Synthèse de la presse quotidienne
21 décembre 2016
Ce document est à usage strictement interne et a été réalisé par l’Ambassade de France en Allemagne
- L’attaque sur un marché de Noël à Berlin, entre-temps revendiquée par Daech, fait les titres de tous les quotidiens : « Gauck : c’est une attaque visant le cœur de notre société » (Frankfurter Allgemeine Zeitung), « la peur ! » (Bild), « le choc de Berlin » (Süddeutsche Zeitung), « Berlin en deuil » (Die Welt), « la piste du terrorisme » (Tagesspiegel), « le pays ébranlé » (Handelsblatt), « le défi » (tageszeitung).
- Allemagne
Attaque du 19 décembre contre un marché de Noël : « une épreuve pour Merkel et pour nous » (Bild)
Les journaux reprennent aujourd’hui largement les déclarations des principaux responsables politiques qui se sont exprimés au cours de la journée d’hier. La FAZ reprend à sa une les propos du président fédéral qui a pris la parole lors du service œcuménique en hommage aux victimes hier à l’église du souvenir et indique que face à une attaque « visant nos valeurs et notre mode de vie », Joachim Gauck a appelé à la cohésion. Les journaux se font aussi l’écho de l’allocution de la chancelière pour qui « nous trouverons la force de continuer à vivre comme nous voulons vivre en Allemagne : libres, ensemble et ouverts aux autres ». Dans un entretien aujourd’hui au tabloïd Bild, le ministre fédéral de l’intérieur, Thomas de Maizière (CDU), adresse un message de confiance et d’apaisement, tout en appelant à la vigilance de chacun.
La presse relève par ailleurs que les événements ont conduit la CSU à prendre ses distances d’avec la CDU sur la question de la politique migratoire et de sécurité, le président du parti et ministre président de Bavière, Horst Seehofer, ayant jugé qu’il convenait de revoir la politique migratoire. Dans un entretien accordé ce matin à la radio publique Deutschlandfunk, le ministre bavarois de l’intérieur, Joachim Herrmann (CSU), plaide en faveur d’un renforcement des contrôles pour les réfugiés entrant sur le territoire allemand et pour ceux qui s’y trouvent déjà. Il annonce la création d’un groupe de travail qui devrait être amené à faire prochainement des propositions concrètes.
Si l’enquête est aujourd’hui au point mort après la remise en liberté d’un suspect d’origine pakistanaise interpellé peu après les faits et relâché hier en fin de journée faute de preuves, les journaux insistent sur le risque politique que représente l’attaque terroriste pour la chancelière. « Dans quelle mesure cette attaque nuit-elle à la chancelière ? », s’interroge aujourd’hui le tabloïd Bild pour qui « le climat dans le pays pourrait basculer » sur la question des réfugiés. La Berliner Zeitung voit la chancelière « sur la défensive » et se demande si quelques jours après l’annonce de sa candidature à un 4ème mandat on assiste au « déclin d’Angela Merkel ».
De manière plus générale, les journaux conviennent qu’en dépit du calme relatif, la question se pose de savoir à quel point la peur, et sa récupération par certains, peut influencer, voire envenimer le débat politique. « S’il s’avérait que cet acte terroriste est le fait d’un réfugié ceci aurait l’effet de l’essence versée sur des braises », estime la FAZ qui tire également une conséquence sur le plan européen : après les attentats survenus en France et maintenant à Berlin, les pays hostiles à l’accueil des réfugiés vont se trouver confortés dans leur position. Dans son éditorial du jour, Bild entrevoit également le danger. Beaucoup de concitoyens mécontents projettent leur angoisse et leur haine sur la chancelière qui va devoir se montrer à la hauteur de la situation et trouver une réponse convaincante à la menace terroriste. « Cela va constituer le test le plus difficile pour elle et l’issue est totalement ouverte », écrit le journal. Pour le Tagesspiegel, la « dureté des mots » de Merkel selon qui ce serait particulièrement « répugnant » s’il s’avérait qu’un demandeur d’asile est l’auteur de l’attaque, révèle que c’est bien sur la question migratoire qu’elle est attaquable et « vulnérable ». Déjà l’impression de perte de contrôle, au plus fort de la crise des réfugiés, a grandement ébranlé la confiance des Allemands dans la capacité des responsables politiques à maîtriser la situation, rappelle le journal. Partageant également ce point de vue, le Handelsblatt juge des améliorations nécessaires. « Les forces de sécurité font du bon boulot mais les responsables politiques n’ont aucune vision de ce à quoi doit ressembler la sécurité intérieure et extérieure de l’Allemagne. On pratique une « politique du plus petit dénominateur commun » et c’est « insuffisant ». La Süddeutsche Zeitung critique pour sa part vivement les termes du ministre sarrois de l’intérieur, qui préside actuellement la conférence des ministres de l’intérieur des Länder, et a parlé de « situation de guerre ». « Celui qui voit dans des criminels des combattants et parle de guerre entre dans leur logique », juge le quotidien pour qui les terroristes ne sont que de « vils criminels ». Fidèle à sa ligne de tolérance, la tageszeitung estime qu’il va falloir désormais « vivre avec la menace » et avec le risque induit par la décision d’accueillir massivement des réfugiés. Même si c’est un réfugié qui est passé à l’acte, il faut se garder de toute généralisation et ne pas oublier que la grande majorité des réfugiés sont venus chercher chez nous la paix et la protection, met en garde le quotidien.
- Europe
« L’Italie prévoit une enveloppe de 20 milliards d’euros pour sauver ses banques » (FAZ)
L’annonce du nouveau chef du gouvernement italien, Paolo Gentiloni, du déblocage d’une enveloppe budgétaire de 20 milliards d’euros pour venir au secours des banques italiennes en crise, au premier plan desquelles la banque Monte dei Paschi di Siena, est, sans surprise, mal accueillie par les éditorialistes économiques, qui y voient un échec de l’union bancaire. « Une fois de plus, les contribuables vont devoir être mis à contribution pour sauver des banques de la déroute alors qu’elles ne sont plus viables », s’exaspère la Süddeutsche Zeitung. « Rien n’a avancé depuis le premier sauvetage d’une banque, en l’occurrence l’IKB allemande, par l’Etat il y a neuf ans. Tous ces appels politiques à mettre fin au surendettement des Etats suite au renflouement de leur secteurs bancaire et à impliquer les créanciers privés n’ont servi à rien, la leçon n’a pas été apprise, les dilemmes de la crise financière n’ont pas été résolus », s’emporte également le Handelsblatt. La Frankfurter Allgemeine Zeitung s’irrite tout particulièrement de ce que le programme de sauvetage italien ne soit possible qu’en impliquant de facto les partenaires européens parce que « l’Italie, pays européen le plus endetté après la Grèce, peut sans problème se refinancer grâce aux garanties du MES et aux achats d’obligations du président de la BCE Mario Draghi ».
- International
« Moscou et Ankara font démonstration d’unité après l’attentat » (Handelsblat)
La Russie et la Turquie ont affiché leur volonté de préserver leurs liens malgré l’assassinat de l’ambassadeur de Russie en Turquie par un policier turc, s’accorde à constater la presse. La réunion à Moscou des ministres des affaires étrangères russe, iranien et turc sur le conflit syrien a bien eu lieu, les trois pays ayant convenu d’une feuille de route pour rechercher une solution politique entre le gouvernement syrien et les opposants, rapportent les journaux. Pour la Süddeutsche Zeitung, « ce n’est pas par raison que MM. Poutine et Erdogan se serrent les coudes, mais par opportunisme et intérêt », le premier « cherchant à contrôler le conflit syrien en préservant Assad et ayant besoin de la Turquie comme garant de la stabilité à la frontière turco-syrienne », et le second « voulant minimiser l’influence kurde sur le terrain syrien ». Le Tagesspiegel juge que la Russie « va encore accroître la pression » sur la Turquie dans le conflit syrien, et qu’après l’assassinat d’Andreï Karlov, Erdogan « n’est pas en mesure de résister à cette pression », ce qui va également profiter à l’Iran qui cherche à asseoir son influence dans la région.
- France
« Retour au travail pour Christine Lagarde » (Süddeutsche Zeitung)
Le fait que le Fonds monétaire international ait « encore confiance » (Tagesspiegel) en sa directrice générale « malgré le fait qu’elle a été reconnue coupable » (FAZ) reste problématique pour les quotidiens. « L’image de Mme Lagarde est entachée, ce qui ne va pas faciliter son rôle lors des négociations difficiles avec la Grèce par exemple », considère le Tagesspiegel. Le correspondant à Paris du Handelsblatt est le plus critique, estimant que « la directrice du FMI reste en poste malgré sa condamnation parce qu’elle est trop faible pour tomber ». « Contrairement à Dominique Strauss-Kahn, elle n’a jamais tenu tête au gouvernement américain et suit complaisamment ce que dicte Washington : réduire les dettes, augmenter les dettes, Lagarde peut tout », déplore le Handelsblatt pour qui le FMI a pris une mauvaise décision en confirmant sa directrice à ses fonctions qu’elle ne pourra plus, de l’avis du journal, exercer de manière crédible auprès des pays endettés./.