La course au nouveau Vélib’ est lancée

 

Trois groupements sont sur la ligne de départ pour décrocher le contrat de vélos en libre-service à Paris.

TRANSPORT Le vieux vélo gris souris proposé par Vélib’ depuis ses débuts en 2007 sera remplacé par un nouveau modèle début 2018. Une petite révolution qui s’intègre dans un cadre plus large. Le contrat selon lequel JCDecaux fournit le système de vélo en libre-service à Paris moyennant le droit d’exploiter les panneaux publicitaires de la capi­tale arrivera à son terme fin 2017. Du coup, un appel d’offres a été lancé pour désigner l’exploitant de Vélib’ pour les dix années suivantes. Cette fois-ci, la publicité est exclue du contrat. Celui-ci ne portera que sur la gestion des vélos en libre-service (VLS).

Le lauréat, qui sera désigné au printemps, sera le groupement qui proposera la meilleure solution mais aussi la plus grosse somme au syndicat mixte qui pilotera Vélib’. « C’est une concession à plusieurs centaines de millions d’euros, même s’il y a encore pas mal d’inconnues », glisse un proche du dossier. On sait qu’il y aura des vélos électriques mais pas leur nombre. Une part de 30 % est évoquée. De même, le développement de Vélib’ en banlieue parisienne est à l’ordre du jour. Une cinquantaine de communes devraient proposer le service contre trente aujourd’hui. « Il devrait y avoir de 1 400 à 1 500 stations au lieu de 1 200 aujourd’hui, et entre 21 000 et 22 000 vélos au lieu de 18 000 aujourd’hui », explique-t-on à la Ville de Paris. Dans ce contexte encore incertain, trois groupements sont sur les rangs pour remporter l’affaire. À commencer par le titulaire actuel du contrat, JCDecaux. Il se présente comme le leader européen du VLS avec une présence dans treize pays européens et trente villes (Dublin, Séville, Lyon, Brisbane…). Pour cet appel d’offres, il fait équipe avec la SNCF et RATP. « Nous allons proposer des vélos radicalement innovants », explique le directeur général de la stratégie de JCDecaux, Albert Asséraf, qui ne veut pas en dire plus. Le groupe a déjà un modèle de vélo électrique qu’il avait présenté en 2015 : l’e-VLS doté d’une batterie escamo­table que l’usager peut recharger en une heure au bureau ou chez lui.

Vols et actes de vandalisme

Mais JCDecaux n’a pas que des atouts. Son statut de pionnier du VLS est aussi un handicap. Le géant de l’affichage urbain a inventé un modèle économique, qui n’est pas exempt de dérives financières. Selon l’Inspection générale de la Ville de Paris, alors que ce contrat devait être indolore finan­cièrement, l’exploitation des vélos a coûté 16 millions d’euros à la Mairie pour la seule année 2013 !

À l’origine, l’invention de JCDecaux était rassurante pour les communes : aucune dépense publique en échange d’espaces publicitaires concédés à l’opérateur des vélos. Les grandes villes françaises ont toutes voulu avoir leurs bicyclettes. Mais les vols et actes de vandalisme ont alourdi la note pour les communes : près de 4 000 euros par vélo et par an au cours des premières années. Il a fallu adoucir l’ardoise par la suite. « À l’échelle mondiale, le coût par vélo tourne aujourd’hui autour de 1 000 à 2 500 euros par an », estime Laurent Mercat, PDG de Smoove, une entreprise fran­çaise basée dans l’Hérault qui compte sur son expérience pour décrocher les Vélib’ parisiens. Elle gère 3 500 vélos à Moscou mais aussi à Vancouver, Helsinki, Astana, Marrakech, Strasbourg, Montpellier, Clermont-Ferrand, Valence…

Les concurrents du géant de l’affichage pointent les failles du sys­tème de verrouillage des vélos déployés par JCDecaux qui a fait dérailler les coûts pour les collectivités. « En deux ans, seulement 43 vélos sur 3  500 ont été volés à Moscou », précise Laurent Mercat, le PDG de Smoove, qui vante la ­robustesse de son modèle installé dans la capitale russe. En revanche, à Paris, de 70 à 100 % des vélos sont changés chaque année à la suite de vols et d’actes de vandalisme, ce qui place la capitale française sur le « podium » mondial. La start-up française est associée à l’espagnol Moventia et au gestionnaire de parkings Indigo (ex-Vinci Park). « Nous proposerons d’assurer la maintenance des vélos dans nos parkings », affirme Serge Clemente, PDG d’Indigo.

Dernier groupement plus inattendu, celui emmené par SFR associé avec Intermobility qui exploite des VLS en Suisse, et Tracetel qui développe des technologies de gestions de parc de bicyclettes. « En tant que spécialiste de l’Internet des objets et des villes intelligentes, nous avons des solutions pour faire passer Vélib à l’ère 2.0, estime Guillaume de Lavallade, directeur exécutif de SFR. Par exemple, en connaissant les flux de populations, nous pourrions mieux savoir dans quelle station disposer les vélos. »

Le Figaro 05/01/2017