Synthèse de la presse quotidienne
17 novembre 2015
- Le discours du président de la République devant le parlement réuni en Congrès à Versailles fait les gros titres de la Frankfurter Allgemeine Zeitung (« Hollande : ‘la France est en guerre’ »), de Die Welt (« Hollande appelle le monde à combattre l’EI ») et du Tagesspiegel (« Paris veut une coalition mondiale contre le terrorisme »). La Süddeutsche Zeitung consacre sa Une aux enquêtes en cours (« l’Europe traque les instigateurs des attaques terroristes »). Le Handelsblatt met à sa Une une photo des dirigeants du G20 avec le titre « plus forts que le terrorisme ».
- Allemagne
Attentats terroristes de Paris : l’Allemagne « modérément solidaire » (tageszeitung)
Rapportant que la chancelière a appelé samedi matin le président de la République au téléphone pour l’assurer du soutien de l’Allemagne « sous quelque forme que ce soit », plusieurs journaux soulignent que les déclarations, hier, des porte-parole du gouvernement fédéral et de l’Auswärtiges Amt, ne transpiraient toutefois pas l’enthousiasme quant à de possibles conséquences militaires. « Le gouvernement fédéral ne se ferme certes pas d’emblée à une demande de la France qui en appellerait à l’OTAN ou à l’ONU pour obtenir davantage d’aide dans le combat contre Daech, mais les Français feraient mieux de ne pas trop compter sur une contribution décisive de la part des Allemands », fait ainsi valoir la tageszeitung. La FAZ relève que le vice-chancelier et président du SPD, Sigmar Gabriel, a certes employé la formule déjà utilisée par Gerhard Schröder au lendemain des attentats du 11 septembre 2001 et parlé de « solidarité illimitée », mais s’est empressé de qualifier d’inutile toute spéculation sur le recours à l’article 5 de l’OTAN ou sur une contribution militaire allemande. « Le gouvernement fédéral accepte certes le terme usuel de « guerre » pour décrire les actes terroristes de Daech contre le monde occidental, mais ne se définit pas au regard du droit international et de son droit constitutionnel comme dans une situation de guerre. En fait, Berlin souhaiterait que l’on ne sous-estime pas son soutien en cours aux Kurdes d’Irak dans leur lutte contre Daech », explicite le quotidien de Francfort selon lequel la priorité actuelle de l’Allemagne concerne l’adoption par le conseil de sécurité de l’ONU d’une résolution sur la Syrie. « Seules des voix isolées plaident en faveur d’une contribution militaire allemande accrue à la lutte contre Daech », relève encore le journal. Même tonalité du côté de la Süddeutsche Zeitung pour qui « le gouvernement fédéral s’attache à étouffer dans l’œuf tout débat sur les conséquences militaires » des attentats de Paris. « Il apparaît que Berlin souhaite continuer à renforcer les Peshmergas, mais freinera pour toute autre mission militaire », avance le quotidien de Munich.
Avant-papiers sur le congrès de la CSU
La Süddeutsche Zeitung fait état de l’adoption hier par les instances dirigeantes de la CSU d’une motion visant à instaurer en 2016, pour l’Allemagne et pour l’UE, un plafond en matière d’accueil de réfugiés. Le journal qualifie de « provocation à l’égard de la chancelière » cette motion qui devrait être adoptée sans problème par les quelque 1 000 délégués du parti. Le journal rappelle qu’en marge du sommet du G20, la chancelière a fait valoir que l’Allemagne ne saurait fixer seule un plafond national, mais préconise que l’Union européenne et la Turquie fixent des contingents, question qui devrait figurer à l’ordre du jour du sommet entre l’UE et la Turquie qui doit se tenir à Bruxelles le 29 novembre.
Le tabloïd Bild publie un sondage INSA montrant que les conservateurs allemands regagnent un point (35%) par rapport à la semaine passée, mais que le parti populiste AfD est désormais crédité de 10,5% d’intentions de vote, ce qui le hisse au rang de troisième force politique derrière la CDU/CSU et le SPD (23,5%).
« La commission d’enquête du Bundestag aura accès à la liste des sélecteurs du BND » (Süddeutsche Zeitung)
Le journal de Munich indique que la chancellerie fédérale a fait savoir hier que les membres de la commission du Bundestag chargée d’enquêter sur les écoutes de la NSA auront accès à la liste tenue jusqu’ici secrète des sélecteurs utilisés par les services allemands de renseignement. « Cette liste est supposée prouver que les services allemands ont procédé à des écoutes de grande ampleur visant des Etats amis », souligne le quotidien.
- Europe
Coopération des services de renseignement européens
Le Tagesspiegel relaie les critiques du député conservateur allemand Roderich Kiesewetter (CDU), spécialiste des questions de politique étrangère, déplorant le manque d’interaction et de coordination des services secrets européens et appelant à une réforme de l’UE en la matière. La Süddeutsche Zeitung rappelle que la commission européenne a adopté en avril dernier un agenda sécurité dont la mise en œuvre devrait être considérablement accélérée.
- International
Sommet du G20 : « plus forts que le terrorisme » (Handelsblatt)
La presse rend compte du sommet du G20 à Antalya et insiste sur l’unité des chefs d’Etat et de gouvernement dans la lutte contre le terrorisme. Les journaux soulignent que la chancelière a marqué la volonté du G20 « d’envoyer un signal décisif pour montrer que nous sommes plus forts que le terrorisme » et qu’elle a annoncé l’organisation d’une conférence internationale sur les réfugiés syriens à Londres le 4 février 2016. Le Handelsblatt constate que « le terrorisme a dicté les discussions » du G20 et juge dommage que l’agenda initial qui accordait une place importante au climat ait été modifié. Le quotidien économique estime toutefois que le G20 doit être à nouveau l’occasion pour l’Allemagne de montrer « qu’elle se tient aux côtés de la France même en ces temps difficiles ».
- France
Discours du président de la République devant le Congrès
Le discours « guerrier » du président de la République fait grande impression sur la presse allemande. La phrase « la France est en guerre » est reprise en titre par de nombreux journaux, tels la FAZ et Bild, qui souligne la détermination du président. Les comptes rendus se focalisent presque uniquement sur l’aspect sécuritaire et militaire de ce discours, l’aspect budgétaire du renforcement des effectifs de sécurité et de justice passe inaperçu à ce stade, seules la FAZ et la Süddeutsche Zeitung citant, dans le contexte du discours, la phrase de François Hollande selon laquelle « le pacte de sécurité l’emporte sur le pacte de stabilité ». L’ensemble des quotidiens met en exergue la volonté implacable du chef de l’Etat de combattre le terrorisme et d’assurer la sécurité des citoyens en se donnant les moyens nécessaires pour y parvenir.
Dans ce contexte, plusieurs journaux consacrent des portraits élogieux au président de la République. « François Hollande prouve à nouveau que quand les choses deviennent sérieuses, on peut compter sur lui », résume la Süddeutsche Zeitung sous le titre « le président de la guerre ». « Il a stoppé les islamistes au Mali et a été un pilier pour ses concitoyens après les attentats de janvier. Et devant cette vague de terreur encore pire, le président se montre à nouveau fort, sûr de lui, actif. Il console, encourage, envoie des militaires sur les boulevards et des bombes sur la capitale du terrorisme syrien, il donne aux gens ce qu’ils attendent de l’Etat après de tels événements : qu’il se passe quelque chose. (…) La France apeurée n’a pas besoin à l’Elysée d’un agitateur qui attise la panique, mais d’un président de la raison qui n’agite pas mais agit », écrit Stefan Ulrich pour la Süddeutsche Zeitung. Michaela Wiegel pour la FAZ dresse le portrait flatteur d’un « commandant en chef » proche des armées et ayant rétabli avec les dirigeants militaires une confiance mise à mal en son temps par Nicolas Sarkozy : « il a pacifié à nouveau les relations avec les forces armées ». « Le président fait démonstration de force », titre également la Berliner Zeitung en écrivant que « même si en politique intérieure et économique le chef de l’Etat hésite et louvoie, il avance avec détermination comme chef de la diplomatie et de la lutte anti-terroriste ».
Après les attaques terroristes, « la France vacille mais ne plie pas », commente la FAZ sous la plume de Michaela Wiegel qui ne cache pas une admiration rarement exprimée pour les citoyens et la démocratie française. Même l’absence d’unité nationale politique comme au lendemain des attentats de janvier et les déclarations offensives de Nicolas Sarkozy, relevées par plusieurs médias, « attestent d’une démocratie vivante où le débat n’est pas occulté », loue la FAZ.
A l’instar de quelques autres médias, la FAZ relève par ailleurs, dans un autre article, que les attaques terroristes sont en train de porter un coup d’arrêt au tourisme en France et surtout dans la région parisienne, comme cela a déjà été le cas récemment dans d’autres régions du monde touchées par le terrorisme./.