Aujourd’hui en Allemagne

Synthèse de la presse quotidienne

 15 juin 2016

Ce document est à usage strictement interne et a été réalisé par l’Ambassade de France en Allemagne

  1. Les questions de sécurité intérieure en France font les gros titres de la presse allemande ce matin. La Süddeutsche Zeitung juge que « terrorisme et protestations ébranlent la France », le tabloïd Bild écrit « peur sur l’Euro 2016 » et consacre une double page aux questions de sécurité en France, Die Welt relaie « la crainte de nouvelles violences lors du match Allemagne-Pologne » de demain soir. Le journal alternatif de gauche tageszeitung met à sa Une les manifestations en France (« Allez les rouges !»). La Frankfurter Allgemeine Zeitung titre pour sa part sur la démission du chef de la délégation de l’UE en Turquie, l’Allemand Hansjörg Haber (« l’ambassadeur de l’UE quitte son poste à Ankara »). Le quotidien économique Handelsblatt s’inquiète que le taux d’emprunt à 10 ans de l’Allemagne soit, pour la première fois de son histoire, devenu hier négatif (« le capitalisme à l’envers »).
  2. Allemagne

Taux d’emprunt à 10 ans négatif pour l’Allemagne : « le capitalisme à l’envers » (Handelsblatt)

« C’est un petit pas et pourtant il marque une césure dans l’histoire financière de l’Allemagne », s’exclame à la Une le Handelsblatt alors que pour la première fois, les investisseurs achetant de la dette allemande à dix ans vont devoir payer eux-mêmes pour s’offrir ces obligations qui, explique le journal, constituent une référence pour l’ensemble du marché financier international. Sans surprise, la FAZ juge « dramatique » une évolution « certes profitable au ministre allemand des Finances mais catastrophique pour les épargnants allemands ». Le quotidien de Francfort estime toutefois que la politique monétaire des banques centrales, et notamment de la BCE, n’est pas seule responsable, les responsables politiques ayant eux-mêmes encouragé les banques à acquérir massivement de la dette souveraine et incité les fonds de pensions à investir dans ces obligations. La Süddeutsche Zeitung fait sienne la logique suggérée récemment par le président de la BCE en estimant que pour les épargnants, « c’est la fin d’un certain confort » qui consistait à placer ses économies sur un compte d’épargne bien rémunéré, et que même les épargnants modestes doivent songer à gérer et diversifier leurs placements pour obtenir un meilleur rendement.

  1. Europe

« L’ambassadeur, allemand, de l’UE en Turquie claque la porte » (Die Welt)

La presse rapporte que suite à des propos jugés déplacés par les autorités turques au sujet de l’accord migratoire UE-Turquie, l’ambassadeur de l’UE en Turquie, le diplomate allemand Hansjörg Huber, a démissionné et quittera au 1er août un poste qu’il occupait seulement depuis septembre dernier. Les journaux rappellent la longue carrière diplomatique de Hansjörg Huber, époux de la secrétaire d’Etat à l’Intérieur Emily Haber, ainsi que le contexte des relations très tendues entre Ankara et Bruxelles alors que la Turquie refuse d’amender sa législation anti-terroriste comme l’exige l’UE pour la mise en œuvre de l’exemption de visa pour les Turcs. La Frankfurter Allgemeine Zeitung indique, de source bruxelloise, que les rapports entre le représentant de l’UE en Turquie et la chef de la diplomatie européenne, Federica Mogherini, « n’étaient pas exempts de tensions personnelles », comme d’ailleurs les relations de Hansjörg Huber avec le vice-président de la commission Frans Timmermans. A la commission, poursuit la FAZ, on reconnaît que le succès de l’accord UE-Turquie est « fragile » compte tenu d’une nouvelle arrivée en Grèce de quelque 200 migrants ayant traversé la mer Egée ce week-end.

« Visiblement, M. Haber a jeté l’éponge non pas sous la pression d’Ankara, mais de Bruxelles et Berlin qui ne veulent pas envenimer davantage les relations difficiles avec la Turquie », commente la Süddeutsche Zeitung en critiquant le fait qu’il ait suffit qu’Ankara monte en épingle une remarque au pire maladroite pour que l’UE retire un de ses meilleurs diplomates. Pour la FAZ, la politique du président turc est devenue erratique et dangereuse pour la Turquie elle-même, qui s’isole de plus en plus alors qu’elle est touchée au premier plan par la guerre en Syrie.

  1. France

« Terrorisme et protestations ébranlent la France » (Süddeutsche Zeitung)

Sous ce titre de Une, la Süddeutsche Zeitung évoque à la fois le double meurtre de Magnanville et les violences qui ont émaillé la manifestation à Paris contre la réforme du droit du travail.

A l’instar du Handelsblatt qui souligne que « le terrorisme est de retour » en France et de la FAZ qui titre « une attaque terroriste en France fait deux victimes », les journaux font état d’une « attaque meurtrière dirigée contre la police qui choque la France » (Handelsblatt, Süddeutsche Zeitung), la Berliner Zeitung et la tageszeitung insistant sur la « bassesse » et la « perfidie » d’une telle attaque. L’ensemble de la presse note que l’auteur de ce double attentat n’était pas inconnu des forces de police, qu’il avait été arrêté en 2011 en raison de son rôle actif dans le recrutement de djihadistes français et dans l’organisation des voyages de ces derniers au Pakistan, puis condamné en 2013 à 3 ans de prison.

Dans leurs nombreux comptes rendus, les journaux se font l’écho des critiques de l’opposition qui s’est saisie du passé du tueur pour demander des comptes au gouvernement et des appels à la mise en place de centres de rétention pour les personnes radicalisées (FAZ notamment). Dans des commentaires qui dressent un parallèle avec le massacre perpétré à Orlando, les quotidiens insistent avant tout sur le caractère imprévisible de tels actes qui sont le fait « d’individus isolés, s’étant eux-mêmes radicalisés ou laissé endoctriner et qui, du jour au lendemain, deviennent des meurtriers » (FAZ). « Ce scénario constitue un cauchemar pour les forces de sécurité car même si les individus en question sont connus, il est impossible de les avoir à l’œil 24h su 24 », fait valoir le quotidien de Francfort. « Le terrorisme islamiste s’étend de plus en plus sous la forme d’une multitude d’individus agissant de manière erratique susceptibles d’agir ici ou là », constate également la Berliner Zeritung pour qui cet « incident qui n’aura que peu de répercussions sur le grand spectacle footballistique, fournit néanmoins la preuve effrayante qu’un terrorisme de tous les jours est en train de distiller son poison dans la normalité de nos sociétés ». « Ce que les meurtres d’Orlando et de Paris ont en commun c’est la facilité avec laquelle la marque ‘Etat Islamique’ est utilisée et montée en épingle. Les auteurs qui s’en revendiquent se servent de cette milice terroriste comme d’un label pour justifier et surtout donner de l’ampleur à leurs propres actes », juge de son côté la Süddeutsche Zeitung pour qui cette logique ne fonctionne que parce que « la peur s’est emparée de nos sociétés et de leurs responsables politiques ».

Dans un portrait qu’elle consacre au ministre de l’intérieur, la correspondante à Paris de la FAZ, Michaela Wiegel, souligne à son tour le « calme » et la « sérénité » qui émanent de M. Cazeneuve, « même si la réalité est sans doute tout autre ». Elle relève également que le ministre est « apprécié des forces de police parce qu’il a mis un terme aux réductions de personnel de l’ère Sarkozy et est parvenu, lors des négociations budgétaires, à obtenir davantage de moyens pour ses troupes ».

« Les ratés de la police française » (Bild)

« C’est purement incompréhensible ! 90 000 policiers et soldats, des agents de sécurité, des experts en terrorisme et des agents des services secrets sont là pour protéger l’Euro 2016 et pourtant la compétition tourne à un tournoi que se disputeraient le terrorisme islamiste et la violence des hooligans », s’insurge le tabloïd Bild pour qui la police française a « failli » en ne surveillant pas d’assez près Larossi Abballa. S’intéressant cependant avant tout au problème du hooliganisme, Bild reproche aux forces de police françaises de ne pas suffisamment veiller à séparer, autant dans les villes hôtes que dans les stades, les groupes de supporters rivaux. A ceci s’ajoute le grief formulé par des experts selon lesquels les autorités françaises ne se seraient pas suffisamment informées auprès des autorités des pays étrangers. « Aucune amélioration n’est en vue », écrit Bild qui en veut pour preuve une tentative avortée, hier, aux environs de Cannes, de refouler de violents supporters russes.

Sous le titre « Poutine se cache-t-il derrière l’attaque des hooligans ? », le tabloïd consacre un article séparé au hooliganisme russe et souligne qu’Alexander Schprygin, fondateur et président d’un groupe de supporters particulièrement violents et organisés de manière quasi militaire est un proche de Vladimir Poutine et fait à ce titre partie des officiels qui accompagnent l’équipe nationale russe de football. Dans son commentaire du jour intitulé « pas de Mondial 2018 en Russie ! », le tabloïd juge « ridicule » la sanction financière de 150 000 euros décidée par l’UEFA. « En 1985, les clubs anglais ont été exclus pour cinq ans des compétitions internationales après les violences de Bruxelles qui avaient fait 39 morts », rappelle le journal. La Süddeutsche Zeitung estime elle aussi que seule la mise en application de la menace qui pèse sur la Russie, à savoir son exclusion de l’Euro en cas de nouveaux troubles, est en mesure de faire effet : « un pays banni de l’Euro comme pays d’accueil du prochain Mondial de football, voilà qui serait la peine maximale », écrit le quotidien de Munich, sans croire à la réalisation d’un tel scénario.

Enfin, plusieurs journaux indiquent que de nouveaux matches à haut risque s’annoncent, notamment celui qui opposera demain l’Allemagne à la Pologne./.