Synthèse de la presse quotidienne
20 juillet 2016
Ce document est à usage strictement interne et a été réalisé par l’Ambassade de France en Allemagne
- A l’exception du quotidien des affaires Handelsblatt qui s’intéresse au projet de rachat par Lufthansa de parties de son concurrent Air Berlin, tous les quotidiens titrent sur l’attaque intervenue avant-hier soir dans un train près de Würzburg (Bavière). « Voici le terroriste à la hache », titre le tabloïd Bild qui publie une photo de l’auteur des faits. « L’auteur de l’attentat avait des motifs islamistes », titre plus sobrement la Frankgurter Allgemeine Zeitung. « L’auteur de l’attentat voulait se venger », titre la Süddeutsche Zeitung, « l’auteur de l’attentat voulait tuer des « infidèles », précise le Tagesspiegel. « L’Etat islamique se vante de l’attentat à la hache », peut-on encore lire à la Une de la Berliner Zeitung.
- Allemagne
Attaque de Würzburg : « le poison de l’insécurité » (Süddeutsche Zeitung)
Dans leurs comptes rendus, les journaux s’attachent à rapporter les éléments de l’enquête en cours permettant de cerner le profil de l’agresseur. Ils indiquent notamment qu’un drapeau de Daech a été retrouvé dans la chambre du jeune homme, ainsi qu’une lettre qui pourrait être une lettre d’adieux dans laquelle le jeune Afghan appelle les musulmans à se défendre. Selon les journaux il serait également avéré que lors de l’attaque, l’agresseur a à plusieurs reprises crié « Allah est grand ». Une vidéo, probablement authentique, diffusée par l’Etat islamique dans laquelle l’agresseur apparaît déclarant « je suis un soldat de l’EI et commence une opération sainte en Allemagne » est également en cours d’analyse.
Longuement interrogé lors du journal du soir de ZDF, le chef de la chancellerie fédérale et coordinateur de la politique migratoire, M. Peter Altmaier (CDU), faisait valoir que le risque terroriste en Allemagne n’a pas augmenté du fait de l’arrivée des réfugiés et soulignait que les actes terroristes récemment perpétrés en Europe étaient le fait de ressortissants qui avaient grandi dans le pays où ils sont ensuite passés à l’acte.
Dans leurs nombreux commentaires, les journaux appellent à la mesure, estimant que « céder à la panique reviendrait à aller dans le sens des incendiaires (FAZ). Ils font aussi preuve d’un certain fatalisme. « Ce qui est sûr c’est que rien n’est sûr », écrit ainsi la Süddeutsche Zeitung, « ni le train régional, ni la promenade le long de la Méditerranée, et pour se persuader du fait que même les écoles ne sont pas des endroits sûrs, point n’est besoin de regarder en direction des Etats-Unis, il suffit de se remémorer la tuerie survenue en 2002 dans un lycée d’Erfurt (16 morts), ou plus récemment, en 2009, le massacre dans une école de Winnenden (sud de l’Allemagne) lorsqu’un écolier avait abattu 15 de ses condisciples avant de retourner l’arme contre lui ». De l’avis du quotidien, l’agresseur de Würzburg peut davantage être comparé avec ces adolescents et avec le pilote déséquilibré de Germanwings qu’avec les terroristes de Daech. « Le poison de l’insécurité » est désormais partout, juge le journal ; « il va falloir vivre avec l’insécurité », ajoute la Berliner Zeitung. Pour le Handelsblatt, ce qui vient de se passer doit être une incitation pour les responsables politiques à redoubler d’efforts pour l’intégration des jeunes réfugiés mineurs arrivés seuls qui seraient au nombre de 60 000 en Allemagne. « Le problème, estime le quotidien alternatif de gauche tageszeitung, est que l’on se trouve face à des individus fragiles, instables, peut-être à la recherche d’une occasion de se grandir, même au péril de leur vie. « Un déséquilibré ne saurait trouver meilleur moyen d’attirer l’attention sur lui qu’en se revendiquant de l’EI (…) et c’est là que les intérêts de criminels isolés rejoignent ceux du terrorisme organisé », constate le journal. Pour Die Welt, qui juge cet état de fait préoccupant, il semblerait qu’il y ait eu des échanges entre le jeune Afghan, présenté comme quelqu’un qui s’est radicalisé tout seul, et le réseau de Daech. « Comment se fait-il », s’interroge le journal, que ces échanges ont pu « échapper à la vigilance des services de police ? »
- Europe
Visite de Theresa May à Berlin
Quelques avant-papiers indiquent que la Première ministre britannique effectue aujourd’hui sa première visite d’entrée en fonction à Berlin, avant de se rendre demain à Paris. Pour protocolaire qu’il soit, ce premier contact officiel entre Angela Merkel et Theresa May sera l’occasion de « tester » les nouvelles relations germano-britanniques après le vote sur le Brexit, écrivent les journaux, en rappelant que si Londres peut attendre davantage de patience et de compréhension de Berlin que de la part d’autres capitales européennes, les positions respectives restent en revanche très éloignées en matière de libre circulation des personnes dans l’UE.
La Frankfurter Allgemeine Zeitung se fait par ailleurs l’écho des prévisions de croissance mondiale revues à la baisse par le Fonds monétaire international suite au référendum britannique, soulignant que « le Brexit assombrit les perspectives pour l’Allemagne ».
« Les Bavarois ne veulent pas du Ceta » (tageszeitung)
Le quotidien alternatif de gauche rend compte d’un premier succès rapide des opposants en Bavière au traité de libre-échange UE-Canada, lesquels ont, en l’espace de deux jours, réuni quelque 50 000 signatures en vue d’organiser une consultation populaire qui contraindrait le gouvernement bavarois à voter contre le Ceta au Bundesrat.
- Turquie
« Ankara exige de Washington l’extradition de Gülen » (FAZ)
Signalant qu’Ankara a transmis quatre dossiers à Washington en vue de l’extradition de Fethullah Gülen, la FAZ fait également état de la suspension par le ministère de l’éducation de plus de 15 000 fonctionnaires soupçonnés d’être liés au mouvement de Gülen. « Au lieu d’affirmer la prédominance du droit, Erdogan a libéré la rue et les instincts primaires de la foule », déplore le journal qui tout comme l’ensemble de la presse s’inquiète du climat de purges qui règne en Turquie et juge que l’Occident dispose de peu de moyens pour empêcher la traque aux ennemis que le gouvernement turc « voit partout » (Süddeutsche Zeitung). Evoquant la « chasse » qui est également menée en Allemagne, la FAZ fait valoir que permettre au président turc en campagne électorale de venir en Allemagne haranguer les foules comme s’il était dans son propre pays a constitué une » erreur » qui « n’aurait pas dû être tolérée ».
De manière plus générale, les journaux font part de leur inquiétude sur l’avenir de la démocratie en Turquie. Pour Die Welt, « Erdogan veut installer un régime présidentiel dans lequel il possèderait un quasi pouvoir absolu et s’appuierait sur une « démocratie de la foule » dans laquelle « le sultan appelle et les sujets accourent ». Cela « n’est pas compatible avec l’Europe et l’Union européenne », met en garde le journal. Pour la tageszeitung qui titre sur la « démocratie de façade », la crise qui secoue aujourd’hui la Turquie dépasse largement les frontières du pays. Il s’agit d’un « retour en arrière pour l’ensemble du Proche-Orient ».
Plusieurs quotidiens s’inquiètent en outre de l’avenir de l’accord migratoire entre la Turquie et l’UE. Sur cet accord plane désormais « un grand doute », écrit Die Welt car le projet d’exemption de visas pour les citoyens turcs se rendant dans l’UE est « difficilement envisageable ». La Süddeutsche Zeitung appelle l’Union européenne à tenir bon face au président turc pour éviter que l’accord migratoire soit compromis. « Même si Erdogan torpille toute politique de rapprochement avec l’UE, cet argument ne saurait être avancé pour justifier qu’à nouveau des personnes entament le dangereux voyage via la mer Egée pour gagner l’Europe », fait valoir le journal.
- France
« L’état d’urgence comme solution de fortune » (FAZ)
Le projet de loi du gouvernement visant à prolonger de six mois l’état d’urgence en France fait l’objet de quelques correspondances factuelles relevant qu’un nouveau tour de vis législatif devrait être donné (Frankfurter Allgemeine Zeitung, Tagesspiegel). Le quotidien de gauche tageszeitung s’inquiète, dans un commentaire, de ce que les jeunes réservistes massivement recrutés soient autorisés à porter une arme au bout d’une formation très rudimentaire : « même si théoriquement ils doivent toujours être en patrouille avec des professionnels, porter une arme de service devrait être exclusivement réservé aux forces de sécurité qualifiées », met en garde le journal. La presse locale fait par ailleurs état de la confirmation officielle du décès de deux lycéennes berlinoises et de leur professeur dans l’attentat de Nice./.