Le revigorant manuel d’Ella Berthoud et Susan Elderkin, adeptes de la bibliothérapie.
Il y a différentes façons de soigner les maladies et les états d’âme. Le Dr Kneipp préconisait l’hydrothérapie, le Dr Bach les élixirs floraux, et voilà que deux Anglaises, Ella Berthoud et Susan Elderkin, proposent des remèdes littéraires. Une dose de Margaret Mitchell pour traiter les excès de vanité, une gélule de Thomas Mann combinée à un cachet d’Herman Melville pour mettre fin à ses obsessions, une pincée de Kerouac pour les malades de l’organisation ou une cure de Saint-Exupéry pour les phobiques de l’avion. «Quelle que soit votre maladie, nos prescriptions sont simples: un roman ou deux à lire à intervalles réguliers», soulignent les auteurs, qui conseillent un traitement renouvelable à vie: «Lisez toujours quelque chose qui vous donnera une bonne tête si vous mourez en plein milieu du livre.»
À chaque pathologie son cataplasme romanesque, donc. Piochés au hasard: Robinson Crusoé peut aider en cas de pessimisme intense, L’Homme qui plantait des arbres apaisera un stress violent et La Métamorphose atténuera les effets aigus d’une crise d’identité. Aucun auteur n’est contre-indiqué. Certains sont même cités plusieurs fois, comme ce diable de David Vann qui pourra être utile en cas de bouffées de chaleur (Sukkwan Island) et réconforter après une blessure de bricolage (la construction de la cabane dans Désolations). Kundera est une pharmacie à lui tout seul (Le Livre du rire et de l’oubli quand on fête ses quatre-vingt dix ans, L’Immortalité pour passer le cap de la centaine et L’Insoutenable Légèreté de l’être pour combattre la dépression). Zola se révèle un puissant cordial pour les hypocondriaques (L’Assommoir en cas de profonde déprime, Le Ventre de Paris contre l’excès de calories, Thérèse Raquin contre les pensées meurtrières).
ertains traitements relèvent du remède de grand-mère (Lire aux cabinets de Henry Miller contre la constipation) quand d’autres sont un peu durs à avaler (Il faut qu’on parle de Kevin, pour les patients mis sous pression pour avoir des enfants). En bons docteurs, les auteurs proposent également des ordonnances types, les dix meilleurs romans à lire «dans un hamac, quand on a un rhume, pour vous faire pleurer, pour vous faire rire ou réduire votre hypertension». Gare à l’accoutumance.
«Remèdes littéraires», d’Ella Berthoud et Susan Elderkin, traduit de l’anglais par P. Babo et P. Dupont, Lattès, 639 p., 20,90 €.
Le Figaro 18/11/2015