Synthèse de la presse quotidienne
3 novembre 2016
Ce document est à usage strictement interne et a été réalisé par l’Ambassade de France en Allemagne
- Divers sujets se partagent les Unes de la presse. La Süddeutsche Zeitung note que « Mme Merkel hausse le ton envers M. Erdogan » sur la liberté de la presse en Turquie. La Frankfurter Allgemeine Zeitung indique qu’« on s’approche d’une surveillance du mouvement [d’extrême-droite] des ‘Reichsbürger’ (citoyens du Reich) au niveau national ». Die Welt décrit un dialogue de sourds entre le gouvernement et le « conseil des sages sur l’économie » qui a rendu hier son rapport annuel : « les sages : davantage de réformes ! – Merkel : on n’arrête pas de réformer ! ». Der Tagesspiegel et la presse berlinoise consacrent leur Une au projet de musée qui doit ouvrir en 2019 dans le cadre de la reconstruction du château de Berlin (« Forum Humboldt : libre entrée dans le monde »). Le quotidien des affaires Handelsblatt décrit les projets du ministre des Finances Wolfgang Schäuble pour lutter contre l’évasion fiscale (« le plan Panama »).
- Allemagne
« Le taux de chômage à son plus bas niveau depuis 25 ans » (Süddeutsche Zeitung)
L’ensemble de la presse fait état de la nouvelle baisse du chômage en Allemagne (68 000 demandeurs d’emploi de moins en octobre qu’en septembre) et relève qu’avec un taux de 5,8% (soit 2,54 millions de demandeurs d’emploi), le chômage atteint son plus bas niveau depuis la réunification. La Süddeutsche Zeitung signale que ces chiffres publiés hier par l’Agence fédérale pour l’emploi ne tiennent pas compte du fait qu’actuellement 230 000 réfugiés potentiellement à la recherche d’un emploi se trouvent en formation et n’entrent donc pas dans les statistiques. Cet aspect est également évoqué par le tabloïd Bild qui, dans son commentaire du jour, fait valoir que les annonces répétitives sur la bonne santé du marché de l’emploi sont devenues, à tort, une évidence, alors qu’un immense chantier se profile : celui qui va consister à donner du travail à des milliers de réfugiés afin de les intégrer. Pour la Süddeutsche Zeitung, le fait que les critiques et recommandations du conseil des sages allemands dans leur rapport annuel interviennent au moment même où tombent les chiffres attestant de la robustesse du marché de l’emploi n’est pas de nature à favoriser une prise de conscience en faveur de la poursuite des réformes. « Le gouvernement fédéral pense et a le sentiment qu’il réforme en permanence. Que des scientifiques en jugent autrement est normal et une confrontation constructive fait partie du jeu », a déclaré hier Mme Merkel dont la réaction aux critiques des sages allemands est reprise à sa Une par le quotidien Die Welt.
Objectifs climatiques du gouvernement fédéral : « des paroles fortes se font attendre » (Süddeutsche Zeitung)
Le quotidien de Munich indique qu’en réponse à la ministre fédérale de l’Environnement qui réclamait hier un positionnement clair de la chancelière de manière à dépasser le blocage sur la fixation d’objectifs climatiques, Mme Merkel a fait valoir qu’il revenait d’abord aux ministères concernés de discuter ensemble et que la chancellerie n’interviendrait que si les discussions ne permettent pas d’aboutir à un accord. Alors que le journal déplore cette forme de « renoncement » de la part de la chancelière, le quotidien alternatif de gauche tageszeitung part aujourd’hui en croisade contre la production et la consommation de viande en Allemagne, au motif que « l’alimentation des Allemands est responsable d’un quart du total des émissions ». Pour le journal, il est plus que temps d’appliquer sur la viande, « souvent moins chère que tout autre aliment d’origine végétale », un taux de TVA de 19% au lieu de 7% actuellement, ce qui aurait pour effet de faire baisser d’au moins 10% la consommation de viande. Faisant siennes les recommandations de la ministre SPD de l’Environnement qui préconise une diminution de moitié de la consommation de viande en Allemagne, le journal déplore l’opposition déterminée du ministère CSU de l’agriculture à un tel objectif, motivée par le fait que 83% des emplois dans la filière élevage sont fournis par les structures d’élevage intensif.
- Europe
UE/Turquie : « Merkel hausse le ton envers Erdogan » (Süddeutsche Zeitung)
« La chancelière a durci les critiques du gouvernement fédéral vis-à-vis de la vague d’arrestations en Turquie et évoqué la possibilité de répercussions de telles mesures sur les négociations d’adhésion, certes piétinantes, de la Turquie à l’UE », fait valoir la FAZ qui, comme la Süddeutsche Zeitung, cite les propos de la chancelière hier. « Les journalistes peuvent être assurés de notre solidarité, tout comme tous ceux qui, en Turquie, prennent position, dans des conditions toujours plus difficiles, en faveur de la liberté d’expression et de la presse », a déclaré Mme Merkel qui a jugé « au plus haut point alarmant que cette grande valeur que constitue la liberté d’expression et de la presse soit constamment réduite » et ajouté que la suite des évolutions en Turquie sera « attentivement suivie ».
De l’avis de la FAZ, cette réaction tardive fait peser le soupçon que l’Allemagne, soucieuse de l’avenir de l’accord migratoire, cherche à ménager la Turquie, ce qui ferait de cette dernière, après la Russie, le deuxième pays glissant vers la dictature que Berlin s’efforce de ne pas brusquer. « Se dire alarmé, c’est une chose, mais quelles en sont les conséquences ? », interroge le journal. De l’avis de Die Welt, il est temps de « fixer à Erdogan la ligne rouge à ne pas franchir ». A moyen terme, une Turquie non démocratique constitue un danger bien plus grand que quelques centaines de milliers de réfugiés de plus ou de moins », écrit le journal pour lequel c’est davantage la fermeture de la route des Balkans que l’accord migratoire du 18 mars dernier qui a permis de stopper le flux migratoire. Voyant le président Erdogan « sourd à toute critique », la Süddeutsche Zeitung appelle l’Europe impuissante à se faire le double aveu suivant : la perspective d’adhésion de la Turquie à l’UE n’est plus un levier par lequel il serait possible d’influer sur la politique turque et le président Erdogan est déterminé à tout subordonner à la consolidation de son pouvoir présidentiel, y compris ses relations avec l’Union européenne.
- International
Visite du vice-chancelier en Chine : « l’escalade calculée » (Süddeutsche Zeitung)
« Jadis les responsables politiques allemands prenaient des gants avec la Chine. Le ministre allemand de l’économie a décidé lors de son voyage de s’en passer. Il rencontre des défenseurs des droits de l’homme et critique ouvertement le gouvernement », met en exergue la Süddeutsche Zeitung qui signale, comme la FAZ, que le vice-chancelier a rencontré à l’ambassade d’Allemagne en Chine les proches de neuf dissidents et a l’intention de plaider, auprès de ses interlocuteurs chinois, en faveur de la libération d’activistes et d’avocats.
Dans des commentaires largement centrés sur le différend germano-chinois sur les investissements, les journaux approuvent la démarche de Sigmar Gabriel à qui le Tagesspiegel reconnaît le « courage d’avoir nommé les problèmes par leur nom ». Le journal rappelle à cet égard que si sa rencontre avec le dalaï lama en 2007 avait valu à la chancelière d’être traitée de « sorcière », « elle est aujourd’hui pour Pékin l’interlocuteur privilégié en Europe ». Pour l’hebdomadaire Die Zeit, Sigmar Gabriel a raison de vouloir chercher à davantage protéger les technologies d’avenir allemandes car « ce serait faire preuve de la plus grande inconscience que d’assister sans broncher à la manière dont un concurrent, qui ne respecte pas les règles du marché, pourrait par l’acquisition de telles technologies prendre une longueur d’avance ». Pour la Süddeutsche Zeitung, il demeurera toutefois un obstacle insurmontable dans les affaires avec la Chine : le fait que l’Etat et l’économie fonctionnent de manière centralisée et hiérarchique. Tout en reconnaissant que « S. Gabriel a raison sur le fond », Die Welt lui reproche néanmoins d’avoir abordé haut et fort des sujets qu’il aurait mieux valu évoquer dans le cadre d’entretiens confidentiels et après s’être assuré du soutien non seulement national, mais aussi des partenaires européens et américains. Ce manque, que déplore le journal, est selon lui imputable au fait que trop longtemps en Allemagne, responsables politiques comme décideurs économiques n’ont vu dans la Chine que le potentiel qu’offrait son immense marché, ignorant le fait qu’elle est entre-temps devenue une grande puissance.
- France
« La nouvelle jungle de Stalingrad » (Frankfurter Allgemeine Zeitung)
La FAZ et la taz consacrent chacune une correspondance à l’afflux de migrants, « dont certains évacués de Calais » (FAZ), vers un campement du nord-est de la capitale et font état de la volonté des pouvoirs publics de procéder dès cette semaine à son évacuation. Dans un commentaire, la tageszeitung fait valoir qu’après avoir pratiqué une politique cherchant avant tout à « dissuader les migrants », le démantèlement du campement de la Lande de Calais force à présent la France à « franchir un pas » et à chercher à convaincre ces migrants de déposer une demande d’asile en les persuadant du fait qu’il est préférable de renoncer à traverser la Manche à leurs risques et périls./.