », souligne-t-il.

Parallèlement, la Süddeutsche Zeitung rapporte, dans une brève, que le président Poutine aurait indirectement reconnu la réalité de l’intervention russe dans l’Est de l’Ukraine, précisant au sujet des accords de Minsk, lors d’un forum d’investisseurs, que la Russie « avait été obligée de protéger la population russophone dans le Donbass ». L’article note que le tabloïd moscovite Moskovski Komsomolets a titré en ligne à ce sujet « Poutine reconnaît la participation de la Russie dans le conflit du Donbass ».

  1. France

« La France broie du noir » (Frankfurter Allgemeine Zeitung)

Dans un article de son correspondant économique Christian Schubert, la FAZ s’étonne que le fait que la France retrouve la cinquième place parmi les grandes puissances économiques (au détriment de la Grande-Bretagne pénalisée par la chute de la livre) soit passé quasi inaperçu en France. Le fait est, juge le quotidien, que les Français ont actuellement peu « le cœur à la fête » car « la croissance stagne et le chômage demeure élevé ». Le pays est « passé en mode d’attente collective » et ceci s’explique par la perspective des prochaines élections présidentielles. Le journal craint que d’ici au scrutin, la France ne se retrouve plongée dans une forme d’immobilisme, « des réformes n’étant plus à attendre de la part du gouvernement » écrit le quotidien de Francfort./.