Synthèse de la presse américaine du 10 Mai 2017

Mercredi 10 mai 2017

Ambassade de France à Washington

Réalisation : Tristan-Aurel Mouline

Validation : Emmanuelle Lachaussée

  1. France/Europe

Politique en France

            Selon le Washington Post, les électeurs refusant de choisir (par l’abstention, les votes blanc ou nul) forment désormais le principal parti d’opposition en France.

Cybersécurité

Lors d’une audition au Congrès, le directeur de la NSA (Agence nationale de sécurité), Mike Rogers, a indiqué avoir « mis en garde » les autorités françaises après que ses services ont détecté des tentatives d’interférences russes lors de la campagne présidentielle française, rapporte le Wall Street Journal. A ce sujet, le New York Times souligne, en « une », que les Français étaient préparés à lutter contre les cyberattaques dont ils ont été la cible au cours de la campagne.

Sécurité

Dans une enquête publiée en « une », le Washington Post s’inquiète de l’absence de stratégie des pouvoirs publics vis-à-vis des combattants de Daech et de leur famille qui reviennent en Europe, soulignant que, parmi ceux-ci, figurent des enfants ou des bébés nés en Syrie.

The Daily Beast consacre un article à Gilles Keppel qui, selon le site d’information, « conseille Emmanuel Macron sur les enjeux liés au terrorisme ».

  1. International

Syrie

Les principaux titres (WP, NYT, WSJ, Foreign Policy, The Christian Science Monitor) évoquent tous la décision de Donald Trump d’armer les Kurdes en Syrie pour combattre Daech, un choix de nature à « compliquer les efforts de Washington pour réparer la relation bilatérale avec Ankara », indique le Wall Street Journal. « Donald Trump défie la Turquie », titre ainsi le New York Times.

Corée du Sud

La victoire du candidat progressiste Moon Jae-in à l’élection présidentielle sud-coréenne fait la une des médias qui s’interrogent sur les conséquences de ce choix sur la politique étrangère américaine vis-à-vis de Pyongyang. (WP, NYT, WSJ, The Christian Science Monitor, Foreign Policy, Bloomberg, The Daily Beast, The Atlantic). Selon la presse, le nouveau président sud-coréen pourrait opter pour une approche plus « conciliatrice » vis-à-vis de la Corée du Nord, ce qui pourrait remettre en cause la stratégie offensive de Washington et accroître les difficultés des Etats-Unis en Asie, estime l’équipe éditoriale du Washington Post.

Accord de Paris

Les efforts de lobbying du secteur privé pour que les Etats-Unis ne sortent pas de l’Accord de Paris se poursuivent – comme en témoigne un nouvel appel lancé, dans le Wall Street Journal, par des dirigeants de grandes entreprises, dont Jean-Pierre Clamadieu (Solvay), Jamie Dimon, (JP Morgan), et Richard Branson (Virgin Group). Par ailleurs, la presse (NYT) souligne la décision de la Maison-Blanche de reporter sa décision vis-à-vis d’une sortie éventuelle de l’Accord, qui ne sera pas prise avant la fin du mois selon le Wall Street Journal.

III. Politique intérieure          

Limogeage du directeur du FBI

Le limogeage « inattendu » (WSJ) du directeur du FBI provoque un raz-de-marée médiatique (WP, NYT, WSJ, CNN, The Atlantic, Los Angeles Times, National Review, USA Today, Bloomberg, Politico). Depuis la création de l’agence de renseignement en 1908, seul un directeur du FBI avait été congédié : William S. Sessions, en 1993, par le président Clinton pour des problèmes d’éthique.

Sur les recommandations du ministre de la Justice, Jeff Sessions, et du numéro deux du ministère, Rod Rosenstein, Donald Trump a mis un terme, le 9 mai, aux fonctions de James Comey qui exerçait en qualité de directeur du FBI depuis sa nomination par Barack Obama, confirmée par le Sénat, en 2013. Officiellement, la principale raison du renvoi de James Comey concerne, « non sans ironie », indique le Washington Post en « une », sa gestion de l’enquête menée par l’agence dans le cadre de l’affaire dite des emails d’Hillary Clinton.

La presse libérale et les démocrates – au premier rang desquels les anciens collaborateurs d’Hillary Clinton, remarque le Washington Postcontestent de manière virulente cette explication qui, selon eux, ne vise qu’à dissimuler la véritable raison pour laquelle le président américain a écarté James Comey – à savoir l’enquête qu’il menait sur les liens présumés entre l’équipe de Donald Trump et la Russie avant l’investiture, voire avant même l’élection. Certains républicains appellent donc à la nomination d’un procureur spécial indépendant ou d’une commission pour poursuivre l’enquête sur les liens présumés entre Donald Trump et la Russie, note le New York Times.

Deux principaux éléments nourrissent la suspicion des principaux titres de presse : (i) la concomitance de la décision de Donald Trump et du déroulement de l’enquête sur les liens avec la Russie – ce dont s’étonne Ruth Marcus dans une tribune du Washington Post – alors que les proches de Donald Trump étaient « de plus en plus frustrés » par le refus de James Comey d’apporter un démenti public aux soupçons de collusion entre le Kremlin et l’équipe de campagne de Donald Trump, affirme le Wall Street Journal en « une » ; (ii) le soutien du candidat Trump à James Comey lors de la campagne, qui avait précisément salué sa gestion de l’enquête sur l’utilisation par Hillary Clinton d’un serveur privé pour communiquer sur des affaires potentiellement sensibles.

Dans ce contexte, The Atlantic juge les explications de l’administration Trump « risibles » : « qui peut sincèrement croire que le président américain a décidé de congédier le directeur du FBI pour une autre raison que celle d’entraver les investigations portant sur de graves infractions potentielles ? », indique le magazine. « Sans doute faudrait-il que les Américains vivent dans une autre dimension pour croire ces explications », ajoute l’équipe éditoriale du Los Angeles Times. Dans un éditorial également, le New York Times accuse Donald Trump de mentir, affirmant que « M. Comey a été limogé car il était le seul à mener des investigations susceptibles de faire chuter le président ». « Donald Trump protège ses intérêts personnels au détriment de l’intérêt général », déplore pour sa part CNN.

Selon le chroniqueur du Washington Post David Ignatius, cette décision pourrait en outre s’avérer contre-productive car elle nourrit les suspicions sur les liens qu’aurait entretenus l’équipe de Donald Trump avec le Kremlin durant la campagne. « Cette affaire a une odeur de Watergate », titre le Daily Beast qui, à l’instar du New York Times et du Washington Post, fustige le caractère nixonien de la décision – faisant référence à ce que les observateurs ont appelé « le massacre du samedi soir » (Saturday Night Massacre), c’est-à-dire la mise à pied, en 1973, par le président Nixon, du procureur spécial Archibald Cox, qui avait provoqué la démission du ministre de la Justice Elliot Richardson et du numéro deux William Ruckelshaus au cours du scandale du Watergate. « En limogeant James Comey, Donald Trump joue avec le feu », titre CNN.

Les titres plus conservateurs se montrent bien plus nuancés et se félicitent même de la décision de Donald Trump de mettre fin aux fonctions de James Comey. Ainsi l’équipe éditoriale du Wall Street Journal, si elle regrette que le président américain ait tardé à prendre cette décision, estime-t-elle « mérité » le limogeage de James Comey qui, selon le quotidien, a enfreint, à ses dépens, les règles de procédure à de multiples reprises dans le cadre de l’affaire des emails d’Hillary Clinton. Le quotidien juge infondées les accusations des libéraux sur une manipulation éventuelle de la Maison-Blanche visant à empêcher la poursuite de l’enquête sur les liens avec la Russie tant cela serait maladroit. Dans la National Review, Andrew McCarthy juge convaincant le rapport de Rod Rosenstein et estime qu’il sera « difficile pour les Démocrates de le contester ».

Selon USA Today, le renvoi de James Comey était en outre « inévitable ». Dans ces circonstances, le quotidien appelle l’administration Trump à nommer un directeur « qui mérite cette fonction davantage que celui qui l’occupait jusqu’à hier ». A ce sujet, le Wall Street Journal énumère une série de candidats potentiels (des anciens membres du ministère de la Justice tels que Larry Thompson, Ken Wainstein ou Mark Filip ; ou des responsables politiques tels que Trey Gowdy, également ancien procureur ; ou encore un choix « moins conventionnel », comme Frances Townsend, conseillère à la sécurité intérieure de George Bush qui travaille désormais pour CNN). « La Maison-Blanche devra choisir un candidat connu pour son intégrité et respecté par le Congrès et les agents du FBI », conclut le quotidien.