Synthèse de la presse quotidienne
10 mars 2016
Ce document est à usage strictement interne et a été réalisé par l’Ambassade de France en Allemagne
- La « fermeture de la route des Balkans » fait les gros titres du Tagesspiegel (« l’Europe se cloisonne ») et de la Frankfurter Allgemeine Zeitung qui note que « M. Tusk approuve la fermeture de la route des Balkans aux réfugiés ». Die Welt met à sa Une une interview du ministre de la Chancellerie et coordonnateur du gouvernement fédéral pour la crise migratoire Peter Altmaier (« la chancellerie fédérale juge la Turquie plus européenne que bien des Etats membres »). La Süddeutsche Zeitung décrit une « grave crise de régime » en Pologne autour du statut de la Cour constitutionnelle. Le quotidien économique Handelsblatt indique que la BCE craint qu’un brexit ne mette les banques européennes en danger (« la grande frousse »).
- Allemagne
Sommet UE/Turquie : « la chancellerie fédérale juge la Turquie plus européenne que bien des Etats membres » (Die Welt)
Sous ce titre à sa une, Die Welt résume l’interview que lui a accordée Peter Altmaier (CDU), chef de la chancellerie fédérale et coordonnateur de la politique migratoire du gouvernement. Dans cet entretien, Peter Altmaier loue le projet d’accord intervenu entre la Turquie et l’Union européenne qu’il qualifie de tournant. « Pour la première fois nous avons une chance concrète de résoudre la crise des réfugiés sans pour autant sacrifier nos exigences d’ordre humanitaire », déclare-t-il avant d’ajouter que dans cette crise « Ankara a eu un comportement plus européen que celui de mains Etats membres ». En réponse aux critiques portant sur le non-respect par les autorités turques de la liberté de la presse, P. Altmaier indique : « la Turquie est malgré tout plus démocratique et plus respectueuse de l’Etat de droit que la plupart des pays de la région, c’est pourquoi il est justifié que nous fassions la tentative d’une coopération concrète qui puisse faire émerger une coopération géostratégique ». Interrogé sur le rôle de l’Autriche, P. Altmaier fait valoir : « dans cette crise, nous avons pendant des mois travaillé très étroitement et de manière très satisfaisante avec l’Autriche, mais nous considérons comme malheureuse et peu constructive la décision prise de manière unilatérale de fermer les frontières ». Dans des propos recueillis par Die Welt, la ministre autrichienne de l’intérieur, Johanna Milk-Leitner, réaffirme la position autrichienne : « ma position est claire. La route des Balkans va rester fermée et ce de manière durable (…) l’afflux humain incontrôlé via cette route doit appartenir au passé ».
Die Welt se fait par ailleurs l’écho d’une étude réalisée par l’institut économique allemand Ifo concernant le coût économique d’une réintroduction des contrôles aux frontières aux frontières internes à l’espace Schengen. Selon cette étude, pour ce qui concerne la frontière germano-autrichienne, ce coût serait de l’ordre de 1,05 à 2,6 milliards d’euros par an. Die Welt souligne que l’institut Ifo aboutit à des estimations largement moins dramatiques que celles évoquées par France Stratégie pronostiquant un coût de 100 milliards d’euros par an pour l’ensemble de l’UE.
« Davantage de contrôle des exportations d’armes » (Süddeutsche Zeitung)
La Süddeutsche Zeitung rapporte que le conseil des ministres allemand a approuvé hier une modification réglementaire visant à accroître après livraison les contrôles sur les exportations d’armement y compris d’armes légères, notamment pour éviter leur réexportation. « Les Etats qui achètent ces armes devront tolérer des contrôles (…) après expédition qui pourront être effectués entre autres par des agents d’ambassades allemandes », écrit le journal qui indique que les premiers contrôles pourraient avoir lieu cette année et que la phase de test concernera d’abord les armes légères qui sont en priorité utilisées pour les guerres civiles. Le quotidien de Munich souligne que le ministre fédéral de l’Economie et de l’Energie, Sigmar Gabriel (SPD), a affirmé que l’Allemagne introduisait ainsi un système au sein duquel le contrôle d’exportation d’armements ne s’achève pas par la délivrance d’un agrément.
- Europe
Crise migratoire : « Tusk salue la fermeture de la route des Balkans aux réfugiés » (FAZ) – « l’Europe se cloisonne » (Tagesspiegel)
La FAZ signale que le président du Conseil de l’UE s’est réjoui via Twitter du terme mis à l’immigration illégale le long de la route des Balkans et a adressé ses remerciements aux pays concernés pour avoir appliqué la stratégie commune de l’UE visant à résoudre la crise migratoire. Le Tagesspiegel relève pour sa part la réaction critique de la chancelière lors d’un discours de campagne électorale en Rhénanie-Palatinat : « ceci n’est pas la résolution de la totalité du problème ». Elle a ajouté que si moins de demandeurs d’asile arrivaient en Allemagne, en contrepartie on pouvait voir tous les soirs à la télévision des images de réfugiés massés en Grèce, une situation intenable sur le long terme. Elle a ajouté concernant la Grèce : « nous ne pouvons pas à 27 nous simplifier la vie et abandonner un pays seul face au problème ».
Dans un commentaire qui prend acte de la fermeture de le route des Balkans, la FAZ estime qu’il est « temps pour l’Allemagne de faire preuve d’un peu plus d’honnêteté dans le débat sur les réfugiés ». Quoi que l’on dise « il y a une contradiction entre le fait d’exiger à Berlin de mettre un terme à la politique du laisser-passer et les critiques qui s’ensuivent dès lors que la chose devient réalité ». « M. Tusk a raison : la démarche des pays des Balkans est couverte par les récentes décisions de l’UE que le gouvernement fédéral a, lui aussi, approuvées, même si cette évolution n’est ni reluisante ni moralement satisfaisante ». Inquiet, le Handelsblatt estime que la fermeture de la route des Balkans décharge certes l’Allemagne, mais qu’il s’agit d’un « répit à la fois trompeur et temporaire » car les migrants ne manqueront pas de se mettre en quête d’une nouvelle route au sud-est de l’Europe, raison pour laquelle la Hongrie a d’ores et déjà décrété l’Etat d’urgence. En outre, la fermeture de la route des Balkans contribue à augmenter la pression pour aboutir à une répartition rapide des migrants au sein de l’UE, sans quoi l’engorgement à la frontière greco-macédonienne risque de tourner à la catastrophe humanitaire.
Relance de la croissance en Europe : « Rome cherche à s’allier avec Paris » (FAZ)
« Dans les discussions européennes portant sur le déficit budgétaire, la dette et l’union bancaire, l’Italie cherche à faire cause commune avec la France », rapporte la FAZ qui en veut pour preuve des propos en ce sens du président de la République à l’issue du 33ème sommet franco-italien. Pour le journal, la volonté du chef de l’Etat de s’allier avec l’Italie sur la question de la croissance en Europe est à replacer dans le contexte des appels réitérés de M. Renzi à davantage de flexibilité dans l’appréciation des déficits publics.
Réunion du conseil des gouverneurs de la BCE : « la fédération des banques et les responsables politiques mettent en garde la BCE contre le renflouement monétaire » (FAZ)
Dans l’attente de la décision que devrait prendre la BCE aujourd’hui, plusieurs journaux (FAZ et Handelsblatt notamment) relaient les prises de position en Allemagne et manifestent leur inquiétude face à de nouvelles mesures d’assouplissement quantitatif.
La FAZ cite le ministre fédéral des finances, Wolfgang Schäuble (CDU), qui a fait valoir que « la voie de l’argent facile mène à la catastrophe ». Le journal mentionne aussi les critiques de l’aile économique de la CDU pour qui « la politique de l’argent facile détruit la confiance » et fait état des mises en garde exprimées par la fédération bancaire allemande.
Dans un commentaire intitulé « l’épargnant dépossédé », Die Welt ne doute pas qu’un nouveau geste de la BCE soit reçu par des applaudissements dans les pays du sud de l’Europe car « faire marcher la planche à billets contribue à atténuer la pression pour la mise en œuvre de réformes en Italie, en France ou en Espagne », juge le quotidien conservateur. La Süddeutsche Zeitung fait valoir en revanche qu’après des années de politique d’austérité budgétaire, l’Europe a enfin besoin de renouer avec une politique encourageant la croissance. « Cette voie est dans l’intérêt de l’Allemagne », fait valoir le journal car les partis extrémistes se renforcent sur fond de croissance en berne. De facto, la pression se renforce sur les responsables politiques, faisant diminuer le nombre des partisans d’une politique de stabilité budgétaire. « Ce que cela signifie pour les gouvernements, on peut l’observer en France où talonné par l’extrême-droite, le président de la République hésite à mettre en œuvre ses réformes », ajoute le journal qui cite aussi le cas de l’Italie où le gouvernement fait certes avancer les réformes mais se livre sur la scène européenne à du « Bruxelles-bashing ».
Sortie en librairie d’un ouvrage commun Sapin-Schäuble : « deux ministres des finances qui parlent clair » (Süddeutsche Zeitung)
La Süddeutsche Zeitung signale la sortie en librairie mi-mars d’un ouvrage commun rédigé par les ministres français et allemand des finances. Indiquant que selon l’éditeur allemand Hoffmann und Campe, MM. Sapin et Schäuble s’expriment très ouvertement dans une franche discussion entre amis, la Süddeutsche fait valoir que l’on attend avec impatience leur vision de l’avenir concernant la zone euro, la crise des réfugiés ou encore le maintien de la Grèce dans la zone euro.
- International
« L’objectif [de la Russie] est de déstabiliser l’Allemagne » (Bild)
Le tabloïd Bild révèle que les responsables des services secrets allemands (BND) et de l’office fédéral de la protection de la constitution (BfV) ont affirmé devant le comité parlementaire de contrôle du Bundestag que la Russie semblait poursuivre un objectif de « déstabilisation de l’Allemagne » au travers notamment de la mobilisation de l’importante communauté d’origine russe en Allemagne (2 millions de personnes). Le tabloïd croit savoir que les autorités allemandes surveillent, dans ce contexte, plusieurs associations et organisations de cette communauté.
Libye/Tunisie
La presse manifeste à nouveau son inquiétude sur la situation en Libye. A la suite des récents attentats à Ben Guerdane, la Süddeutsche Zeitung déplore la présence croissante d’islamistes armés à la frontière entre la Libye et la Tunisie et la persistance de l’instabilité politique en Libye. Die Zeit fait pour sa part le constat que « Daech progresse à nouveau en Afrique du Nord » et qu’il met ainsi à nouveau l’Europe à l’épreuve. Pour l’hebdomadaire, l’Europe fait face « à la menace d’une deuxième Syrie en Afrique du Nord et d’un nouvel afflux de masse de migrants, non pas cette fois via la Turquie, mais via l’Italie ».
- France
Réforme du code du travail : « un soupçon de révolution » (Süddeutsche Zeitung)
La Süddeutsche Zeitung et la FAZ consacrent chacune une correspondance sous forme de reportage à la journée d’action hier contre le projet de réforme du code du travail. Signalant des manifestants moins nombreux que prévu, ils soulignent toutefois que la mobilisation reste forte./.