Le « hand spinner », nouvelle hérésie écologique

Petite fille et son Hand Spinners le jeu qu il faut avoir aujourd hui Le Mans Sarthe France 15 Juin 2017/Credit:GILE MICHEL/SIPA/1706191359

Les « hand spinners », star des cours de récréation, se sont probablement écoulés à plusieurs centaines de milliers d’exemplaires. Un phénomène qui soulève de nombreuses questions environnementales.

Depuis plusieurs mois, un gadget en plastique en forme d’étoile à trois branches qui tourne très vite sur lui-même cartonne dans les cours de récréation. Il s’agit du « hand spinner » (en anglais « main » et « toupie »). Il est à la fois ludique, convivial et destressant. Mais se sont des dizaines, voire des centaines de milliers de ces toupies des temps modernes qui ont été vendues en France.

Aujourd’hui, presque chaque famille en possède au moins un exemplaire. Majoritairement fabriqués en Asie, ces jouets ne possèdent pas de nom de marque en général et leur traçabilité est floue. Les interrogations sont multiples : où et dans quelles conditions sont-ils fabriqués ? Les lieux de productions respectent-ils les normes élémentaires au niveau sociétal et environnemental ? Quelle quantité d’énergie est dépensée dans leurs processus de fabrication ? Quel est leur bilan carbone et environnemental ? Quelle est la part de commerce informel dans leur vente ?

Quel circuit de tri et de recyclage ?

Le gadget constitué d’une partie périphérique généralement en plastique dur (parfois en métal) et d’un noyau central muni roulement à billes métalliques ne peut qu’inquiéter les défenseurs de l’environnement. Surtout lorsque l’on sait que seulement 21 % des déchets en plastique sont recyclés dans l’Hexagone et que 36 % de ces déchets finissent encore en décharge ».

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Quel sera le devenir de ces gadgets à la fin de leur cycle de vie ? Il y a fort à parier que des centaines de milliers d’entre eux finiront dans les poubelles des ménages, destinés à être enfouis ou « valorisés » dans les centres d’incinération. Si la présence de grilles comportant des électro-aimants dans ces centres doit permettre de récupérer les roulements à billes et de traiter les parties métalliques, une grande partie du plastique sera malheureusement incinéré.

N’en déplaise aux « experts » qui estiment que l’incinération des déchets en plastique, qu’ils considèrent comme un « or noir » accroîtrait la production d’énergie, cette approche ne peut constituer une solution écologique et éthique.

Une hérésie écologique

La prolifération des « hand spinners » n’est-elle pas en contradiction avec la volonté des pouvoirs publics de réduire certains plastiques ? C’est le cas des sachets plastiques qui font l’objet d’une politique de retrait progressif auprès de nos commerçants.

D’un côté, un cadre de plus en plus restrictif, de l’autre l’arrivée massive incontrôlée sur le marché d’objets à fort impact sur l’environnement. Les puristes expliqueront qu’il s’agit là de type de plastiques différents et que les conséquences sur les écosystèmes de ces éléments ne sont pas de nature identique.

Mais cette situation n’est-elle pas le signe d’une grave incohérence en matière de politique environnementale ? Une régulation du secteur ne doit-elle pas être envisagée tout en ne privant pas nos enfants de jouets ?

Des millions de jouets à fort impact sur la nature

Nous devons porter une réflexion globale sur les jouets dont la durée d’utilisation est très brève. Interrogeons-nous par exemple sur la politique marketing des grandes chaines de fast-food ou de restauration.

Chaque menu destiné aux enfants est accompagné de la remise d’un jouet rarement labellisé « développement durable ». Et il n’est pas rare qu’un enfant dispose du même jouet en multiples exemplaires, jouets dont il ne fait parfois même pas usage.

Ce sont donc chaque année des millions de jouets qui s’accumulent dans nos foyers et qui engorgeront à terme les circuits de tri et de traitement des déchets ménagers de nos collectivités. Il est également légitime de se demander si cette mode ne devrait pas être encadrée.

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Une proposition de loi générale serait la bienvenue de la part de la nouvelle majorité parlementaire. Elle trouverait certainement écho auprès du chef de l’État engagé dans le combat de l’environnement au niveau mondial. Elle aurait le mérite d’envoyer un signal fort aux fabricants et distributeurs, aux opérateurs de la restauration rapide et aux parents-citoyens pour un changement des mentalités.

Il est désormais temps de se poser la bonne question : nos enfants nous pardonneront-ils dans les décennies à venir d’avoir empoisonné notre planète pour de si futiles petits plaisirs ? Nous n’aurons pas de circonstances atténuantes…

Les Echos 11/07/2017