Aujourd’hui en Allemagne

Synthèse de la presse quotidienne

25 juillet 2016

Ce document est à usage strictement interne et a été réalisé par l’Ambassade de France en Allemagne

  1. Les suites de la fusillade intervenue en fin d’après-midi, vendredi, à Munich, font la une de la quasi-totalité de la presse. « « Le tueur fou préparait son acte depuis longtemps », titre la Frankfurter Allgemeine Zeitung. « Le tueur préparait son acte depuis un an », précisent Die Welt et le Tagesspiegel. « Winnenden, Utoya, Munich », titre la Süddeutsche Zeitung. « Que faire contre cette folie ? », s’interroge la tageszeitung. « Appels à un recours à l’armée allemande à des fins de sécurité intérieure », titre la Berliner Zeitung qui fait état du débat qui reprend sur la possibilité du recours à l’armée en cas de crise majeure. Seul, le quotidien économique Handelsblatt se distingue en se penchant sur la « discorde » qui entoure le projet d’accord de libre-échange entre l’Union européenne et les Etats-Unis (TTIP).

Seul le tabloïd Bild évoque brièvement à sa une l’explosion intervenue hier soir à Ansbach (Bavière) à proximité d’un concert de musique en plein air, qui a fait 12 blessés, dont trois graves, et un mort (l’auteur de l’explosion).

  1. Allemagne

Fusillade de Munich : « le tueur préparait son acte depuis un an » (Die Welt, Tagesspiegel)

Les journaux rendent compte des éléments apportés au cours du week-end par la police de Bavière sur la fusillade qui s’est produite vendredi et a fait 10 victimes, dont le tueur lui-même qui s’est suicidé. La piste d’un acte terroriste étant exclue, l’enquête se concentre sur la personnalité du tueur, un germano-iranien de 18 ans qui aurait minutieusement préparé son passage à l’acte. Il s’était notamment rendu l’an dernier dans la ville de Winnenden où en 2009 un lycéen de 15 ans avait fait feu sur ses condisciples, tuant 15 d’entre eux, avant de retourner l’arme contre lui. Il aurait aussi rédigé une sorte de manifeste laissant apparaître des parallèles entre son acte et la tuerie d’Utoya, survenue il y a 5 ans jour pour jour. Depuis longtemps, le tueur souffrait de phobies et était également suivi pour dépression. Il était en outre adepte des jeux vidéo violents, indique également la presse.

Les quotidiens constatent que cette tragique affaire contribue à alimenter deux débats, celui sur le recours à l’armée afin de garantir la sécurité intérieure et celui sur un durcissement de la législation en matière de détention d’armes. La CDU/CSU se montre ainsi favorable au recours à la Bundeswehr (le ministre bavarois de l’intérieur (CSU) et le chef de file de la CDU en Bade-Wurtemberg se sont exprimés en ce sens). Le fait que la ministre de la défense ait déclaré au cours du week-end qu’une unité de la police militaire s’était tenue prête à intervenir lui vaut aujourd’hui les critiques d’une partie de la presse de gauche (tageszeitung) qui lui reproche d’attiser le débat sur cette délicate question et de chercher à donner des gages aux conservateurs. Alors que le vice-chancelier Sigmar Gabriel (SPD) a évoqué la nécessité de durcir la législation sur les armes, la presse signale que le ministre de l’intérieur, Thomas de Maizière (CDU), a répondu en faisant valoir que les règles en vigueur étaient déjà suffisamment restrictives et qu’il fallait davantage privilégier la vigilance de chacun pour empêcher que surviennent de tels drames.

Après avoir été saluée par les représentants politiques samedi (M. Seehofer, Mme Merkel), l’action des forces de police tout au long de la nuit de vendredi à samedi est également soulignée par la presse qui rend un hommage appuyé au porte-parole de la police de Munich pour son professionnalisme et le calme qu’il a su garder lors de ses nombreuses interventions télévisées. Une partie des journaux saluent en outre le fait que la chancelière ait attendu le dénouement de la situation avant de s’exprimer (en début d’après-midi samedi), « alors que tous avaient déjà réagi dans la nuit, S. Gabriel, le président Gauck, ou encore Obama », comme souligne la tageszeitung). Die Welt estime que cette réserve de la chancelière était la bonne attitude et que Mme Merkel a ensuite su trouver les mots justes.

La presse en ligne fait état de l’explosion d’hier soir à Ansbach et souligne que l’auteur de l’explosion, un Syrien de 27 ans en Allemagne depuis deux ans, avait déposé une demande d’asile qui a été refusée il y a un an. Selon la presse, l’individu avait déjà fait deux tentatives de suicide et était suivi pour troubles psychiatriques. Les ministres bavarois de la justice et de l’intérieur évoquent la piste d’un « attentat-suicide à motivation islamiste ».

Les journaux signalent en outre qu‘à Reutlingen (Bade-Wurtemberg), un demandeur d’asile de 21 ans a tué hier à coups de couteau (et non de machette comme les médias ont pu l’indiquer) une femme de 45 ans, blessant dans sa fuite cinq autres personnes. L’enquête s’oriente sur la piste d’un drame passionnel.

  1. Europe

TTIP / tribune du président du BDI contre le gouvernement fédéral

Le président de la Fédération allemande de l’Industrie, Ulrich Grillo, publie dans le Handelsblatt une tribune critiquant avec force ce qu’il considère comme un manque d’engagement du gouvernement fédéral en faveur des traités de libre-échange Ceta et TTIP. Alors que la rédaction du Handelsblatt, dans un article, vise essentiellement le ministre de l’Economie, Sigmar Gabriel (SPD), lequel multiplie depuis peu les déclarations critiques sur le TTIP après s’en être fait l’avocat pendant des mois, dans sa tribune, Ulrich Grillo ne cite pas de nom mais ne laisse aucun doute sur le fait qu’il vise le gouvernement dans son ensemble au premier plan duquel la chancelière. « Engagez-vous davantage politiquement ! Le gouvernement doit faire tout ce qui est en son pouvoir pour renforcer l’Europe après le référendum britannique, or mon impression est que sur le plan politique, le gouvernement fédéral limite son soutien à des déclarations formelles. Cela ne suffit pas ! », s’exclame le patron des industriels en estimant que la Commission européenne mène bien les négociations dans le cadre de son mandat, et que le gouvernement fédéral doit donc la soutenir davantage et surtout activement. Se déclarant « profondément déçu du peu d’énergie mis par la majorité de nos responsables politiques » à éclairer l’opinion publique sur la nécessité et le bien-fondé du libre-échange, Ulrich Grillo déplore qu’« un an avant les législatives, le gouvernement et les représentants des partis se livrent à une surenchère électoraliste dans leurs critiques du TTIP » au lieu d’informer les citoyens sur l’avancée des négociations. Die Welt avait déjà, vendredi, critiqué le silence des conservateurs et notamment d’Angela Merkel sur ce dossier

  1. International

Turquie : « appels à des sanctions » (Berliner Zeitung)

Dans un entretien à Bild am Sonntag, le co-président des Verts Cem Özdemir appelle à des sanctions et propose de « geler comptes et avoirs » de « l’entourage direct » d’Erdogan. Dans un entretien à Die Welt am Sonntag, Volker Kauder, président du groupe CDU/CSU au Bundestag, estime au contraire que cette question n’est pas à l’ordre du jour et fait valoir en outre que l’accord sur la politique migratoire n’est pas remis en question par la situation politique intérieure en Turquie.

Soulignant que le SPD s’était jusqu’ici toujours prononcé en faveur de la poursuite des négociations d’adhésion avec la Turquie, la Berliner Zeitung indique que la secrétaire générale du parti, Katarina Barley, a menacé pour la première fois le président Erdogan d’une rupture des négociations. « Si Erdogan venait à violer des valeurs élémentaires de l’UE, les négociations d’adhésion ne pourraient pas être poursuivies », a-t-elle déclaré au journal. Dans un entretien au tabloïd Bild,  le président du parlement européen estime que telle qu’elle se présente aujourd’hui, la Turquie n’a pas sa place dans l’UE. Et que par les évolutions actuelles, le pays sape ses chances d’adhésion.

La Süddeutsche Zeitung publiait samedi le dernier Politbarometer faisant apparaître que 87 % des Allemands sont contre l’entrée de la Turquie dans l’UE (seulement 9 % se prononcent pour). Concernant la coopération avec la Turquie dans la gestion de la crise migratoire, 82 % font part de leur scepticisme (deux points de plus qu’en avril) doutant que la Turquie soit un partenaire fiable pour l’UE.

Dans un éditorial de son rédacteur en chef, le Tagesspiegel s’interrogeait samedi sur  la dérive « fasciste » du pays et estimait le temps venu d’une réponse claire à Erdogan : l’arrêt des négociations d’adhésion à l’UE, la suspension pour la Turquie de son statut de membre du Conseil de l’Europe, l’arrêt du versement des six milliards d’euros au titre de l’accord migratoire et le rappel des soldats allemands de la base militaire d’Incirlik. La Süddeutsche Zeitung appelle aujourd’hui à une complète refondation de l’armée turque, laquelle « n’a jamais cessé de fonctionner comme un Etat dans l’Etat ».

Un G20 Finances en Chine « à l’ombre du Brexit » (Handelsblatt)

Les incertitudes sur les répercussions du Brexit sur l’économie mondiale ont assombri la réunion des ministres des finances du G20, qui se sont néanmoins déclarés bien armés pour affronter les conséquences de la sortie du Royaume-Uni de l’Union européenne, rapporte la presse. Un « optimisme de commande » critiqué par la Süddeutsche Zeitung compte tenu des nombreuses épées de Damoclès pesant sur l’économie mondiale – ralentissement de la croissance allemande suite au Brexit, surendettement des banques italiennes, fragilité de l’économie chinoise, récession en Russie et en Ukraine. De manière isolée, la Frankfurter Allgemeine Zeitung pointe l’initiative de Wolfgang Schäuble pour promouvoir le projet de taxe mondiale sur les transactions financières, un « invendable », à quelque niveau ministériel que ce soit, ironise le journal, pour lequel il paraît peu probable que la Grande-Bretagne, dans les circonstances actuelles, prenne le risque d’affaiblir encore davantage la place boursière de Londres. « L’initiative de Schäuble n’apporte rien », conclut la FAZ.

Nucléaire iranien : appel des conservateurs allemands à davantage de fermeté

Les partenaires de coalition sont divisés sur l’évaluation du respect par l’Iran de ses engagements depuis la mise en œuvre de l’accord sur le nucléaire civil, rapporte le Tagesspiegel. Suite au rapport annuel de l’Office fédéral de protection de la constitution jugeant que l’Iran poursuit à un haut degré ses efforts pour se doter de l’arme nucléaire, plusieurs voix au sein de la CDU, tel l’expert des questions de défense de la CDU, Roderich Kiesewetter, appellent à davantage de fermeté envers Téhéran, indique le journal. Le SPD fait une analyse différente de la situation, soulignant l’importance du rôle joué par l’Iran au Moyen-Orient, ajoute le Tagesspiegel. Le quotidien publie dans ce contexte un entretien avec le président de l’Office régional de protection de la constitution de Thuringe, qui appelle le gouvernement à « respecter ses propres lignes rouges et à faire suivre [les mises en gardes] d’effets ».

  1. France

Attentat de Nice / polémique sur la sécurité

Plusieurs quotidiens se font l’écho de la polémique sur la sécurité à Nice en soulignant la dimension politique et pré-électorale des joutes oratoires entre le président de la région PACA et le gouvernement. Le Tagesspiegel et la Berliner Zeitung rendent compte de la teneur de l’interview de la policière niçoise Sandra Bertin au Journal du Dimanche, accusant le ministère de l’Intérieur de pressions pour qu’elle modifie son rapport sur la présence de la police sur les lieux le soir de l’attentat.

Attentat de Nice / « soutien militaire à l’Irak » (Süddeutsche Zeitung)

La Süddeutsche Zeitung rend compte des déclarations du président de la République vendredi à l’issue du conseil restreint de sécurité et de défense, soulignant que la France entend intensifier son implication dans la coalition internationale contre Daech en Irak en mettant en place des moyens d’artillerie et en redéployant le porte-avions Charles-de-Gaulle, sans toutefois changer la nature de l’engagement français.

« La directrice du FMI, Christine Lagarde, doit être jugée » (FAZ)

L’ensemble de la presse a fait état samedi, dans des articles souvent bienveillants à l’égard de Christine Lagarde, de la décision de la Cour de cassation d’assigner devant la Cour de justice de la République l’ancienne ministre de l’Economie, soupçonnée de négligences lors d’un arbitrage rendu en faveur de Bernard Tapie. Tandis que la Frankfurter Allgemeine Zeitung approuve cette décision de justice, estimant que des points importants restent à éclaircir, tels le rôle joué par son ancien directeur de cabinet Stéphane Richard ou par l’ancien président de la République Nicolas Sarkozy, la Süddeutsche Zeitung juge disproportionné, au regard des « maigres charges » pesant contre Mme Lagarde, que la justice s’empare justement de ce dossier pour chercher à illustrer son indépendance. « En tout état de cause et à court terme, Christine Lagarde est irremplaçable à la tête du FMI, ne se contentant pas d’être une haute fonctionnaire mais ayant gardé un sens politique qui lui a permis de réagir avec flexibilité et empathie dans des crises telles que celle de la Grèce », juge notamment la Süddeutsche Zeitung./.