Synthèse de la presse quotidienne
30 novembre 2015
- Les conclusions du sommet entre l’Union européenne et la Turquie, hier à Bruxelles, font les gros titres de plusieurs quotidiens : « la Turquie entrevoit un ‘renouveau’ avec l’UE » (Süddeutsche Zeitung), « l’UE et la Turquie vont travailler plus étroitement ensemble sur la crise des réfugiés » (Frankfurter Allgemeine Zeitung), « l’UE veut décharger la Turquie d’un certain nombre de réfugiés » (Die Welt). Le Handelsblatt ouvre son édition du jour sur la COP21 et la Berliner Zeitung consacre sa une au rejet par les habitants de Hambourg de l’organisation des Jeux Olympiques de 2024.
- Allemagne
Congrès de l’AfD à Hanovre
Le congrès tenu par le parti eurosceptique AfD à Hanovre retient l’attention de l’ensemble de la presse qui relève l’appel de la présidente de l’AfD à la démission de la chancelière qui a, selon elle, perdu le contrôle de la situation en matière migratoire. Les journaux relèvent également que les 500 délégués réunis ont approuvé une motion très droitière défendue par la fédération de Rhénanie du Nord-Westphalie réclamant pour les réfugiés une limitation du regroupement familial, la fixation d’un plafond en matière d’accueil et le contrôle aux frontières allemandes. Une autre motion appelant à la levée de toutes les sanctions visant la Russie a également été votée.
- Europe
Sommet UE-Turquie
L’accord trouvé entre la Turquie et l’Union européenne sur un plan d’action commun dans la crise migratoire, l’accélération des négociations sur la libéralisation des visas ainsi que l’ouverture d’un nouveau chapitre des négociations d’adhésion est accueilli avec réserve par la presse, au premier plan desquels la Süddeutsche Zeitung, pour qui il s’agit d’un « pacte mensonger », « qui n’a rien à voir avec un vrai partenariat ». « L’UE doit faire attention ! Elle fait des avances à la Turquie comme un ado aveuglé par l’amour à sa douce », grince le tabloïd Bild en déplorant la « grande générosité envers un ‘partenaire’ considéré il y a encore peu comme non digne des valeurs européennes en matière de liberté de la presse et d’indépendance de la justice ». Die Welt déconseille à Angela Merkel de « trop miser sur la carte turque » pour endiguer l’afflux des migrants et recommande « de faire maintenant pression sur les Grecs léthargiques en matière de sécurisation des frontières extérieures et d’extension des capacités d’enregistrement des réfugiés. La chancelière doit aussi s’impliquer personnellement beaucoup plus dans les négociations sur la Syrie. Il s’agit pour elle de contrer l’impression qu’ont les Allemands que leur pays est devenu la bête de somme de l’Europe ». Pour la Frankfurter Allgemeine Zeitung, « Erdogan s’est servi de la crise des réfugiés comme d’une arme stratégique pour exercer un chantage sur l’Occident et surtout sur l’Allemagne ». Le quotidien fait néanmoins valoir que « c’est un marché donnant-donnant, car la Turquie a besoin à long terme au moins autant de l’Europe que l’Europe de la Turquie ». Le Tagesspiegel souligne pour sa part, à l’actif de ce sommet, que « pour la première fois s’est formé dans l’UE un groupe de pays volontaires, dont l’Allemagne et la France, proposant à la Turquie de relocaliser 400 000 réfugiés, ce qui est positif si l’on songe que beaucoup trop de partenaires européens s’opposent à toute forme d’engagement en la matière ».
La FAZ et le Handelsblatt publient par ailleurs des interviews avec le Haut-commissaire des Nations unies aux réfugiés, Antonio Guterres – lauréat à Düsseldorf d’un prix d’honneur pour son action – lequel loue avec force le rôle de l’Allemagne dans cette crise: « sans la contribution de l’Allemagne, nous aurions en Europe une situation catastrophique aux conséquences humanitaires incalculables » (FAZ), « ce qu’a fait l’Allemagne est remarquable » (Handelsblatt), tout en déplorant le manque de solidarité et de coordination de l’UE en la matière.
- International
Lutte contre Daech
Les journaux se font l’écho de l’entretien de l’inspecteur général de la Bundeswehr avec l’hebdomadaire BIld am Sonntag, soulignant qu’il chiffre à 1200 hommes le nombre de soldats qui pourraient être mobilisés dans le cadre de la contribution que l’Allemagne apportera à la France. Dans un entretien au Handelsblatt, Wolfgang Ischinger, chef de la conférence sur la sécurité à Munich, insiste sur le fait qu’en participant au combat contre Daech, l’Allemagne ne fait pas que se montrer solidaire avec Paris, mais veille aussi à la défense de ses intérêts. « Si l’objectif premier est la lutte contre Daech, alors il faut accepter d’avaler la couleuvre Assad », déclare-t-il par ailleurs. Dans une tribune publiée samedi par la FAZ, Norbert Röttgen président de la commission des affaires étrangères du Bundestag, insistait lui aussi sur le fait qu’en participant à la lutte contre Daech, l’Allemagne défendait sa sécurité. Dans un entretien ce matin avec la radio publique Deutschlandfunk, il déclare toutefois refuser toute coopération avec les troupes du régime syrien, au motif qu’une telle démarche ôterait toute légitimité au combat contre Daech.
Ouverture de la COP21
Alors que les éditions du week-end ont consacré de nombreux articles à une dernière présentation générale de la COP21 et de ses enjeux, les médias commentent largement ce matin l’ouverture de la conférence à Paris en présence de près de 150 chefs d’Etat et de gouvernement. « On va enfin négocier », écrit le Handelsblatt qui rappelle que 179 contributions nationales ont été publiées à ce jour.
A l’instar de la Süddeutsche Zeitung, les quotidiens se montrent plus optimistes que précédemment sur les chances de succès de la COP21, notamment en comparaison avec l’état des négociations en amont de la COP20 à la même période. Sous le titre « pourquoi cela pourrait marcher cette fois », le quotidien de Munich estime ainsi que deux arguments principaux permettent d’espérer un succès : d’une part, des Etats tels que la Chine, l’Inde et les Etats-Unis sont désormais moins réticents à la décarbonisation de leurs économies et, d’autre part, les Etats parties ont tous fait part de leur propension à faire quelque chose pour lutter contre le dérèglement climatique. « Paris pourrait marquer la fin d’un monde, dans lequel les vieux Etats industriels doivent seuls faire baisser leurs émissions, pendant que, dans les ateliers en Asie, on continue à produire allègrement de nouveaux gaz à effet de serre », écrit le journal, qui s’inquiète toutefois que les contributions nationales ne soient pas suffisantes pour respecter l’objectif des deux degrés. La Frankfurter Allgemeine Zeitung salue également les efforts diplomatiques mis en oeuvre, mais ne masque toutefois pas ses craintes sur l’absence de caractère contraignant des contributions nationales et considère que même si la communauté internationale parvenait à trouver un consensus à Paris, elle ne pourrait en constater les effets que « bien longtemps après la conférence ». Le quotidien de Francfort publie également un article mettant en évidence les craintes des industriels allemands à l’égard de la COP21, le président de la fédération de l’industrie allemande (BDI), Ulrich Grillo, ayant estimé qu’« une politique climatique ambitieuse ne doit pas se faire au détriment de la compétitivité des entreprises ».
Dans un entretien au Handelsblatt, le président de la Banque mondiale, Jim Yong Kim, affirme qu’il ne faut pas seulement craindre, comme conséquences du dérèglement climatique, l’augmentation de sécheresses et d’inondations, mais surtout l’accroissement de la pauvreté, le changement climatique pouvant conduire à ce que plus de 100 millions de personnes se trouvent en situation de pauvreté d’ici 2030.
La presse accorde en outre une couverture importante à l’interdiction de la marche pour le climat à Paris hier et à la mise en place d’un dispositif de sécurité inédit dans la capitale pendant la conférence, deux semaines après les attaques du 13 novembre. Le Handelsblatt souligne les données chiffrées de ce dispositif : près de 16 000 policiers surveillent les visiteurs, un policier pour 2,5 participants, principalement dans le périmètre du Bourget et dans les aéroports./.