Allemagne. Ces entreprises qui bénéficient de l’afflux de migrants

Courrier international Courrier international
Publié le

À Berlin, des migrants font la queue devant un centre social, le 31 juillet 2015. Devant l’afflux de migrants, certaines entreprises allemandes n’hésitent pas à gonfler leurs prix, réalisant d’importants bénéfices. Handelsblatt dénonce les pratiques des hôteliers et les irrégularités du système allemand.

Avec plus de 202 000 demandeurs d’asile en 2014, l’Allemagne est la première destination européenne des migrants. Et cette année pourrait bien battre des records, puisque depuis plusieurs mois des milliers de réfugiés affluent sur les côtes européennes. Une situation difficile pour le gouvernement ; une aubaine pour les entreprises spécialisées dans l’hébergement et la restauration d’urgence, explique Handelsblatt.

Le quotidien allemand estime qu’entre Füssen et Flensbourg – dans le sud et dans le nord du pays – une centaine d’entreprises et d’organisations bénéficient de l’afflux de migrants, perçu comme un véritable “plan de relance économique, une ruée vers l’or”. Depuis le début des années 1990, l’Etat fédéral et les municipalités ont réduit leur capacité d’accueil en raison de la baisse du nombre de demandeurs d’asile. Désormais, les autorités se tournent vers les entreprises privées “qui n’ont pas peur de réaliser des bénéfices”, précise le journal.

Une ruée vers l’or

Le quotidien allemand estime qu’un réfugié coûte entre 12 000 et 14 000 euros par an au secteur public. Entre les services de base tels que la nourriture et les vêtements, le coût du personnel médical et municipal – les travailleurs sociaux et les gardiens notamment – et les frais de logement, les entreprises sont largement sollicitées.

Sascha Korte est directeur de la société European Homecare, “le plus grand opérateur privé de camps de réfugiés”, selon le quotidien allemand. L’arrivée des migrants fait les affaires de son entreprise, dont les bénéfices ont augmenté de 80 % depuis 2013.

“Sascha Korte vit dans deux mondes. Lui et ses voisins habitent des villas et des maisons très coûteuses. Leurs voitures sont beaucoup trop larges pour les rues étroites et romantiques du quartier d’Heisingen. D’un côté, il vit dans la richesse et la prospérité ; d’un autre, il côtoie la pauvreté et la misère, celles des réfugiés”, rapporte Handelsblatt.

De même, la société Albert Hartmann vend des meubles et de la literie pour plus de 1 000 réfugiés par mois. Et son président l’assure : “Les délais de livraison atteignent désormais cinq semaines.” Les prix des biens restent inchangés mais, comme le précise le journal, cette tendance est “plus une exception que la règle”.

“Il y a des magouilles derrière les portes”

A Düsseldorf, dans l’ouest de l’Allemagne, certains marchands de sommeil ont fait exploser leurs prix depuis l’arrivée massive de migrants.

“Une douzaine d’hôtels servent de maisons pour les réfugiés. Avant, il fallait compter 33 euros par nuit pour une chambre simple. Maintenant, une chambre double coûte environ 100 euros pour une nuit. Des chiffres magiques pour un petit hôtel délabré”, commente le quotidien.

Comment les sociétés peuvent-elles réaliser des bénéfices si élevés ? D’abord parce qu’elles ne sont soumises à aucun contrôle de l’Etat, répond Handelsblatt, qui estime à 74 % le nombre de logements gérés par des opérateurs privés, mais aussi parce qu’elles reçoivent d’importantes subventions, sur lesquelles refuse de communiquer le gouvernement. A Bautzen, l’hôpital abrite plus de 200 demandeurs d’asile et ne dispose que de 80 lits. En 2014, l’établissement a reçu plus de 700 000 euros de subventions, selon le quotidien allemand.

“Tout laisse à penser que des magouilles ont lieu derrière les portes”, conclut le journal, qui accuse au passage le sénateur Mario Czaja (CDU) d’avoir accepté “de fausses factures de la part des hôteliers” en Basse-Bavière. Une perte estimée à 1 million d’euros, “à la charge du contribuable”.