Le BCG inaugure un site pilote pour tester ces technologies.
PSA, Safran et DCNS lancent le Factory Lab pour les déployer plus rapidement.
On se bouscule au portillon de l’industrie du futur. Mercredi, le cabinet Boston Consulting Group (BCG) et le CEA List ont inauguré à quelques kilomètres d’intervalle un centre d’expérimentation et une plate-forme collaborative dédiés à l’usine du futur. Installé sur le plateau de Saclay, au sud de Paris, le site du BCG se veut une usine pilote. Baptisé « ICO » (Innovation Center for Operations), il comprend sur une surface de 1.200 mètres carrés une ligne d’assemblage de scooters et une autre de production de bonbons. « L’objectif, c’est d’expérimenter de manière concrète de nouvelles technologies comme la réalité augmentée », explique Moundir Rachidi, directeur du projet ICO.
Sur place, le poste de fabrication de phares des scooters teste par exemple un système qui projette sur la table de l’opérateur les instructions à suivre pour assembler les pièces et les délais impartis. Le tout afin que le travail puisse être réalisé par une personne dépourvue de compétences spécifiques.
Plus loin, une tablette équipée d’un logiciel de réalité augmentée permet de contrôler la pose des pièces sur le châssis du scooter et d’alerter s’il manque un élément. Le véhicule est ensuite transporté par chariot autoguidé vers une ligne d’assemblage où Shrek, un robot Fanuc recouvert de mousse verte absorbant les chocs manipule des pièces. Capable de transporter des charges de 35 kilos, Shrek est un « cobot », c’est-à-dire qu’il est conçu pour fonctionner à proximité des êtres humains. On peut prendre son bras pour lui faire faire un mouvement, qu’il sera ensuite capable de reproduire. « A terme, l’idée est de fabriquer alternativement des machines à laver et des scooters sur la ligne. Nous voulons tester la possibilité d’avoir deux industriels travaillant à contre-cycle », indique Moundir Rachidi.
Sur la ligne de bonbons, le BCG va utiliser des logiciels de Braincube, un expert du Big Data, pour analyser les paramètres (temps de mélange, température du four, durée de cuisson…) et optimiser le process. Mais il peine pour l’instant à avoir une production satisfaisante.
Le BCG, qui a investi plusieurs millions d’euros sur le site, croit à l’idée d’une réindustrialisation des pays matures basée sur des usines plus petites, capables de fabriquer à la commande. Avec ce site pilote, il met fin à une approche basée sur des « slide shows » pour mettre la main dans le cambouis et exposer les dernières innovations en date.
20 projets par an
Pour le cabinet, toute la difficulté sera la mise à jour. Il faudra sélectionner au niveau mondial les technologies à tester pour intéresser les industriels. Le BCG se veut agnostique. Mais le cabinet s’appuiera sur des sociétés françaises lorsqu’elles font partie des leaders de leur domaine, comme Braincube, Mesotechnic ou Dassault Systèmes parce que c’est « plus facile » pour travailler dans la durée.
Lancée à l’initiative de l’Alliance pour l’industrie du futur et installée elle aussi à Saclay au sein du CEA List, la plate-forme Factory Lab se veut, elle, un lieu de rencontre entre industriels et fournisseurs pour déployer des démonstrateurs liés à l’usine du futur. Rassemblant des industriels (PSA, Safran, DCNS, Actemium Dassault Systèmes) et trois instituts (CEA Lisp, Cetim et Arts et Métiers), le Factory Lab veut accueillir 20 projets par an, avec un budget de 40 millions d’euros sur cinq ans.
Pour qu’un projet soit lancé, il faut que plusieurs industriels ressentent un besoin commun, détaillé dans une feuille de route. Charge alors aux fournisseurs de mettre les briques logicielles et matérielles à disposition. Les projets sont censés être courts : de six à dix-huit mois maximum. Parmi ceux dans le pipeline : de l’aide à la manutention de pièces de 20 kilos et de l’assistance au montage et au contrôle par réalité augmentée. Safran testera une application de ce type pour l’aider à positionner des câbles et des capteurs sur son moteur Leap avec une grande précision. PSA et DCNS l’utiliseront pour du contrôle de pièces.
Quelle est la différence de positionnement entre l’initiative du BCG et le Factory Lab ? Le second est plus en amont. « Avec le BCG, on est en boutique, résume un fournisseur partenaire des deux initiatives alors qu’avec le Factory Lab, on fait de la customisation par rapport aux besoins des industriels. »
Les Echos 29/09/2016