Think Tank Hebdo du 6 au 12 avril 2017

 

Synthèse hebdomadaire des publications des think tanks 

Ambassade de France à Washington

CONFERENCE A SUIVRE

L’Atlantic Council organise, le 20 avril, une conférence intitulée The European Stability Mechanism – A Firewall for the Eurozone, sur le mécanisme européen de stabilité et son rôle de régulateur économique de la zone euro.

RIPOSTE AMÉRICAINE EN SYRIE

Les experts de la Brookings s’accordent sur la nécessité de la réponse militaire américaine à l’attaque chimique perpétrée par le régime syrien. Le politologue Natan Sachs estime que la réponse de l’administration Trump représente « un tournant » dans la politique étrangère américaine. Pour lui, les Américains ont lancé un message non seulement à la Syrie mais également à la Chine et à la Corée du Nord avec cette riposte. Le général à la retraite John Allen revient sur le contexte dans lequel l’administration a répondu : le président « a démontré à Xi Jinping qu’il ne resterait pas en marge des conflits internationaux ». Plus nuancé, Daniel Byman, expert du Moyen-Orient, estime que l’administration a plutôt voulu apaiser la conscience des Américains. Bien qu’il soit en accord avec une riposte, il s’inquiète du manque « d’expérience diplomatique » de Washington. Il souhaite que la Maison Blanche élabore une stratégie diplomatique en parallèle de son intention d’être ferme militairement face au régime.

Les experts de l’AEI proposent plusieurs pistes de réflexion à l’administration Trump à la suite de sa frappe en Syrie. Leon Aron, spécialiste de la Russie, estime que le principal défi du président Trump n’est pas le combat avec le régime syrien mais bien « la détérioration dramatique de la relation avec la Russie ». « La lune de miel est terminée, la diplomatie doit maintenant opérer », souligne L. Aron. Le chercheur Thomas Donnelly estime pour sa part que la riposte américaine est le « premier pas » vers une stratégie cohérente au Moyen-Orient. La Maison Blanche a « prouvé qu’elle pouvait frapper, et fort, contrairement aux administrations précédentes ». L’experte Danielle Pletka souligne l’importance pour l’administration de « démontrer aux Américains qu’elle a une stratégie pour vaincre ses ennemis », ce qui est « loin d’être le cas » selon elle. Optimiste, Michael Rubin ne s’inquiète pas de la détérioration de la relation américano-russe à la suite de cette attaque. Pour lui, « l’unilatéralisme dont fait preuve le président Trump » pourrait à terme favoriser la coopération au lieu d’exacerber le conflit.

« Je ne crois pas que la riposte américaine signifie l’entrée en guerre des États-Unis avec la Syrie, mais Washington doit maintenant définir clairement ses objectifs dans la région », déclare Jon Alterman. Il souligne que le candidat Trump était « très critique » d’une intervention américaine en Syrie, et que cette riposte « représente un changement drastique de ton » de la part de la Maison Blanche. Selon l’expert, le président Trump ne semble plus pesnser que la Russie pourra régler le conflit en Syrie. Dans ce contexte, le chercheur s’interroge sur la stratégie diplomatique américaine qui « semble toujours inexistante ». « Si le président utilise la force militaire, il doit déterminer les raisons pour lesquelles il utilise la force militaire » conclut le politologue.

« La position actuelle de l’administration Trump face à la Syrie est complètement différente de ce qu’elle était il y a quelques semaines seulement  » constate l’experte du Middle East Institute, qui estime que Washington n’a « aucun intérêt » à une intervention militaire en Syrie. La chercheuse estime que l’aspect le plus dramatique du conflit demeure les conditions « atroces » dans lesquelles la population civile vit actuellement. De ce fait, il est impossible de mettre en place une stratégie pour vaincre le régime de Bachar el-Assad sans l’élaboration d’un plan concret pour venir en aide à la population syrienne. Elle souligne la nécessité de la riposte américaine à l’attaque chimique perpétrée par le régime syrien qui montre que les États-Unis ne resteront pas insensibles face à ces atrocités.

 AUTRE SUJET

 

Lors d’une conférence à la Brookings, l’ambassadeur de France aux États-Unis s’est entretenu avec des chercheurs de la Brookings et de l’AEI au sujet de la montée des populismes en Europe et aux États-Unis. « Les sociétés occidentales vivent actuellement de profondes métamorphoses économiques et politiques alors que la croissance économique ne semble bénéficier que certains et délaisser plusieurs », estime l’ambassadeur Araud. Selon lui, politologues, politiciens, économistes et chercheurs ont sous-estimé l’ampleur de la crise économique de 2008 et ses effets négatifs sur la classe moyenne. « Il y a un sentiment que l’économie en France comme aux États-Unis ne subvient pas aux besoins de la classe moyenne » souligne G. Araud qui attribue une partie de la montée des populismes au fait que les « hommes blancs ne trouvent pas de travail ». Constanze Stelzenmüller, chercheuse allemande de la Brookings, estime pour sa part que l’État providence, « solide » en Allemagne, « limite les effets de la montée des populismes dans le pays ». Selon elle, les Allemands « font toujours confiance à leur gouvernement afin que ce dernier règle des problèmes fondamentaux ». Nicholas Eberstadt, chercheur américain de l’AEI, croit pour sa part que les États-Unis vivent depuis 2000 une crise de l’emploi qui « s’accentue » et qui a mené à « la tempête populiste » qui a frappé le pays en novembre 2016. Il se fait également l’écho des propos de l’ambassadeur Araud au sujet des « hommes qui ne trouvent pas de travail » mais estime que le problème est « beaucoup plus important aux États-Unis ». En conclusion, l’ambassadeur Araud estime que « les électeurs envoient un message à la gauche, à la droite et au centre : personne n’a su les protéger contre la crise économique ».